Plusieurs organisations écologistes, dont Ecovert-Haïti, dénoncent la mauvaise gouvernance et le gaspillage des fonds des bailleurs internationaux destinés aux projets environnementaux en Haïti. Dans un communiqué publié le 11 août 2025, elles révèlent les conclusions d’une mission d’observation menée dans le Sud et le Grand Nord du pays, qui a permis d’évaluer la situation et l’avancement de ces initiatives.
Les enquêteurs ont observé un désastre écologique d’une ampleur préoccupante à Manceau, Saint-Hilaire et Cavaillon, qualifiant la situation d’extrêmement alarmante.
Ils ont également constaté les impacts visibles des usines de vétiver aux Cayes sur les écosystèmes locaux. Des projets qui sont au point mort.Selon le coordonnateur de Ecovert-Haïti, Anel Dorlean, le Projet Biodiversité Sud (2022–2028), lancé il y a plus de deux ans, peine à démarrer.
Seules quelques activités, comme la culture de maïs et d’ananas par des bénéficiaires, ont été vérifiées, principalement initiées par ORE et AyitiKa. Le système agroforestier tarde à être constitué et les résultats espérés sont hypothétiques. Des partenaires comme AyitiKa sont lents, et le Jardin botanique des Cayes ne fait rien jusqu’à présent malgré un décaissement reçu. Le centre de germoplasme à l’Étang Lachaux est à l’abandon, et ce silence opérationnel crée une opacité totale dans la gestion, selon ces organisations. À Maniche, des riverains se plaignent du projet PARSA, estimant que l’équipe de direction et des cadres du Ministère de l’Agriculture torpillent de l’argent de la Banque mondiale au nom des bénéficiaires.
Une enquête est en cours sur ce cas, affirme le communiqué.Dans le Grand Nord, le Projet Résilience de Trois-Rivières n’a toujours pas réalisé d’activité concrète après plus d’un an. « Les bénéficiaires déplorent que le projet soit toujours au stade des promesses. De même, le Projet RESEPSE mis en œuvre par Helvetas dans le Sud-Est n’arrive toujours pas à démarrer toutes ses activités de terrain, avec un manque d’actions visibles auprès des populations », peut-on lire dans le communiqué. Pour M. Dorlean, ces observations révèlent un manque de transparence et de rigueur dans la gouvernance des projets environnementaux.
Des cas préoccupants de conflits d’intérêt ont été rapportés, où certains cadres du MDE agiraient à la fois comme superviseurs et exécutants. Cette confusion des rôles compromet le suivi impartial et mine la crédibilité, estime le communiqué. Ce dernier poursuit que le projet CBIT-Haïti, surnommé le projet hôtel-climatique, est un exemple frappant : 70 % du budget serait absorbé par des ateliers à Port-au-Prince, sans effet concret sur les communautés rurales.
Une lettre ouverte des directeurs départementaux montre que le MDE est en crise et dans une impasse, avec des accusations d’abus de pouvoir et de privilèges de caste au détriment de l’intérêt collectif, révèle le communiqué. Face à ces dysfonctionnements, Ecovert-Haïti appelle à une réforme profonde de la gouvernance environnementale en Haïti. Cette réforme est jugée cruciale pour mettre fin à l’insécurité écologique, répondre efficacement aux effets du changement climatique, promouvoir un modèle de développement participatif et durable, et restaurer la confiance des citoyens. L’organisation insiste également sur la nécessité de lancer une campagne nationale pour la restauration des écosystèmes dégradés du pays.
Marie-Alla Clerville