Une rentrée scolaire timide dans le Grand Sud
3 min readLe lundi 4 octobre 2021, le Ministère de l’Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle (MENFP) a ouvert officiellement l’année scolaire dans le Grand Sud, tout en reconnaissant que toutes les conditions ne sont pas réunies et que le courage et la détermination seront nécessaires pour la réussite de cette nouvelle année scolaire.
« Gran Sid ap kanpe ankò, paske moun gran Sid gen volonte pou travay », c’est en ces termes que la Ministre de l’Éducation, Madame Marie Lucie Joseph, s’est adressée à la communauté en introduisant cette nouvelle année académique, en ajoutant que cette rentrée sera progressive. En effet, tandis qu’est lancée officiellement cette année 2021-2022, beaucoup d’écoles peinent à reprendre leurs activités, faute de pouvoir entreprendre des travaux.
« Certaines écoles n’ont pas eu de problèmes pour fonctionner normalement, précisément celles qui n’ont pas été sérieusement frappées par le séisme », témoigne Jephtanie, qui a vécu le séisme à Saint-Louis du Sud. Selon elle, plusieurs autres écoles n’ont pas eu cette chance : « Certaines ont besoin d’être réparées, d’autres n’ont pas assez d’équipements pour recevoir les enfants ».
Selon la Ministre, il est nécessaire de reconstruire les écoles détruites dans la région, tâche qui demande du dynamisme et de la détermination, vu l’importance des chantiers et l’urgence qui les caractérise. Toutefois, ce n’est pas la seule tâche qu’il incombe de réaliser, l’aspect mental aussi est à considérer. « Il faut de la volonté, une volonté des plus assurées, pour débarrasser élèves et enseignants du choc psychologique de ce tremblement de terre », a affirmé la Ministre sur ce même point.
Pourtant, si cette dernière reconnaît qu’il y a l’aspect psychologique à considérer, que les pertes matérielles et en vie humaines peuvent laisser des traumatismes et des blessures difficiles à soigner, l’année scolaire est lancée sur la promesse d’un programme d’accompagnement psychosocial pour ceux qui en auront besoin. Néanmoins, la seule promesse de cette structure ne suffira pas à mettre les élèves et le corps professoral dans de meilleures dispositions psychologiques.
En effet, le mental ayant une place non-négligeable dans l’apprentissage, à se référer aux propos de la psychologue et officière de sauvegarde d’enfants, les écoles de la côte sud, sans prise en charge psychologique, peuvent déjà s’attendre à des décrochages scolaires, à des moments d’école buissonnière, à des accès de sommeil en plein cours, à la perte d’attention de bon nombre de des apprenants. On se demande toutefois si le personnel saura reconnaître de tels comportements comme des signaux de détresse, et ne sera pas tenté d’y voir une véritable hostilité de la part des jeunes qui pourraient présenter de tels comportements.
Au milieu de toutes ces incertitudes, Jephtanie souligne quelque chose qu’elle estime positif : « Je sais que certains enfants ayant perdu des proches ont reçu un accompagnement pour leur scolarité », déclare-t-elle. Elle mentionne toutefois que, dans sa communauté, cet accompagnement ne vient pas de l’État, mais d’organisations non-gouvernementales. Pendant ce temps, la Ministre Sophia Loréus, qui représentait aussi le Premier Ministre Ariel Henry dans le département du Sud, affirme être sûre que, si cette rentrée est difficile, la récolte sera belle. Il n’y a plus qu’à espérer qu’elle a vu juste.
Ketsia Sara DESPEIGNES