Lancement des 16 jours d’activisme -Éduquer pour éliminer : unissons-nous pour agir !
8 min readPropos tenus par Me Godson LUBRUN pour He for she de l’Universite Quisqueya, le lundi 25 Novembre 2024…
Je voudrais, en tout début de mes propos, remercier le staff de He For She et toute la communauté de l’Université Quisqueya de m’avoir invité à cette activité marquant le lancement des seize jours d’activisme de cette année 2024. Les 16 jours d’activisme représentent un podium de plaidoyer dans la lutte en vue de l’éradication de la violence faite aux femmes et aux filles. Cet honneur m’est insigne dans la mesure où le fléau de violences sexuelles basées sur le genre tellement présent dans notre quotidien s’impose comme un phénomène de société pour lequel il est pressant d’apporter des solutions.
Les rapports nous font savoir que toutes les dix minutes, une femme a été tuée de manière délibérée par son compagnon ou un membre de sa famille. C’est une information qui nous montre comment la violence basée pour le genre constitue-t-elle un des nombreux crimes commis dans le monde et auquel il faut répondre drastiquement. En Haïti, même si nous ne disposons pas de véritables statistiques à jour, nous demeurons convaincus que les femmes toutes les catégories confondues sont confrontées à de la violence. La plupart d’entre nos femmes haïtiennes ont connu l’atrocité de la violence armée qui prévaut en Haïti.
La violence basée sur le genre, en effet, est corollaire de la violence armée des gangs criminels sur le territoire national. 700 000 personnes ont dû fuir leurs zones de résidence dans la région métropolitaine de Port-au-Prince à cause des menaces des bandits. D’entre ce chiffre, bien évidemment, l’on comptera les femmes monoparentales en nombre imposant dans notre société. Et, les camps des déplacés internes dépourvus de tout recollent les morceaux des violences faites aux femmes d’une autre manière. Ces camps deviennent des endroits propices aux violences. Les bourreaux qui y sont tentent de faire des corps des femmes de monnaie d’échanges pour assurer la survie dans ces abris de fortune.
Dans un contexte mondial et local qui ne favorise pas la tranquillité pour les femmes vivant avec la violence qui prend en proportion, la thématique de l’année, éduquer pour éliminer : unissons-nous pour agir trouve tout son sens. Il n’y a pas d’excuse pour la violence contre les filles et les femmes. Une femme sur trois à l’échelle mondiale est sortie victime de violences. Il faut une stratégie claire pour l’éradication de la violence faite aux femmes et aux filles en Haïti pour que cela finisse à jamais. Voici douze éléments pouvant constituer cette stratégie de lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles. Il s’agit :
. D’une rééducation des enfants dans les familles
La genèse de la violence faite aux femmes et aux filles sort d’enfants mal éduqués sur la question du genre. L’éducation est le premier besoin de l’homme. Et, par ce besoin, il peut façonner la vie de la meilleure manière. Pour un meilleur apprentissage des questions vitales de la société dont l’équité de genre. Si dès leur plus tendre enfance, les individus apprennent que les femmes et les filles sont comme eux des individus jouissant de droits et devoirs, ils feront réduire les violences.
. D’une application des droits reconnus aux femmes et aux filles
Beaucoup de droits sont reconnus aux femmes et aux filles les couvrant de violences. Il convient aux éléments de la chaîne pénale de poursuivre tous les auteurs, co-auteurs, complices et alliés des actes de violence commis à l’égard des femmes et des filles, de les juger afin que des corrections puissent être apportées. L’effet dissuasif aura bien eu lieu. Des individus trop fiers de leurs masculinités qui se lâchent lâchement dans les violences sur les femmes et les filles agiront avec bienveillance envers les femmes et les filles.
. Sensibilisation des femmes et des filles quant à leurs droits et leurs devoirs
Haïti contient un taux d’analphabétisme élevé. En effet, peu de femmes et de filles ont eu la chance d’être scolarisées. Cette sous-scolarisation devient tributaire de l’inculture de nos femmes et de nos filles. Par cela, il résulte une méconnaissance de nombreuses femmes et filles de leurs droits. Elles ne savent, par exemple, quelle voie empruntée quand elles sont victimes de violences de la part de l’autre sexe. Elles méritent d’être sensibilisées. Certaines femmes et filles vont dans leur ignorance jusqu’à légitimer les violences subies.
. Renforcer l’effort associatif dans la militance pour les droits des femmes
À la vérité, des efforts conjugués ont permis l’essor d’un nombre d’organismes œuvrant dans le domaine des droits des femmes. Grâce à ces organisations, des plaidoyers s’effectuent sur la cause des femmes. La violence faite aux femmes et aux filles fait l’objet des revendications des groupements de la mouvance féminine tant en Haïti qu’à l’étranger. Les gouvernants et les acteurs internationaux ont une parfaite connaissance de la situation à moindres palpitations.
. Inviter l’État haïtien à appliquer ses engagements pris pour l’éradication de la violence faite aux femmes et aux filles
L’élimination de toutes les formes de violences orchestrées à l’égard des femmes et des filles ne verra le jour que quand les engagements pris dans le monde sont appliqués par tous les États faisant partie du concert des nations. Haïti, en ce sens, s’est engagée dans la question du respect des droits reconnus aux femmes. Toutefois, ces nombreux engagements sont restés lettres mortes au niveau interne. L’État est chargé d’accomplir ses dispositions pour que les femmes haïtiennes ainsi que les filles puissent jouir pleinement de leurs droits.
. Démocratiser les mécanismes de lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles
La lutte pour l’émancipation des femmes en Haïti reste restreinte au point que des femmes de certains milieux ne s’emballent pas. Les femmes et filles de nos compagnes qui vivent des réalités qui leur sont proprement communes n’usent pas les mécanismes de lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles. Il devient urgent que le dynamique existant à la fois dans les milieux urbains que dans les milieux ruraux ou même les milieux défavorisés (les ghettos) dans les grandes villes d’Haïti comme Sainte Hélène, Cité Lescot, Cité Soleil, Bel-Air, Martissant, etc…
. Créer des Clubs de filles engagées pour l’émancipation des femmes dans les écoles secondaires
Prendre les filles à la mamelle est idéal pour de véritables impacts en vue de la résolution du problème. Dans les classes du secondaire dites classes humanitaires, les filles commencent à faire leurs premières réflexions. Elles peuvent comprendre les premiers éléments d’importance dans la question du genre. En commençant par-là, elles deviendront des militantes dans la défense des droits des femmes. Elles constitueront un véritable creuset à travers ces clubs pour cogiter sur l’épineuse problématique du genre dans le débat public en Haïti.
. Inciter les femmes et filles victimes de violences à porter plaintes auprès des juridictions pénales
Souvent les femmes et filles victimes de violences n’aiment pas poursuivre les bourreaux. Ainsi, les nombreux cas de crimes commis à l’égard des femmes et des filles restent impunis. Il est impératif que les femmes et filles victimes de violences aillent devant les autorités de justice pour formaliser par une plainte leurs situations. Les malfrats paieront pour leurs forfaits quand ils seront poursuivis par devant qui de droit. C’est de bon ton que les faits ont une connaissance de la part des autorités de justice. Et, à la fin, les proches des victimes, les victimes ainsi que les organismes spécialisés dans le domaine de l’émancipation des femmes peuvent mettre la pression sur l’État pour agir en ce sens.
. Inviter les femmes et les filles à faire partie des organismes de femmes qui luttent pour l’émancipation
Ensemble, les femmes et les filles se trouveront plus fortes dans la lutte pour l’émancipation et pour les violences faites aux femmes et aux filles. L’effort de se mettre ensemble pour constituer une véritable force apte à faire bouger les lignes est capital dans un tel mouvement. Les mouvances féminines ont besoin de plus de bras des femmes pour agir. Pas d’excuse pour les violences faites aux femmes et aux filles, un tel message aura un rayonnement plus perspicace dans la société. Une femme engagée dans un organisme de lutte exprime mieux sa volonté pour faire avancer la cause que quand elle reste éloignée.
. Produire des matériels pédagogiques et didactiques pour des modules à insérer dans les curriculums d’État
Pour une cause comme la lutte pour l’émancipation des femmes et pour l’éradication des violences faites aux femmes et aux filles, l’éducation formelle doit être primée. Et, le Ministère de l’Education Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP) est l’instance publique chargée de l’Education formelle en Haïti. Cette institution publique étatique peut donner sa participation en termes de contributions à la cause des femmes et des filles victimes de violences en insérant un curriculum qui statue sur le genre. De plus, le MENFP agit bien en produisant des matériels pédagogiques et didactiques qui sont en adéquation avec le dynamique de genre.
. Impliquer les hommes dans la lutte pour la violence faite aux femmes et aux filles
Pour bien mener la bataille, les hommes doivent être impliqués. L’apport de tous les hommes est indéniable à l’avancement de cette cause. He For She, comme l’on dit. Tous les hommes ne sont pas des bourreaux, Ils ne conçoivent pas tous, la femme de la même manière, Si pour une catégorie d’hommes, les femmes constituent des proies à abattre pour bien d’autres hommes elles sont des individus vivant dans une société démocratique tributaires de droits et obligations. Les femmes et les filles doivent miser sur l’implication des hommes dans la lutte en vue de l’éradication des violences faites aux femmes et aux filles.
. Persuader les institutions sociales à prendre en compte de la dimension genre dans leurs actions
Les institutions sociales comme les Églises, la Famille et les Écoles ne doivent pas être indifférentes à la question du genre. Comme des institutions d’éducation qui forment les êtres humains, elles enseignent en fonction des normes nouvelles de fonctionnement des sociétés. Et, l’une des nouveautés dans les sociétés de nos jours est la dimension de genre à prendre en compte dans chacune des actions à poser pour la postérité.