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Éliminer la violence faite aux femmes : est-ce la clé vers une société plus développée?

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Entre les différentes voies à choisir pour la construction d’une meilleure Haïti, l’avènement d’une société où la violence exercée contre les femmes n’aura plus sa place est indispensable…

L’un des problèmes majeurs auquel fait face la société haïtienne au XXIème siècle est sans doute la violence faite aux femmes. Dans un sens large, le terme évoque l’utilisation de la force physique ou du pouvoir, quelqu’un. Plus restrictivement, comme par exemple dans le domaine psychosocial, on dit que la violence faite aux femmes fait partie de ce que les spécialistes appellent les VBG ou violences basées sur le genre. Cette violence-là a comme particularité le fait qu’elle soit dirigée contre une personne à cause de son sexe. Pouvant revêtir différentes formes : physique, psychique ou symbolique, elle existe également même dans les sociétés les plus modernes. Chez nous, néanmoins, les acteurs étatiques et sociaux ne sont pas assez sensibilisés sur le fait que cette dernière freine le progrès tant social qu’économique. Si la plupart des pays occidentaux s’accordent sur les principes des droits de la personne comme la liberté, l’égalité et le droit à la sûreté, pour les femmes haïtiennes, ces droits pourtant élémentaires sont, malheureusement et jusqu’à ce jour, beaucoup moins respectés. Pour parvenir à ce que chaque personne  développe son plein potentiel, s’intègre librement et entièrement dans les sphères socio professionnelles de son choix, soit à l’abri des atteintes injustes, une société démocratique doit nécessairement passer par l’élimination progressive de la violence et particulièrement des VBG. D’où la nécessité de travailler à l’éradication de cette tendance dans notre société.

La violence faite aux femmes est multiforme. Elle revêt tantôt une forme active, physique ou directe : harcèlement sexuel, viol, agressions physiques, féminicide ; tantôt une forme latente, psychique, ou symbolique : les inégalités salariales, l’exclusion des affaires publiques, les stigmatisations et surtout l’éducation inégalitaire, ces dernières étant moins visibles, mais plus profondes. Néanmoins parmi toutes celles précitées, l’éducation inégalitaire est de loin la plus totale, injuste et difficile à combattre. Elle est à la base de toutes les autres, elle façonne la société et s’assure de sa propre reproduction. Les femmes qui représentent plus de 50% de la population haïtienne sont finalement sous-représentées dans la plupart des secteurs d’activités publiques ou privées à cause d’un retard de développement personnel, économique et social dû aux VBG.

Cet état de fait possède un impact tant sur l’économie que sur les individus d’une société. Le patriarcat n’est pas, comme on le prétend, l’expression d’une supériorité intellectuelle masculine, mais bien évidemment celle d’un sous-développement forcé des femmes confinées aux rôles de second plan,  avec des difficultés d’épanouissement social et d’expression de leurs capacités. Par des réformes institutionnelles, les sociétés occidentales essaient de remédier à ce problème et ont fait des avancées significatives, puisque désormais tous les citoyens, qu’ils soient hommes ou femmes, participent  de manière égale (ou presque) progrès social, économique, technologique et politique. Chez nous au contraire, la violence multiforme sur les femmes qui perdure ne fait que freiner le progrès, privant l’économie d’une bonne partie de sa force et la société d’une part importante de son « cerveau ».

Considérant l’ensemble des implications d’une telle problématique, quels seraient les portes de sortie possibles, pour la construction d’une meilleure société haïtienne? Nous proposons ici quatre points essentiels facilement applicables dans le contexte haïtien :

  1. L’éducation égalitaire : Axer totalement l’éducation et l’instruction sur l’égalité des sexes et le respect des différences dans les différentes institutions de socialisation. Supprimer l’idée du sexe fort et du sexe faible dans l’éducation permettra de diminuer la tendance du recours à la violence. En effet, il est prouvé que celle-ci est facilement dirigée contre celui ou celle que l’on croit faible.
  2. Le leadership et le mentorship: Promouvoir une génération de jeunes profondément conscients du problème et engagés en faveur de l’égalité ; encadrer les associations et regroupements qui prônent l’égalité et l’équité du genre, travaillant à la défense des droits de la personne, etc. ; favoriser le coaching individuel des jeunes aux fortes potentialités, les inciter à s’engager dans le domaine sont des leviers efficaces pour maintenir la société en alerte vis-à-vis du problème en perspective d’un changement.
  3. Les réformes institutionnelles : Un ministère du genre, de l’égalité et de la famille en lieu et place du fameux ministère à la condition féminine par exemple, serait un pas de géant dans la lutte pour l’éradication de la violence faite aux femmes haïtiennes.
  4. Promotion d’une double émancipation homme-femme : l’idée la plus nouvelle et la plus radicale qui fait écho au féminisme sans toutefois le contredire est en effet l’émancipation masculine. La virilité, concept cher aux hommes occidentaux et pourtant graduée et mesurée vis-à-vis du genre féminin, crée chez l’homme un égo, un sentiment complexe qui le rend émotionnellement dépendant de l’autre sexe. Il doit prouver sa force, son intelligence, sa stabilité, sa capacité etc., afin d’être un « vrai homme » ou tout au moins un « homme réussi ». Une telle mentalité n’est pas sans conséquences dans notre société et contribue également à la violence symbolique qui existe entre les deux genres.

L’émancipation féminine des inégalités devrait avoir comme corollaire l’émancipation masculine de la virilité.

En fin de compte, force est de constater qu’il n’existe pas une voie unique d’élimination systématique de la violence. Le phénomène est complexe, il persiste aussi bien dans des sociétés développées comme chez les Français, ou les Européens que dans d’autres moins avancées comme la nôtre. Pour éliminer la violence faite aux femmes, il faut donc une action conjuguée d’une multiplicité d’acteurs, qui tiennent en éveil la conscience de la génération montante sur l’objectif d’un environnement social harmonieux avec pour chacun des possibilités maximales de croissance et de développement. Car seule la lutte pour le bien, l’égalité, l’harmonie et la paix sociales permet de vaincre le mal, l’inégalité, l’injustice, jusqu’à éliminer la violence sous toutes ses formes.

Daniel Toussaint

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