Dans son document intitulé « Note sur la politique monétaire 2ᵉ trimestre de l’exercice fiscal 2024-2025 », la Banque de la République d’Haïti (BRH) a indiqué que l’économie nationale reste sous pression. D’après la BRH, les prêts bancaires ont chuté et quant aux taux de change, il y a une « stabilité relative ». La Banque Centrale a aussi tiré la sonnette d’alarme sur le fait que « 5,7 millions de personnes, vivent une situation d’insécurité alimentaire aiguë, notamment dans la zone métropolitaine et le reste de l’Ouest ».
Pour ce qui est de l’impact des transferts privés sans contrepartie sur le marché des changes, la Banque de la République d’Haïti (BRH) a précisé dans sa note sur la politique monétaire 2ᵉ trimestre de l’exercice fiscale 2024-2025 : « Sur le marché des changes, le dynamisme des transferts privés sans contrepartie, notamment en mars, a permis à la BRH de poursuivre ses opérations nettes à l’achat à hauteur de 91,27 millions de dollars ÉU sur le trimestre. Ces interventions ont non seulement renforcé son coussin de réserves, mais ont aussi contribué à maintenir la stabilité relative du taux de change. Par ailleurs, les souscriptions aux obligations BRH se sont accrues sur le trimestre, portant l’encours à 8 711,36 MG au 31 mars 2025».
À travers ce document, la BRH a aussi évoqué les résultats et indicateurs de performance du secteur bancaire. En effet, l’analyse des données disponibles pour le deuxième trimestre 2025 renvoie à une évolution mitigée des principaux indicateurs du système bancaire, selon la BRH précisant qu’au cours du trimestre sous-étude, le produit net bancaire (PNB) a atteint 9,1 milliards de gourdes, en hausse de 2,6 % par rapport au trimestre précédent. En se basant sur les explications de la BRH, cette performance a été tributaire de la progression concomitante des « Gains sur change » (+11,7 %) et des « Autres revenus » (+46 %).
Par ailleurs, en ce qui concerne l’accroissement des revenus bancaires par rapport au fléchissement des dépenses d’exploitation (-1,7 %), il s’est traduit, à en croire la BRH, par une croissance marquée de 22,3 % du bénéfice net du système (1,97 milliard de gourdes), après une chute de 24,71 % au trimestre dernier.
De plus, « sur la période allant de janvier à mars 2025, le rendement de l’actif (ROA) s’est chiffré à 1,17 % contre 0,98 % au trimestre précédent, alors que le rendement de l’avoir des actionnaires (ROE) a augmenté de 2,03 points de pourcentage, à 13,65 % au 31 mars 2025», a révélé la Banque Centrale, tout en précisant qu’en ce qui a trait à la taille du bilan des banques, établie à 666,8 milliards de gourdes en décembre 2024, elle a accusé une hausse de 1,7 % sur une base trimestrielle, à 678,1 milliards de gourdes à la fin de mars 2025. Pour la BRH, « cette progression résulte notamment de l’évolution des actifs liquides (+5,5 %) avec une croissance à la fois des « Disponibilités » (+3,9 %) et des « Bons BRH » (+ 29,9 %) sur la période ».
Considérant la structure financière du système bancaire, les données analysées pour le deuxième trimestre 2024-2025, indique la BRH, font ressortir une progression contrastée des ratios clés. Cela s’explique par le fait que le ratio « Avoirs des actionnaires en pourcentage de l’actif s’est établi à 8,55 % contre 8,62 % au 31 décembre 2024, alors que le ratio « Dépôts en pourcentage de l’actif » a légèrement augmenté, passant de 81,30 % au 31 décembre à 81,81 % à la fin du trimestre sous revue.
D’après la BRH, la détérioration du climat des affaires, dans ce contexte de crise, a eu des incidences néfastes sur la capacité de remboursement des entreprises débitrices du système bancaire. « Le ratio « Prêts improductifs bruts en pourcentage des prêts bruts » s’est détérioré pour se porter à 13,68 % contre 10,36 % au 31 décembre 2024. De même, le degré de couverture des prêts octroyés par le système bancaire par rapport aux risques de défaut de paiement des débiteurs du secteur s’est inscrit en baisse au cours du trimestre considéré, en atteste le coefficient « Provisions pour créances douteuses en pourcentage des prêts improductifs brut s’est établi à 65,16 % en mars 2025 après 81,53 % en décembre 2024», a fait savoir la BRH, tout en précisant qu’au cours de l’intervalle allant de janvier à mars 2025, les ressources bancaires se sont inscrites en hausse (+1,8 %) pour se porter à 609,2 milliards de gourdes dont un accroissement de 2,3 % des dépôts totaux sur la période.
Répartition des prêts
Suivant les données du Bureau d’Information sur le Crédit (BIC) de la Banque centrale, les établissements financiers ont octroyé 86 609 crédits durant le deuxième trimestre de l’exercice 2024-2025, soit une baisse de 5,2 % par rapport au trimestre précédent, explique la BRH. « En effet, 96,35 % des prêts ont été attribués à des personnes physiques, contre 3,65 % à des personnes morales. […] Les prêts accordés aux entreprises (56 742,36 MG) ont été légèrement inférieurs par rapport à ceux alloués aux particuliers (60 348,07 MG)», a révélé la BRH. Parallèlement, souligne-t-elle, les personnes morales ont capté 85,28 % (821,45 millions de dollars ÉU) du total des crédits consentis en devises américaines entre janvier et mars 2025, tandis que seulement 141,77 millions de dollars ÉU ont été acquis par les personnes physiques.
S’agissant de la répartition des prêts octroyés suivant le genre, la BRH a fait savoir que 64,24 % des crédits libellés en monnaie nationale ont été alloués aux hommes, soit un montant de 38 765,27 MG contre 21 558,63 MG aux femmes. « Il faut rappeler qu’au premier trimestre 2025, les femmes avaient bénéficié de 22 398,023 MG (34,67 % du total des prêts) et les hommes 38 980,57 MG (65,33 % des prêts totaux). Ces derniers ont aussi bénéficié de 76,04 % du portefeuille de crédit en monnaie étrangère, soit 107,80 millions de dollars ÉU», détaille la BRH.
L’insécurité alimentaire
La BRH a jugé nécessaire de tirer la sonnette d’alarme en ce qui a trait à l’impact de l’insécurité sur la crise alimentaire aiguë. « L’augmentation du nombre de personnes déplacées internes a exacerbé la crise alimentaire dans le pays. Selon la dernière analyse du Cadre Intégré de la Classification de la Sécurité Alimentaire (IPC)2, 51 % de la population analysée, soit 5,7 millions de personnes, vivent une situation d’insécurité alimentaire aiguë, notamment dans la zone métropolitaine et le reste de l’Ouest ainsi que dans le département de l’Artibonite. La quantité de personnes en phase d’urgence (Phase 4) est estimée à 2,1 millions (19 % de la population analysée), tandis que 3,6 millions (32 % de la population analysée) d’individus sont en situation de crise », a-t-elle rappelé.
Pour finir, la BRH a fait savoir qu’elle reste attachée à sa mission principale visant à contenir l’évolution des prix et à lisser les fluctuations du taux de change, tout en étant partie prenante des soutiens aux politiques macroéconomiques et structurelles. En outre, elle a souligné « que la Banque centrale continue de moduler sa politique macroprudentielle afin de maintenir la stabilité du système financier, en dépit de l’impact des chocs récurrents qui fragilisent et limitent les retombées des décisions déjà prises par les autorités monétaires ».
Jackson Junior RINVIL
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