Progression de l’inflation lors du 1er semestre de l’exercice fiscal 2023-2024, la BRH explique
6 min readL’économie du pays continue dans sa peine à être florissante. La Banque de la République d’Haïti (BRH) à travers une Note sur la politique monétaire prenant en compte le 1er semestre de l’exercice fiscal octobre 2023 et mars 2024 a révélé que le taux d’inflation moyen mensuel entre octobre 2023 et mars 2024 s’est établi à 2,7 %, contre 2,1 % pour la même période de 2022-2023.
L’économie haïtienne continue d’être entravée par l’augmentation de la violence et l’instabilité politique. Et cela « paralyse le bon fonctionnement du système productif dans la quasi-totalité des secteurs. En dépit des résultats encourageants observés au mois de décembre, à la faveur des festivités de fin d’année principalement, le premier semestre a été marqué par une évolution contrastée des activités économiques », a souligné la BRH.
En ce qui a trait à l’évolution des prix dans l’économie haïtienne, la BRH a fait savoir que la décélération observée depuis mars 2023 s’est arrêtée au mois de février 2024 avec une hausse de 3,1% et une accentuation au mois de mars avec un taux de 4,7%. À en croire la Banque Centrale, en glissement annuel, l’IPC a crû de 26,7 % en mars 2024 (+3,7 points de pourcentage). « Le taux d’inflation moyen mensuel entre octobre 2023 et mars 2024 s’est établi à 2,7 %, contre 2,1 % pour la même période de 2022-2023 », selon la BRH dans sa Note sur la politique monétaire durant le 1er semestre d’octobre 2023 à mars 2024.
Selon la BRH, cette progression de l’inflation, en dépit de la stabilité du taux de change, peut être liée aux difficultés enregistrées au niveau des importations, à la suite de la suspension des vols, à la paralysie des activités maritimes et aux goulots d’étranglements constatés dans le circuit d’approvisionnement du marché.
Coup d’œil sur le marché du travail
En ce qui concerne le marché du travail, il reste en proie à la morosité de l’activité économique et au mouvement migratoire, explique la Banque Centrale. « Le déclin du climat des affaires et la baisse de la production dans les différentes branches d’activités pourvoyeuses d’emplois ont non seulement entraîné un accroissement des déperditions, mais aussi réduit la capacité de l’économie à créer de nouveaux emplois à la suite de la fermeture ou de l’arrêt temporaire de certaines entreprises », a-t-elle ajouté en précisant à titre d’exemple que le nombre du personnel de l’industrie textile s’est replié de plus de 45 % de septembre 2023 à mars 2024 (à 29 000 employés). D’après la BRH, on constate le même scénario dans le secteur bancaire qui, après avoir perdu plus de 10 % de ses employés sur l’exercice 2023, rencontre des difficultés à embaucher du personnel qualifié.
Le cas du secteur agricole !
Quant au secteur agricole, les conditions météorologiques adverses sur le premier semestre se sont traduites par une production de denrées alimentaires inférieure à la moyenne quinquennale, explique la Banque Centrale soulignant que le déficit d’offre alimentaire, qui en a résulté, survient dans un contexte où les exploitants agricoles font face à des difficultés économiques. « Ceci s’est reflété dans la diminution des superficies cultivables vu le renchérissement des intrants agricoles. Le dysfonctionnement des principaux ports et aéroports du pays, entre février et mars 2024, a perturbé l’approvisionnement des marchés publics», peut-on lire dans la Note de la BRH.
Il en est résulté un renchérissement des prix des produits de base qui, renforcé par la décapitalisation des ménages vulnérables, a contribué à l’augmentation du nombre de personnes en insécurité alimentaire, ce que relatent les dernières analyses de la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA), a rappelé la Banque Centrale. « Établie pour la période de mars à juin 2024, la plus récente analyse du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) publiée par la CNSA indique que 17 % de la population étudiée sont classés en phase 4 de l’IPC (urgence), tandis que 33 % se situent en phase 3 (crise). Conséquemment, la moitié de la population (50%) analysée est confrontée à une insécurité alimentaire aiguë pour la période de projection, contre 44 % selon les précédentes prévisions », ajoute la Banque Centrale.
Finances publiques et secteur externe
Les bons résultats obtenus au niveau des finances publiques au cours des deux trimestres précédents se sont poursuivis durant les six premiers mois de l’exercice fiscal 2023-2024, a indiqué la BRH précisant que les efforts déployés par les organismes de perception ont permis une amélioration de la position globale nette du gouvernement bien que leurs impacts aient été atténués par la paralysie des activités au cours de la période allant de février à mars 2024.
De plus, la Banque de la République d’Haïti a fait savoir que les données disponibles au premier semestre 2023-2024 indiquent la poursuite des retombées positives des mesures administratives prises antérieurement par l’État haïtien, en particulier au niveau de la Direction Générale des Douanes, afin de mobiliser des ressources fiscales. « Établis à 83 701,70 MG, les taxes et impôts collectés par le Trésor Public ont été impulsés principalement par la hausse de 14,21 % des recettes douanières car les recettes internes sont en baisse de 6,70 % (52 229.1 MG au 31 mars 2024 contre 55 975.0 MG au 31 mars 2023)», a-t-elle expliqué.
Cependant, « une tendance inverse a caractérisé les dépenses publiques qui ont fléchi de 13,69 % sur une base semestrielle (76 451,02 MG), alors que les décaissements totaux se sont chiffrés à 152 566,28 MG. Conséquemment, après compensation des opérations de financement, le solde des opérations budgétaires et de trésorerie de l’État a accusé une capacité de financement de 7 361,16 MG au 31 mars 2024 », selon la BRH. Toutefois, souligne-t-elle, le niveau des dépenses publiques, en dépit de leur décélération, demeure supérieur à celui des recettes fiscales.
Décision politique monétaire au premier semestre 2024
Au cours de la période sous étude, la BRH informe qu’elle a maintenu l’orientation imprimée à la politique monétaire visant à lisser les fluctuations du taux de change et à contenir le rythme de progression des prix à la consommation sans resserrer outre mesure les conditions monétaires dans un contexte de récession. Ainsi, « elle a poursuivi sa politique de régulation de la liquidité excédentaire à travers les bons BRH et les interventions sur le marché des changes tout en gardant le statu quo au niveau des taux directeurs et des coefficients de réserves obligatoires ». Elle apporte ces précisions tout en mentionnant par ailleurs à titre parallèle qu’elle a poursuivi sa politique de régulation de la liquidité excédentaire à travers les bons BRH et les interventions sur le marché des changes tout en gardant le statu quo au niveau des taux directeurs et des coefficients de réserves obligatoires.
Quelles perspectives pour les mois à venir ?
À en croire la BRH, les perspectives économiques pour les prochains mois demeurent incertaines dans la mesure où la situation sécuritaire est déterminante dans la formation des anticipations des agents économiques. « La forte dégradation observée depuis le mois de février 2024 en plus des conditions climatiques et les tensions géopolitiques au niveau de l’économie internationale risquent de fragiliser encore plus l’économie haïtienne. « Au niveau de la production agricole, la Coordination Nationale pour la Sécurité Alimentaire (CNSA) anticipe de bonnes conditions météorologiques à court terme, ce qui devrait être bénéfique pour la récolte de printemps », a fait remarquer la BRH. « Une amélioration de la situation sécuritaire devrait faciliter une certaine reprise des activités de production des biens et services au niveau des entreprises qui n’ont pas subi des dommages importants. Une telle conjoncture serait propice à une plus grande perception du Trésor », a-t-il ajouté dans la Note.
Jackson Junior RINVIL