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Doubles jeux

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Seuls ceux qui ont fait taire leur conscience peuvent ne pas se sentir révoltés devant ce flux de rapatriements spectaculaires qui s’est fait sur Haïti ces derniers jours. Progressivement, ces pauvres Haïtiens, dont on dit qu’ils ont traversé toute l’Amérique centrale pour se rendre aux USA, sont refoulés sur leur terre natale. C’est le record du siècle en matière de déportation.

Les vidéos tournées sur le tarmac de l’aéroport Toussaint Louverture sont très tristes. Les témoignages aussi. Les sans-papiers haïtiens refoulés racontent qu’ils ont investi tout leur avoir dans l’espoir d’atteindre la terre américaine. Ils ont expliqué leur funeste périple. Ils ont réalisé un rallye héroïque en bravant forêts, animaux sauvages, fleuves, gens malhonnêtes. Certains ont été violentés. Pire, aucune exemption n’a été faite pour les enfants, dont certains sont en bas âge. Ils dorment à même le sol. Ils ont été placés par les autorités américaines dans des isoloirs, exposés au froid pendant des jours. Les images virales sur les réseaux sociaux sont choquantes. On y voit des agents de police montés sur des chevaux pourchasser les Haïtiens.

À côté de ce qui est légal ou illégal. En dehors des violations flagrantes des droits des migrants. En dépit du sentiment d’indignation collective que cela a provoqué, une évidence est à considérer. C’est la conséquence directe de nos choix intéressés. Les USA, dommage, sont incriminés pour nos fautes. Les bourreaux ont été substitués.

Deux choses à retenir dans les conversations de nos compatriotes, en plus des pleurs, des regrets et le désespoir. Il s’agit des causes fondamentales (problème d’emploi et d’insécurité) qui poussent ces résignés à prendre cet énorme risque.

Tous s’acharnent sur les États-Unis comme si ce pays devrait accueillir ceux que nous chassons de leur terre natale. Ceux dont nous n’avons pas besoin. Les gens dont nous avons volé l’avenir et troublé le sommeil. Ceux qui récemment essayaient de survivre même à moins d’un dollar par jour et que vos gangs ont délogés et dont ils ont massacré leurs progénitures. Déploré, condamné, dénoncé, et après? 

L’État haïtien, dont certains responsables perçoivent de juteux avantages pour des services non rendus, encourage les résignés à récidiver en considérant qu’il n’est pas capable de les assister. Il a fallu l’appui de l’OIM pour que ces malheureux embarqués comme dans les navires négriers (révélation d’un passager) puissent recevoir une humiliante somme qui varie entre 2500 et 1000 gourdes. Comme ce fut le cas pour les victimes du tremblement de terre, les dirigeants n’ont aucun fonds d’urgence pour accueillir les victimes (chassées par les autorités de leur pays).

Il est légitime de condamner cette situation on ne peut plus humiliante. Cependant, il est méchant de s’ériger en révolutionnaire essayant de présenter ces malheureux comme des victimes et les USA comme des bourreaux. Ce n’est pas le moment de verser des larmes de crocodile, en assimilant la situation actuelle à la période esclavagiste (Métropole colonie). C’est plutôt, la période de la prise de conscience collective, de la gouvernance éclairée, de la reddition de comptes démocratique, du divorce d’avec l’individualisme et la mesquinerie. Au lieu de  » kriye kot sèkèy la chache pito kot mò a ye ». Cessez de clouer au pilori les USA. Évaluons d’abord la situation. Faisons notre examen de conscience et acceptons de faire le grand sacrifice.

Daniel Sévère

danielsevere1984@gmail.com

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