Haïti : un nouveau bourgeon d’espoir
3 min readLe grand espoir charrié par le renversement de la dictature des Duvalier le 7 février 1986 a abouti à un véritable cauchemar 25 ans après.
Ces cinq dernières années, le nombre de personnes (hommes, femmes, enfants) de tous âges et de toutes conditions- avocats, enseignants , policiers, simples citoyens etc. Assassinées, kidnappées, rançonnées, de femmes violées,- dépasse l’imagination pour un pays en paix.
L’insécurité a frappé jusqu’à la chambre à coucher du Président Jovenel Moïse assassiné le 7 juillet 2021. Depuis plusieurs mois, la capitale (département de l’Ouest) est assiégée. Ces deux principales entrées sont contrôlées par des gangs armés agissant en toute impunité. Communiquer avec la périphérie et les 9 autres départements est devenu une aventure extrêmement périlleuse.
Plusieurs millions d’Haïtiens sont plongés dans la famine. Par milliers, des jeunes laminés par le désespoir essaient de fuir le pays mais hélas, pour beaucoup d’entre eux, les déceptions sont cruelles.
Des hôpitaux sont forcés de fermer leurs portes alors que nous sommes en pleine pandémie de Covid 19 .Des écoles surtout à Port-au-Prince et dans les environs fonctionnent au ralenti. Le stress et la peur rongent et paralysent la majorité de la population.
Le défunt Président avait promis l’électricité 24 sur 24. Hélas, la durée de son mandat a été plutôt une très longue nuit. Dans de telles conditions aucun investissement n’a été possible, aucun touriste n’a pu visiter le pays. Même les compatriotes de la diaspora ont dû se résigner à ne pas rendre visite à leurs proches ni accomplir certains devoirs culturels. Huit mois après le drame du 7 juillet, la situation s’est empirée.
De plus la monnaie nationale s’est totalement dépréciée par rapport au dollar américain et aux autres monnaies fortes. La grande dépendance du pays des importations de presque tous les biens accompagnée d’une inflation incontrôlable rend le quotidien infernal. Les Haïtiens dépendent plus que jamais des transferts de la diaspora et de l’aide internationale.
C’est au milieu d’un tel désastre qu’une équipe de femmes et d’hommes issus de milieux politiques, de la société civile, des différents groupes religieux, des syndicats, des paysans, des universités, de la Presse, des Organisations de Droits humains etc. s’est mise au travail particulièrement depuis janvier 2021 pour aboutir à un accord le 30 août 2021 dit accord Montana, nom de l’Hôtel où il est signé.
Ces femmes et ces hommes de l’accord Montana ont travaillé dur dans les conditions pénibles que l’on connait pour remettre le pays sur les rails d’une véritable démocratie où le peuple haïtien pourra décider librement de son destin, loin des diktats internationaux qui nous ont plongés dans la catastrophe actuelle.
Leur combat est un appel urgent à un véritable konbit national pour retrouver notre dignité et reprendre notre marche vers la justice et le bonheur.
Les élections réalisées le dimanche 30 janvier 2022 dans le cadre des accords Montana-PEN constituent certes un pas important pour nous remettre debout et soutenir le programme contenu dans leur feuille de route : sécurité, conférence nationale souveraine, alimentation, énergie, éducation, élections générales.
Celles et ceux qui ont conduit à cette étape méritent la reconnaissance du pays. À ce carrefour de la vie nationale, le peuple haïtien doit continuer sa lutte avec foi, courage et enthousiasme pour que la transition aboutisse cette fois à établir un régime stable et respecté de tous.
Le 1er février 2022
Damien François
Historien,