2 novembre 2025

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Pensons à nous aussi!

Ce weekend du 1ᵉʳ et du 2 novembre est une période hautement symbolique pour le peuple haïtien, en particulier les vodouisants. Cette fête de la Toussaint coïncide avec la fête des morts chaleureusement vénérée dans le vodou. En effet, les Haïtiens en profitent pour faire mémoire de leurs aïeuls. Le jour où les défunts sont plus proches d’eux.

Dans les « lakou » et les cimetières, l’heure est à la fête. Les lois « baron, guédé, brave, entre autres » s’exhibent en profitant du moment en compagnie des vivants. Les vœux, les plaintes, les rituels, les demandes multiformes sont formulés et exécutés aux loas attendant qu’ils soient exaucés depuis le séjour des morts.

Plus symboliquement, cette fête représente l’unique moment de l’année où les morts sont libres de venir dans le monde physique pour communiquer avec leurs parents. Le moment où elles ne sont plus dans leurs caveaux sous les ordres de baron. De ce fait, nous célébrons la liberté des morts : une sorte, entre parenthèses, de réveil de ces dernières de leur prison mortuaire pour venir se recueillir dans notre monde.

Cette année. Comme ce fut le cas depuis plusieurs années déjà, nous commémorons cette fête dans un contexte particulier. Dans un moment où le pays tout entier est à l’image d’un grand cimetière. Où les citoyens sont comme des morts-vivants. Des « zombies » emprisonnés sous les ordres de nombreux barons, dont les gangs, les politiciens, la communauté internationale, la misère, la faim, etc.

Cette réalité sous-entend que nous ne sommes pas trop différents de ceux que nous essayons de commémorer. De ceux pour qui nous prions. De ceux qui sont joyeux de remonter dans notre monde et de profiter d’une petite liberté et de plaisir. Dans ce grand cimetière qu’est Haïti, nous sommes tous des « guédés », des braves, des fantômes. Nous tous avons besoin de ce petit moment de répit. De pouvoir respirer. De pouvoir faire la fête. Nous avons tous besoin de nous affranchir de notre séjour des morts. D’obtenir les faveurs des barons pour s’émerveiller.

La fête des morts c’est aussi la nôtre. Notre fête pour sortir de notre léthargie. Pour nous réveiller de notre sommeil éternel. Pour contempler notre état et agir. C’est le moment de faire mémoire de nous-mêmes et de comprendre que nous sommes morts depuis longtemps. C’est le moment de prendre conscience de notre état et de comprendre que nous ne sommes pas en train de vivre. Nous avons besoin d’un peu de sel pour nous réveiller. Les vrais « guedés » ne peuvent pas se rebeller mais nous autres, on a encore le temps. Pensons aux morts, pensons à nous.

Danie Sévère 

danielsevere1984@gmail.com

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