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« Haïti n’est pas un pays pauvre, c’est un pays appauvri », déclare la députée Sabrina Sebaihi

L’Assemblée nationale française a voté le 5 juin 2025 une résolution historique, invitant officiellement le gouvernement français à reconnaître l’ordonnance royale de 1825 comme une injustice. En cette circonstance, la députée Sabrina Sebaihi a prononcé un discours fort. Pour elle, on a privé Haïti de ses ressources. Le Quotidien News revient sur son contenu.

L’ordonnance royale de 1825 avait imposé à Haïti une rançon de 150 millions de francs-or sous la menace militaire, 21 ans après son indépendance proclamée en 1804. Cette exigence financière exorbitante a plongé le pays dans une spirale d’endettement, entravant considérablement son développement.

Dans son discours, Sabrina Sebaihi, députée française, a étalé devant l’assemblée les méfaits de cette « double dette » imposée par la France à Haïti. Selon elle, « ce que la France a fait, c’est une extorsion, une punition, une leçon de soumission infligée à un peuple qui a osé prendre sa liberté ». Haïti a payé jusqu’aux derniers centimes, non seulement en argent, mais aussi avec ses terres, son économie et ses générations sacrifiées.

La députée a insisté sur une vérité fondamentale : « Haïti n’est pas un pays pauvre, c’est un pays appauvri ». Elle a reconnu que pendant des siècles, les richesses d’Haïti : sucre, café, tabac, ont alimenté l’économie française au prix du sang et de la sueur des esclaves. Ensuite, une rançon a été exigée sous la menace en 1825. 

Quel est le résultat ? Une souveraineté bafouée et un pays étranglé par des chaînes invisibles, celles du néocolonialisme, qui perdurent aujourd’hui sous forme de blocus économique et d’ingérences politiques. En effet, pour la députée, la « double dette » ne se limite pas à un simple héritage financier. Elle est la matrice d’un désastre structurel.

La députée décrit une réalité dure : Haïti a dû payer cette rançon en contractant des dettes auprès de banques françaises, puis britanniques et américaines. Ce fut le début d’une spirale infernale, où « l’indépendance arrachée par le sang a été rachetée au prix fort, non pas pour la liberté, mais pour rester debout ».

Cette « double dette » a saigné le pays. Plus qu’une obligation financière, elle a signifié la vente forcée des terres, l’appauvrissement économique et la perte de souveraineté. Pour Mme Sebaihi, Haïti est « un pays que l’on a méthodiquement privé de ses ressources, de ses moyens et de son droit à l’autodétermination ».

Les chaînes invisibles du néocolonialisme et l’appel à une justice réparatrice

Le discours ne s’arrête pas à la dette. Il pointe aussi les formes contemporaines de domination. Une fois brisées les chaînes visibles de l’esclavage et de la dette, Haïti fut soumise aux « chaînes invisibles du néocolonialisme ». Blocus économique, tutelle internationale, ingérence politique constante. Ces pratiques ont continué d’entraver la construction d’un État haïtien libre et souverain.

Sabrina Sebaihi rappelle avec force que « chaque tentative de souveraineté a été étouffée par des puissances qui ne supportaient pas qu’un peuple noir se gouverne lui-même ». Parmi les responsables de cette tragédie, elle nomme clairement la République française qui « a tiré profit d’Haïti en esclavagiste, l’a saignée en créancière et l’a abandonnée en donneuse de leçons ».

Reconnaître cette injustice historique n’est pas un acte de culpabilité, mais une exigence de justice. Pour la députée, « ce que cette résolution propose, ce n’est pas un chèque, c’est une démarche ». Elle appelle à la mise en place d’une commission indépendante, ainsi qu’à une coopération mémorielle entre la France et Haïti, afin de transmettre aux générations futures cette page trop longtemps occultée.

Marie-Alla Clerville

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