Alors que les gangs continuent de marcher sans retenue sur la population civile haïtienne au jour le jour, une nouvelle reluisante et pleine de sens vient de tomber comme une goutte d’eau fraîche sur les lèvres des Haïtiens cette semaine. Il ne s’agit pas d’une résolution définitive pour combattre l’insécurité en Haïti ni d’actions concrètes réalisées en ce sens, mais plutôt de la classification officielle du compas dans la liste des patrimoines immatériels de l’UNESCO.
Cette nouvelle, bien que obnubilée par la férocité des gangs, a été accueillie à sa juste valeur au sein de la communauté qui pleurait encore les massacres en série réalisés par les groupes armés dont à Pont-Sondé et ses environs. Elle fait suite à l’exploit de la sélection nationale haïtienne de football le 18 novembre dernier. Quels que soient la conception et le choix de chacun, la fierté d’être sur le toit du monde est nôtre.
En effet, le compas succède au « soup joumou » qui l’a récemment devancée sur cette galerie mondiale d’une si grande valeur. Sa classification vient rehausser l’image du pays qui s’éclabousse énormément aux yeux du monde à cause de la conjoncture. Cette prouesse témoigne de la profondeur de la culture nationale et de sa richesse patrimoniale. Elle est l’expression de la résilience haïtienne qui refuse de se briser tout en montrant malgré les circonstances qu’il est un grand peuple et que l’espoir est toujours là.
Les circonstances qui peuvent amener un petit sourire sur les lèvres des Haïtiens traumatisés par cette guerre fratricide deviennent tellement rares. Il nous a fallu nous réfugier au sport et à la culture pour grappiller un peu de bien-être et de joie temporaire. Si minuscules (au regard du barbarisme des gangs et de leurs complices) que soient ces réussites, elles charrient des messages forts qui contrastent avec cette image négative que projettent nos leaders et les gangs armés à l’extérieur.
Une vitrine de plus pour parler en notre nom. Pour continuer d’écrire notre histoire de peuple. Ces deux exploits en moins d’un mois montrent que tout n’est pas perdu. Qu’Haïti est bien plus que ce qui se projette sur les réseaux et dans les médias traditionnels.
Ce contraste est plutôt positif dans le sens où le message est passé: celui d’appeler les acteurs à faire volte-face. C’est une preuve que si les politiciens et leurs complices nous avaient donné une chance, on aurait accompli plein de bonnes choses. L’entrée en grande pompe du Compas dans la cour des grands n’est pas une occasion pour certaines personnes de tirer profit sans jamais faire le minimum d’effort. Cela montre que toutes les catégories sociales ne sont pas en décomposition. Certains groupes, certains individus continuent de travailler avec cœur et sens de responsabilité au profit du pays.
Daniel Sévère
