Une économie haïtienne en récession : Jean Baden Dubois témoigne
4 min readDans un texte présenté lors du mercredi de la réflexion de la Banque Interaméricaine de Développement (BID), le Gouverneur de la Banque Centrale, Jean Baden Dubois, exprime son inquiétude quant à la tournure que prend la politique monétaire du pays.
Il n’y a pas lieu d’être expert pour éprouver des inquiétudes face à la situation économique du pays. En effet, un regard sur le taux d’inflation suffi à se faire une idée. D’autant plus que le contexte sociopolitique actuel ne vient pas arranger les choses. Aussi, quand c’est le Gouverneur de la Banque de la République d’Haïti qui se prononce, il y a lieu de prêter attention à ses propos. En effet, Jean Baden Dubois a présenté un bilan assez alarmant de la situation budgétaire du pays de ces cinq dernières années, tout en partageant les perspectives pour le budget 2021-2022.
Selon le Gouverneur Dubois, le climat des affaires marqué par les chocs des cinq dernières années, a grandement contribué à nous éloigner de notre potentiel de croissance. Pire, les différentes catastrophes naturelles subies par Haïti ont occasionné des pertes importantes en termes de Produit Intérieur Brut (PIB) puisque la vulnérabilité du pays s’est accrue. Les retombées de la pandémie de la Covid-19 s’ajoutant en plus à cette liste, la situation économique ne s’en est pas trouvée mieux.
Selon les mots de Jean Baden Dubois, les changements intervenus dans le contexte macroéconomique international en 2021, n’ont pas foncièrement concerné Haïti. En effet, le pays ne semble pas avoir bénéficié de cette bouffée d’oxygène qu’a connue l’économie mondiale suite à l’année 2020. « Une fois de plus, la projection de croissance est bien en-deçà de celle attendue au niveau du budget initial pour l’exercice », écrit-il.
Il s’est avéré que la remontée des cas de Covid-19, les dépenses liées à la vaccination de la population haïtienne qui, jusqu’à présent, n’a pas cessé de manifester de la méfiance face à ce vaccin, tous ces facteurs ont « porté les dépenses de l’État à s’approcher des 100 % de leurs niveaux de réalisation dès le début du quatrième trimestre », selon le bilan.
Encore plus d’incertitudes…
Tandis qu’il reste encore à l’État haïtien de faire face aux dépenses liées à la Covid-19 et aux catastrophes naturelles, l’exercice fiscal de cette nouvelle année ne s’annonce pas plus aisé. En effet, si les indicateurs macroéconomiques ont fait état d’une économie en récession, étalée sur les trois dernières années, beaucoup de paramètres donnent l’impression que la situation ne sera pas très différente pour ce nouvel exercice fiscal.
Si l’on en croit le panorama dressé par Jean Baden Dubois sur l’exercice 2020-2021, l’exercice fiscal 2021-2022 est lui aussi rempli d’incertitudes. Un avis que partage Romel Bito Fenelus, un étudiant finissant en Sciences économiques de l’Université Notre-Dame d’Haïti (UNDH).Celui-ci ne cache pas son inquiétude face aux retombées que la situation politique du pays pourrait avoir sur l’économie du pays : « Un gouvernement de facto est moins capable d’influencer les indicateurs macroéconomiques du pays puisqu’il manque de légitimité pouvant lui permettre de fonctionner normalement ».
Romel Bito Fenelus pointe aussi le climat d’insécurité grandissante du doigt. Selon lui, il n’y a aucune action concrète prouvant la volonté de nos autorités de mettre fin à cette situation. « Pourtant, si nous ne mettons pas un frein à cette insécurité qui plane sur le pays, pour qu’il y ait un climat de stabilité, propice aux investissements nationaux et internationaux, l’exercice fiscal 2021-2022 n’apportera aucun espoir d’amélioration ». En effet, le climat d’insécurité ne cesse d’inquiéter, surtout avec les cas de kidnapping qui ne cessent de multiplier.
Il cite en plus la montée récente des prix des produits pétroliers sur le marché international, surtout en sachant que les financements de la BRH sont en grande partie liées au paiement des produits pétroliers et qu’une hausse subite du prix du pétrole sur le marché international aura des incidences sur les subventions de l’État. À cette liste, s’ajoutent encore les incertitudes qui planent autour des possibles élections de 2022. « La Banque Centrale prend des mesures qui sont, à court terme, plus ou moins efficaces, mais l’État doit prendre lui aussi ses responsabilités », affirme-t-il.
Ketsia Sara Despeignes