L’insécurité pousse de plus en plus de jeunes filles vers les gangs armés, un phénomène que la Ligue Haïtienne de Défense des Droits Humains (LHDDH) qualifie d’intégration croissante et inquiétante. Si certaines rejoignent ces groupes par choix, attirées par des recruteurs spécifiques, beaucoup se retrouvent piégées. Elles sont souvent victimes de manipulation psychologique, voire retenues contre leur gré, et contraintes de rester sous la menace.
D’après la LHDDH, les jeunes filles âgées de 17 à 30 ans sont massivement recrutées et intégrées dans des groupes armés. Leur rôle dépasse désormais les simples tâches de soutien : elles participent activement aux opérations, sécurisent les bases, et parfois même sont directement impliquées dans des actes de violence armée, y compris des homicides de policiers, comme l’avait avoué récemment une jeune dans « Allô Lapolis ».
L’enquête révèle que les gangs emploient des stratégies de recrutement spécifiques aux adolescentes. Des recruteurs opèrent dans les clubs et dans les rues pour les séduire et les attirer vers leurs bases. Une fois enrôlées, ces jeunes subissent un véritable processus de radicalisation et d’endoctrinement. Elles sont non seulement manipulées psychologiquement, mais aussi convaincues qu’elles ne peuvent plus quitter le groupe sous peine d’être ciblées par les forces de l’ordre.
L’organisation a rapporté un cas à Grand-Ravine, où se trouve le groupe gang dirigé par le nommé « Ti Lapli ». La LHDDH y a identifié une structure de femmes armées, surnommée « Team Ascenseur ». Composé de plus d’une vingtaine de jeunes femmes, ce groupe assure la sécurité du chef de gang. Certaines sont postées en hauteur, prêtes à riposter à toute incursion policière. Le nom de ce groupe serait lié à un esprit maléfique que le chef aurait invoqué.
Face à cette dérive, la LHDDH appelle à l’extrême vigilance. Elle recommande aux autorités de renforcer les enquêtes sur les mécanismes de recrutement et de développer des stratégies de prévention ciblées. La structure de défense des droits humains insiste également sur l’importance de mettre en place des dispositifs de désengagement et de réinsertion pour celles qui souhaitent quitter les gangs.
Il faut dire que les gangs de la coalition «Viv Ansanm» continuent de semer la terreur, ciblant les populations les plus vulnérables. Le 11 septembre 2025, un massacre a eu lieu à Labodri, entre Cabaret et Arcahaie. Cette attaque aurait été une riposte à la mort d’un chef de gang, tué le 7 septembre lors de combats avec la police et des groupes d’autodéfense.
Selon le bilan provisoire rapporté par Baptiste Joseph Louis, le président du Conseil d’Administration des Sections Communales (CASEC) de Boucassin (commune de Cabaret), 42 corps ont été retrouvés, dont plusieurs enfants. Plusieurs personnes ont été blessées et plusieurs autres sont portées disparues. Des maisons ont été incendiées, et les survivants tentent de fuir la zone, mais les agresseurs sont toujours présents.
Le quartier de Turgeau a également été le théâtre d’un drame tragique dans la nuit du 9 au 10 septembre. Trois frères — Patrick Lalane (42 ans), Josué Lalane (38 ans) et Widechel Lalane (28 ans) — ont été assassinés, puis leurs corps ont été brûlés par des membres du même gang. Le quartier est sous le contrôle de ce gang depuis mars 2025.
L’insécurité, alimentée par ces gangs, crée un climat de peur constant. Cette violence bien organisée n’épargne personne, qu’il s’agisse de familles entières, d’enfants ou de jeunes hommes. Elle détruit les vies, les foyers et la paix des communautés. Face à cette terreur quotidienne, la population se retrouve dans un état de vulnérabilité extrême, sans autre option que la fuite pour survivre.
Marie-Alla Clerville