Entre promesses, tentatives de discréditation des manifestations, les protestataires résistent
4 min readAprès deux semaines, les mouvements de protestation contre la vie chère, la levée des subventions sur le carburant, entre autres, se poursuivent dans plusieurs villes du pays. Malgré une reprise timide de certaines activités dans la capitale en fin de semaine et les promesses au niveau international, dans de nombreuses villes de province, la situation reste toujours très tendue.
Les mouvements de protestations contre, entre autres, l’augmentation des prix des produits pétroliers, n’ont pas cessé de prendre de l’ampleur. Gagnant toutes les grandes villes du pays, les forces de l’ordre semblent être dépassées par les événements. En effet, lors des manifestations ayant eu lieu le 23 septembre dans la ville des Cayes, un mort, 15 blessés ont été enregistrés sans oublier l’incendie d’un Tribunal de Paix et du bureau de la Protection Civile. La veille, trois personnes ont été abattues par les forces de l’ordre au cours d’affrontements armés à Delmas.
Par ailleurs, le blocage de la voie donnant l’accès au plus grand terminal pétrolier du pays (Terminal Varreux), se trouvant à Cité Soleil, par les gangs armés a des conséquences sur tout le pays. Les institutions n’en sont pas exemptées. Une note de l’Hôpital La Providence des Gonaïves a annoncé la fermeture des services d’urgence de l’institution pour pénurie de carburant à compter du vendredi 23 septembre. La compagnie S&H Global S.A., au Parc Industriel de Caracol dans le Nord-est, a dû elle aussi suspendre ses activités. « Aussi, face à ces cas de force majeure indépendants de notre volonté, sommes-nous obligés nous aussi de suspendre toutes nos opérations les 22, 23, 24, et 25 septembre prochain », a-t-elle précisé par le biais d’une lettre adressée à ses partenaires et aux syndicats le 21 septembre.
Des institutions internationales touchées par des actes de pillage
Les scènes de pillage et les émeutes sont, malheureusement, monnaie courante pendant ces mouvements de protestation. Aux Cayes et aux Gonaïves, des dépôts du PAM ont été attaqués et pillés. Plus de 2 000 tonnes métriques de nourriture ont été emportées. Pour la coordinatrice humanitaire de l’ONU en Haïti, Ulrika Richardson, la situation est difficile en Haïti, et il est de plus en plus important de créer un accès sûr pour les travailleurs humanitaires et les fournitures. « Ce que nous voyons est le résultat de la frustration et du désespoir des gens face à des conditions de vie très difficiles. Piller les entrepôts n’est pas la solution ; ceci ne fait que rendre plus difficiles une réponse et une assistance efficaces aux familles dans le besoin. La situation actuelle appelle des efforts supplémentaires de la part de la communauté humanitaire. Pour que cela se produise, nous avons besoin d’un accès sûr pour les travailleurs humanitaires et les fournitures », a-t-elle déclaré.
Pour le Premier Ministre Ariel Henry, de même que pour le Secrétaire Général de l’ONU, ce sont des chefs de gangs qui mènent les mouvements de protestation, et cet avis semble être aussi celui de Washington. À l’occasion de la 77e Assemblée Générale des Nations Unies, Brian A. Nichols, Secrétaire d’État adjoint aux Affaires de l’hémisphère occidental pour le Gouvernement fédéral des États-Unis d’Amérique, a annoncé des sanctions contre les chefs de gangs en Haïti. « La Résolution créera un cadre des Nations Unies pour imposer des sanctions aux chefs de gangs et à ceux qui soutiennent, facilitent et financent leurs activités. Ces sanctions viseraient leurs ressources financières et leur capacité à voyager », a-t-il indiqué.
D’un autre côté, l’ambassadrice des États-Unis auprès des Nations Unies, Linda Thomas-Greenfield, a annoncé que son pays contribuerait financièrement au Fonds commun des Nations Unies pour Haïti. « Nous avons la responsabilité de soutenir Haïti et ses citoyens. Et aujourd’hui, j’ai eu le plaisir d’annoncer que les États-Unis fourniront 3 millions de dollars au Fonds commun des Nations Unies pour Haïti. Cette contribution s’ajoute à notre aide directe à Haïti de 48 millions de dollars au cours de la dernière année seulement ».
Tandis que les discours et les levées de fonds se multiplient, la situation continue de s’aggraver dans le pays. Le 22 septembre, suite à une attaque armée, une grande évasion a eu lieu à la Prison Civile des Femmes de Cabaret à l’entrée nord de la capitale. Au moment de la rédaction de cet article, aucun bilan officiel sur le nombre des évadées et des victimes n’a été encore communiqué. Ces événements sont survenus quelques minutes après qu’un poste de contrôle de la PNH se trouvant à Titanyen ait été attaqué et incendié par des individus armés, causant aussi la mort d’un policier en service.
Clovesky André-Gérald PIERRE
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