11 septembre 2025

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Cap-Haïtien plongé dans l’obscurité : la crise électrique ses multiples impacts depuis la mort de Jovenel Moïse

Depuis le tragique assassinat de l’ancien Président Jovenel Moïse en juillet 2021, le Cap-Haïtien fait face à une crise électrique persistante qui semble ne pas avoir de fin à court terme. Les habitants, déjà confrontés à des difficultés sociales et économiques, vivent désormais dans l’incertitude quant à la disponibilité du courant électrique. Cette situation a des répercussions directes sur la vie quotidienne, l’éducation, la sécurité et l’économie locale, affectant profondément la qualité de vie dans la ville.

Cap-Haïtien, une ville plongée dans le noir. Dans de nombreux quartiers, les coupures d’électricité sont devenues quasi permanentes. Des familles entières passent plusieurs jours sans lumière, et parfois même sans possibilité de cuisiner ou de conserver des denrées alimentaires. Madame Roseline, commerçante dans le centre-ville, témoigne : « Nous sommes obligés de vivre comme au siècle dernier. Les enfants ne peuvent pas faire leurs devoirs le soir, et nous, adultes, avons du mal à travailler ou même à cuisiner. Les lampes à pétrole et les bougies sont devenues nos seules sources de lumière, mais elles sont limitées et dangereuses ».

Certains habitants ont investi dans des générateurs électriques pour faire face à la situation, mais le coût élevé du carburant et l’entretien régulier de ces appareils en limitent l’usage, surtout pour les familles à faible revenu. M. Jean-Pierre, résidant du quartier Milot, explique : « Nous devons rationner le courant. Même avec un générateur, on ne peut pas tout alimenter en même temps. C’est épuisant et stressant.

L’éducation compromise : quand les enfants ne peuvent plus étudier

L’une des conséquences les plus graves de cette crise concerne l’éducation. Les écoles, qui reprennent généralement les cours le soir pour certains établissements, se voient contraintes de modifier leurs horaires ou de suspendre certaines classes. Les enseignants et les élèves sont confrontés à un dilemme : comment poursuivre l’apprentissage lorsque les salles sont plongées dans le noir ou lorsqu’il est dangereux de rester dehors après la tombée de la nuit ?

M. Jean-Claude, directeur d’une école primaire de Montagne-Noire, raconte : « Nous avons dû réduire nos horaires et concentrer les cours pendant les heures de lumière naturelle. Mais ce n’est pas suffisant. Les élèves ne peuvent pas faire leurs devoirs correctement et certains abandonnent déjà. Les parents sont inquiets et beaucoup envisagent de chercher des écoles dans des zones mieux éclairées, ce qui n’est pas toujours possible ». Mme Mireille, mère de deux enfants scolarisés, explique les conséquences psychologiques : « Les enfants sont frustrés et anxieux. Ils ne comprennent pas pourquoi ils ne peuvent pas apprendre comme avant. Le stress est constant dans nos foyers».

Sécurité et insécurité : l’obscurité favorise la criminalité

L’absence de courant a également un impact direct sur la sécurité. Les rues non éclairées deviennent des zones à risque, propices aux vols et aux agressions. La peur est palpable chez les habitants qui redoutent de sortir le soir. M. Philippe, résidant du quartier Milot, confie : « Avant, on pouvait se promener librement après le coucher du soleil. Maintenant, c’est impossible sans courir un risque. Des groupes criminels profitent de l’obscurité pour attaquer les maisons et commerces ».

Selon des rapports de la police municipale, les incidents liés à l’insécurité ont augmenté depuis les premières coupures prolongées de courant. Les patrouilles sont limitées par l’absence de lumière et de nombreux dispositifs de surveillance, tels que les caméras de sécurité, ne fonctionnent plus. « Nous faisons de notre mieux, mais sans électricité, nos moyens sont très limités », admet un officier de police requérant l’anonymat.

Économie locale paralysée

La crise électrique impacte également l’économie locale. Les commerces, restaurants, ateliers et petites entreprises dépendent en grande partie de l’électricité pour fonctionner. Les pertes financières sont importantes, en particulier pour ceux qui ne peuvent pas investir dans des générateurs coûteux ou d’autres solutions alternatives.


Madame Solange, propriétaire d’une boutique alimentaire, explique : « Chaque semaine, nous devons jeter des produits périssables, car ils ne peuvent pas être conservés correctement. Nos clients viennent moins souvent, sachant que nous risquons de fermer à tout moment ».

Les artisans et professionnels de services, tels que les coiffeurs ou les imprimeurs, subissent également des pertes. M. Gérard, propriétaire d’un petit salon de coiffure, déplore : « Sans lumière, je ne peux pas travailler correctement. Mes clients partent frustrés et certains ne reviennent plus. C’est une catastrophe pour nous tous ».

Impacts sur la santé et le bien-être

Les conséquences de la crise ne se limitent pas aux aspects matériels. Le manque de lumière affecte le bien-être physique et psychologique des habitants. Les médecins locaux rapportent une augmentation du stress, de l’anxiété et des troubles du sommeil chez les populations vivant dans des quartiers plongés dans l’obscurité.

Dr. François, médecin généraliste, explique : « Le stress chronique et l’anxiété sont en forte augmentation. Les habitants vivent dans une peur constante de la criminalité et de l’incertitude. Les enfants sont particulièrement touchés : leur concentration et leur développement scolaire sont affectés ».

Les hôpitaux et les cliniques locales font face à leurs propres défis. L’absence de courant affecte négativement le fonctionnement des appareils médicaux essentiels, comme les incubateurs, les lampes d’examen ou les systèmes de stérilisation. Selon Dr. Jean-Marc, chef de service à l’hôpital Justinien : « Nous devons planifier nos interventions chirurgicales en fonction de la disponibilité du courant ou utiliser des générateurs, ce qui n’est pas toujours fiable. La situation est critique pour les patients ».

Les causes et les solutions possibles

Selon certains experts, cette crise électrique n’est pas surprenante dans le contexte haïtien. La fragilité de l’infrastructure électrique, le manque d’entretien, l’insuffisance des investissements et l’instabilité politique contribuent à des situations comme celle-ci.

Henri Delva, spécialiste en énergie et développement durable, souligne : « La crise à Cap-Haïtien est symptomatique d’un problème structurel. Les installations sont anciennes, mal entretenues, et il n’existe pas de planification à long terme. Il faut investir dans des solutions modernes comme les panneaux solaires communautaires, la réhabilitation des centrales et des réseaux de distribution pour fournir une électricité stable et fiable ».

Les autorités locales reconnaissent le problème, mais restent limitées par des contraintes financières et organisationnelles. Les citoyens, eux, réclament une solution urgente pour restaurer l’électricité dans leurs foyers, écoles et lieux de travail.

Conclusion : un appel à la lumière et à l’action

La crise électrique à Cap-Haïtien dépasse le simple inconfort matériel. Elle affecte profondément l’éducation, la sécurité, l’économie et la santé mentale de la population. La situation met en lumière les vulnérabilités structurelles de la ville et l’urgence d’une action concertée des autorités locales, nationales et des partenaires internationaux.

Cap-Haïtien mérite de retrouver la lumière, non seulement pour éclairer les rues et les foyers, mais aussi pour garantir un environnement sûr et propice au développement des habitants. Chaque citoyen mérite de vivre dans une ville où l’électricité n’est pas un luxe, mais un droit fondamental permettant l’éducation, la sécurité et le bien-être.

Olry Dubois

olrydubois@gmail.com

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