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En Haïti, les écoles continuent d’être victimes d’intimidation, le MENFP prend de nouvelles mesures!

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Le système éducatif haïtien avance avec incertitude. Pas moins de deux lycées de la capitale ont été victimes d’actes d’intimidation en début de semaine. Même si plusieurs citoyens estiment que le système éducatif est faible par rapport à l’ampleur de la crise, le Ministre de l’Éducation Nationale annonce, toutefois, la mise en place d’importantes mesures afin d’accompagner physiquement et psychologiquement les apprenants, en ces jours difficiles. 

Il est inutile de rappeler la gravité de la situation à laquelle fait face le système éducatif haïtien. Les apprenants sont doublement victimes de cette machine d’insécurité qui écrase tout sur son passage. Ces derniers sont autant victimes dans leurs foyers que dans l’espace scolaire. D’ailleurs, dans une note de presse, le  13 mars, le bureau de communication du  Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP) a indiqué que le lycée Marie Jeanne et le lycée des Jeunes Filles ont été victimes d’intimidations et d’attaques dans leurs locaux respectifs. Parallèlement, le Ministère de la Culture et de la Communication a  aussi annoncé le renforcement de la présence policière autour des écoles. Et le 16 mars, le MENFP a informé de la mise en place d’un programme d’assistance psychologique pour les élèves victimes de l’insécurité.

Dans ce communiqué du 13 mars, le MENFP dit  dénoncer et condamner les actes de violence perpétrés à l’encontre du lycée Marie Jeanne et du lycée des Jeunes Filles. Selon le Ministère,  des individus non identifiés, dont certains portaient des uniformes du lycée et d’autres des cagoules ont pénétré dans l’enceinte des institutions à des fins qui demeurent encore inconnues. 

Le MENFP a recensé plusieurs dégâts, dont des barrières et des voitures détruites. Les criminels s’en sont même pris au drapeau national qu’ils ont descendu et ont menacé de fermer ces écoles. Si la police n’était pas intervenue à temps, les dégâts auraient pu être plus graves,  a expliqué le Ministère en charge de la politique gouvernementale en matière d’éducation. Il en a profité pour inviter tous les acteurs de la société et ses partenaires à continuer à défendre le droit pour la vie et à l’éducation tout en contribuant à la protection des écoles nationales. « Le MENFP continue de clamer qu’il n’y a pas d’avenir sans éducation, il n’y a pas de République sans éducation », a-t-il fait savoir.

Alors que la situation sécuritaire a atteint un niveau inimaginable dans la capitale haïtienne et que l’institution policière s’affaiblit à différents niveaux, le Ministère de l’Éducation Nationale en collaboration avec le Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique ont officiellement mis sur pied l’opération de renforcement des périmètres des écoles ce même 13 mars. Selon le Ministère de la Culture et de la Communication, des patrouilles composées d’agents de POLITOUR et de EDUPOL ont foulé les rues et se sont positionnées à des points stratégiques de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Ces entités de la Police Nationale d’Haïti ont organisé quelques visites de soutien dans des écoles  publiques et privées à Port-au-Prince, à Tabarre et à Delmas. 

Toutefois, certains citoyens estiment que, tant qu’il n’y aura pas de sécurité pour tous les citoyens, il sera d’autant plus difficile d’assurer la sécurité aux alentours des écoles ou autres. C’est aussi presque le même avis du cinéaste Richard Sénécal qui a twitté: « M wè lekòl ap mande sekirite pou yo ka travay, doktè ap mande sekirite pou yo pa pran nan kidnaping, komèsan ap mande sekirite pou biznis yo… Kòmsi, nou poko janm konprann p ap gen sekirite pou pèsonn toutotan pa gen sekirite pou tout moun?»

Par ailleurs, d’autres questions tout aussi importantes interpellent le MENFP, comme le traumatisme des apprenants victimes de l’insécurité. Ainsi, le 16 mars dernier, le MENFP a signé un partenariat avec l’Association Haïtienne de psychologie (AHpsy) dans le but de mettre sur pied un accompagnement psychologique gratuit au profit de la communauté éducative. Ce partenariat a pour mission de traiter les traumatismes qui bloquent les apprenants, les troubles d’apprentissage. Il s’inscrit également dans une perspective préventive. 

Entre-temps, l’AHpsy et le MENFP travaillent sur la mise en place d’une plateforme pour la réception d’appels d’élèves, d’enseignants et des parents nécessitant un soutien psychologique. Ce programme vise également à encadrer des directeurs d’écoles et des enseignants par des sessions de formation visant à les aider à avoir un minimum de connaissances de la psychologie pour pouvoir mieux accompagner les enfants dans les moments difficiles et le lancement, au début de chaque année académique, d’un vaste programme de formation continue axé, entre autres, sur la psychologie de l’enfant, la psychologie éducative.

Malgré les efforts du MENFP pour empêcher le système éducatif de couler, beaucoup estiment que l’avenir est menacé. Selon le professeur Herlo Vital, le système éducatif est inadapté à la situation chaotique du pays. « Le problème du système éducatif ne date pas d’aujourd’hui. La crise actuelle ne fait que le confirmer. D’ailleurs, depuis des années, ce système produit et est condamné à produire des citoyens incapables de résoudre les problèmes de la société », estime le professeur de mathématiques. 

« Vu le contexte actuel, la situation a empiré. Les élèves d’aujourd’hui sont totalement démotivés. Réussir à les motiver et à les remettre sur les rails est un exercice important. Les enfants sont quotidiennement stressés et apeurés, parfois en tant que professeur on est obligé de les comprendre et d’organiser des activités pour les détendre avant d’entrer dans les notions du jour. Le résultat de ce système éducatif aujourd’hui est un pays qui meurt sans personne pour le ramener à la vie », s’indigne celui qui a maintenant 15 ans dans l’enseignement.

Il reste encore beaucoup à faire quant à la sauvegarde de cette année scolaire qui s’annonce déjà plus difficile que les précédentes. La situation est insoutenable. Les élèves perdent de plus en plus de jours d’écoles devant l’impuissance des parents, des responsables d’école et du MENFP. Sur Twitter, le titulaire du MENFP, s’est exprimé : « Ce n’est pas une année à sauver, mais une génération qui a perdu au moins une année scolaire en 4 ans, soit 190 jours, plus les traumas: 2019 Peyi Lòk, 70 % d’élèves ont perdu 60 jours; 2020 Covid-19, 97 % d’élèves ont perdu 70 jours; 2022 oct-déc, 90% d’élèves ont perdu 60 jours ». 

Leyla Bath-Schéba Pierre Louis

pleyla78@gmail.com

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