Délocalisation du palais de justice de Port-au-Prince : signe de faiblesse de l’État haïtien?
3 min readPresqu’aucun secteur n’est épargné par le fléau de l’insécurité qui gagne de plus en plus de terrain dans la capitale haïtienne. Pour raison sécuritaire, le barreau de Port-au-Prince a voté en faveur d’une résolution pour la délocalisation du palais de justice de Port-au-Prince. Ne serait-ce pas une un acte d’impuissance si les autorités étatiques accèdent à la requête de la basoche? Me Robenson Pierre-Louis est secrétaire général du barreau, il donne sa version des faits dans un entretien accordé au journal.
Le palais de justice de Port-au-Prince doit déloger! Cette injonction est on ne peut plus claire dans la résolution du 11 mars de l’Assemblée Générale spéciale des avocats du Barreau de Port-au-Prince suite à la convocation du Bâtonnier Mary Suzie Legros. Les raisons de cette résolution sont multiples. Cependant, la principale reste et demeure l’insécurité qui gravit des échelons dans le pays de jours en jours, sachant que la zone qui abrite les locaux de l’instance judiciaire, le Boulevard Harry Truman (Bicentenaire), est grandement affectée par ce phénomène.
Par ailleurs, si cette résolution est prise en vue de protéger le personnel judiciaire de l’un des plus importants tribunaux du pays, elle vient encore dans un moment où l’autorité de l’État haïtien est incessamment remise en question.
« Le palais de justice est un symbole »
Contacté par le journal Le quotidien News, le secrétaire de ce barreau, en l’occurrence Me Robinson Pierre Louis qui est l’un des signataires de la résolution, a fait part de son indignation. Pour lui « un palais de justice est un symbole, un patrimoine, la parfaite représentation de l’état de droit et de l’autorité de l’État ». Il est donc « indignant » pour cette instance représentant la justice d’un pays de déloger pour une raison de sécurité alors qu’elle s’est installée dans la zone (Bicentenaire) depuis le lendemain du tremblement de terre de 2010.
S’il est nécessaire pour le Tribunal de Première Instance de Port-au-Prince de se déloger ; vue la situation d’insécurité qui règne dans la zone de ses locaux qui est proche du Village de Dieu et à environ deux kilomètres de La Saline, zones déclarées de non-droit ; cet impératif marque en effet, la faillite de l’État qui ne peut pas freiner le phénomène de l’insécurité dans le pays, a fait savoir Me Pierre-Louis.
Par ailleurs, « depuis quatre années il a été signalé aux autorités concernées des risques sécuritaires auxquels les personnels du Tribunal sont exposés au quotidien » selon le secrétaire de l’Assemblée. « Mais on préfère nous laisser seuls dans cette jungle », a insisté Me Pierre-Louis.
L’État et l’insécurité en Haïti
Si les gangs armés font la loi en Haïti, l’État haïtien, jusque-là, n’arrive pas à freiner le phénomène grandissant de l’insécurité. La cartographie des gangs qui se dessinent de plus en plus en rouge dans la sphère métropolitaine, est une parfaite illustration de ce constat. Ainsi, même les instances les plus importantes de l’État, telles que l’instance judiciaire ne sont épargnées.
En cas de refus…
La résolution de l’Assemblée pour le délogement du palais de justice reste à nos jours une pression faite à l’État en vue de répondre au besoin du personnel judiciaire. Cependant, si l’État ne répond pas à la revendication du barreau dans un délai de 15 jours, « les avocats se réuniront en toge dans les périmètres de la résidence privée du Premier Ministre » ; « porteront la question à la connaissance des instances internationales compétentes ».
Jonas Reginaldy Y. Desroches