À la découverte d’Allenby Augustin, le deuxième Haïtien à la tête du Centre d’Art
5 min readLe Centre d’Art a l’heureux privilège de jouir des services du passionné de la culture, Allenby Augustin, comme nouveau directeur exécutif. Ce mordu de l’art succède à la tête de cette prestigieuse institution, à M. Jean Mathiot, et devient le second Haïtien à occuper ce poste depuis la création du Centre d’Art en 1944. Il promet de continuer à travailler pour atteindre les objectifs visés par le centre culturel qu’il dirige, afin de porter l’art haïtien au niveau mondial.
Bercé par l’ambiance culturelle des Cayes, où il a vu le jour dans une famille de trois enfants, Allenby Augustin noue une relation particulièrement intense avec l’art haïtien dans toutes ses dimensions. Un secteur dont la beauté l’a complètement médusé, et ce, dès son jeune âge à l’école. Il a commencé à s’immerger dans le vaste océan des arts au Collège Horace Pauléus Sanon, alors qu’il était encore au secondaire. Déjà en septième année fondamentale, il était saxophoniste à la fanfare de son école. Un peu plus tard, on verra en lui sa grande capacité à séduire par sa voix, comme chanteur ou comme conteur. Ce qui, vraisemblablement, le conduira sur des scènes de théâtre comme comédien. C’est finalement à « Pye poudre » qu’il lance sa carrière en 2007, avant de rejoindre la Bibliothèque Monique Calixte.
De retour en Haïti, en provenance de Paris où il a fréquenté une école de théâtre et d’art oratoire, M. Allenby Augustin a mis sur pied l’association « Akoustik Prod » avec laquelle il a commencé à imposer sa vision de la culture en Haïti. « On a voulu décloisonner, décentraliser les activités culturelles en Haïti. En ce sens, on a créé l’association afin de pouvoir intervenir dans les villes de province », explique l’ex-animateur polyvalent de la Fondation Connaissance et Liberté (FOKAL). C’est dans sa ville natale qu’il a commencé à avancer les premiers pions de son projet de décentralisation des événements culturels. « De fait, nous avons pu réaliser des événements culturels à la hauteur des festivals de Port-au-Prince », affirme avec fierté l’initiateur du festival « Krik Krak », qui promeut la démocratisation de l’art en Haïti.
En dépit de sa virtuosité, Allenby Augustin avoue qu’il préfère être dans la planification du jeu artistique que d’être au cœur de l’événement comme acteur. D’où son master en Management des organisations culturelles et économie de la culture à l’Université Paris-Dauphine. Fort de son expertise, M. Augustin a commencé à collaborer avec le Centre dArt comme Coordonnateur adjoint de l’Exposition RÈL, l’an dernier. Un projet qui aura permis aux artistes de s’exprimer à travers leurs œuvres inspirées de l’instabilité du pays. M. Augustin deviendra, après de fructueuses collaborations, le deuxième Haïtien à occuper le poste de Directeur exécutif de la prestigieuse institution fondée par l’aquarelliste américain Dewitt Peters en 1944.
« Je suis très honoré d’être le nouveau directeur exécutif de cette grande institution, confie M. Augustin. On va continuer à travailler pour atteindre les objectifs du Centre d’Art et de porter l’art haïtien au niveau mondial, en renforçant la capacité des artistes haïtiens en leur proposant des formations », poursuit le Directeur. De plus, il promet de travailler afin de placer le Centre d’Art au cœur de la culture caribéenne. « Personnellement, je souhaite rendre le centre beaucoup plus accessible aux gens qui ont besoin d’un espace de création, de production, indépendamment de leur niveau, de leur moyen, de leur classe sociale entre autres. En somme, je veux le rendre beaucoup plus démocratique », ajoute-t-il.
Le spécialiste en management des organisations culturelles, Allenby Augustin, croit que la culture est l’unique pont par lequel les Haïtiens se rencontrent, puisque l’on parle du seul secteur qui donne autant de rayonnement au pays à l’échelle internationale. « Je crois qu’il n’y a pas mille chemins à prendre, il faut consolider ce que nous avons dans le secteur culturel et d’offrir beaucoup plus d’opportunités de création afin que le pays puisse continuer à rayonner au niveau international », martèle l’initiateur du mouvement artistique et social « Noupran lari a », qui pense que le secteur culturel ne reflète pas l’instabilité du pays.
Au contraire, selon lui, les acteurs culturels puisent leur inspiration de cette incessante instabilité pour produire. « Les nombreux prix internationaux qu’on a raflés durant ces dernières années le prouvent bien », avance M. Augustin, se rappelant de l’Exposition RÈL inspirée de la crise qui sévit dans le pays. En dépit de ce qui se passe dans le pays, notamment avec l’insécurité qui gangrène les rues, les gens sont enthousiastes à découvrir, à travers l’exposition Vivres du Centre d’Art à la Maison Dufort, des œuvres patrimoniales. Ce qui montre leur intérêt pour la culture, à en croire M. Augustin.
L’événement culturel qui aura marqué le plus Allenby Augustin, n’est autre que le mouvement social et culturel « Noupran lari a », qui lui aura permis de découvrir l’immense talent des artistes habitant dans les quartiers avoisinant la ville métropolitaine de Port-au-Prince. « Cette expérience m’a permis de découvrir ce Port-au-Prince que nous n’avons pas l’habitude de fréquenter puisque nous autres dans le secteur culturel nous sommes un peu cloisonnés entre nous. J’ai pu découvrir dans ces quartiers une autre forme d’expression culturelle et artistique qui méritait d’être mise en lumière. Franchement, ce fut une expérience extraordinaire », témoigne le passionné des arts, Allenby Augustin, à qui la rédaction souhaite de plus belles expériences dans ce monde culturel qui le fascine tant.
Statler Luczama