« 3,7 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë »,selon la CNSA
3 min readLes conséquences des troubles sociopolitiques qui ont paralysé les activités économiques du pays sont très néfastes pour la population. Les conditions de sécurité alimentaire déjà précaires se sont aggravées. Le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (Integrated Phase Classification, en anglais), qui travaille de concert avec la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (CNSA), révèle dans son dernier rapport qu’une bonne partie de la population en situation d’insécurité alimentaire .
Au point où nous en sommes, l’importation de marchandises, y compris de denrées
alimentaires, est difficile et la plupart des échanges commerciaux à
l’intérieur du pays sont sérieusement entravés. Les prix des denrées
alimentaires montent en flèche, affectant lourdement les ménages les plus
vulnérables. Cette nouvelle enquête de l’IPC sur la sécurité alimentaire,
conduite en octobre 2019 au niveau national, pour la période courante allant
d’octobre 2019 à février 2020, montre un niveau croissant de vulnérabilité des
ménages les plus pauvres, tant dans les zones rurales qu’urbaines. L’IPC estime
à 3,7 millions le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire
aiguë, soit une forte augmentation par rapport aux 2,6 millions estimés à la
fin de 2018, peut-on lire dans ce rapport dont fait écho la Coordination
nationale de la sécurité alimentaire (CNSA).
Selon l’analyse de l’IPC, une bonne partie de la population tant en milieu rural qu’en milieu urbain sont en situation de phase urgente. 10 % de la population analysée (1 046 000 personnes) est en IPC Phase d’urgence et 25% (2,627,000 personnes) est en phase de crise, représentant approximativement 35 % de la population analysée, soit 3,67 millions d’habitants. Compte tenu de la situation socio-économique désastreuse et de l’absence de plans immédiats pour y remédier, ces chiffres devraient encore augmenter en 2020 pour grimper à 4,1 millions de personnes en besoin d’une action urgente. Parmi les causes identifiées dans ce rapport de l’IPC, on peut citer : « La hausse des prix des denrées de base (inflation annuelle d’environ 22.6 %); la dépréciation de la gourde par rapport au dollar d’environ 24 % en glissement annuel (octobre 2018-2019); les troubles socio-politiques et la dégradation des conditions de sécurité, qui ont largement réduit l’accès à la nourriture des ménages les plus pauvres. »
Parmi les zones analysées, deux se trouvent en situation d’urgence : le bas Nord-Ouest en milieu rural et les quartiers très pauvres de Cité Soleil en milieu urbain. À l’exception de certains quartiers moyens et mieux lotis de l’aire métropolitaine qui sont classifiés en situation de stress, le reste des zones analysées est classifié en situation de crise. La zone présentant le plus fort pourcentage de personnes en situation de crise alimentaire d’urgence est celle des quartiers les plus pauvres de Cité Soleil et des quartiers très pauvres de Croix-des-Bouquets qui sont dans le besoin d’une action urgente. Dans les départements classés en situation de crise, l’Artibonite, les Nippes ainsi que la Grand’Anse sont ceux qui comptent le plus fort pourcentage de personnes nécessitant une assistance immédiate.
En ce qui concerne l’analyse antérieure conduite en octobre 2018, l’analyse actuelle (octobre 2019) montre que la situation continue de s’aggraver. Le bas Nord-Ouest, qui se trouve déjà dans une situation d’insécurité alimentaire chronique sévère, est ainsi passé d’une situation de stress à une situation d’urgence. Cette tendance est principalement liée à une détérioration considérable de la consommation et de la diversité alimentaires. Les zones rizicoles de l’Artibonite et du Sud ont également évolué d’une phase de stress vers une phase de crise. Dans le milieu rural, le pourcentage de personnes en situation de crise alimentaire est passé de 33 % à 38 % en situation actuelle.
Ricardo Lambert
Le Nouvelliste