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Haïti au bord de l’implosion

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Une illustration exemplaire de la vie de nos congénères en Haïti

Par Max Dorismond

À lire les nouvelles, nous demeurons avec l’impression que c’est une île où traînent les morts-vivants de la célèbre « marche des zombis » dans « Thriller » de Michaël Jackson. C’est un coin de terre où chacun dicte sa propre loi, sa propre Constitution.

Les gangs sont les maîtres du jeu. BBQ, le roi des rois, peut fermer et ouvrir la capitale à sa guise, concrétisant ainsi la prophétie de l’historien Michel Soukar : « Un jour viendra, ce sont les gangs qui nous diront quand sortir et quand rentrer chez nous ». Et nous y voilà !

Les nantis ou les quelques barons de la classe moyenne ont déjà pris leurs jambes à leur cou vers des cieux plus cléments. Les rues sont quasi désertes. Ceux qui restent et ne peuvent s’enfuir, ce sont les plus mal pris et les quidams à dossiers criminels, exclus de la scène internationale.

Ces pauvres hères constituent des loques humaines croisées sur les routes, comme s’ils évoluaient sur une autre planète. Advienne que pourra! Kidnappings, assassinats, viols, covid-19, balles perdues, être au mauvais endroit au mauvais moment : c’est la nouvelle loterie de l’heure, pour laquelle il faut être béni des dieux pour ne pas gagner son lot de tourments.

Les gens vivent, la rage au cœur. Tout va de travers, et personne ne connaît son ennemi : le gouvernement, c’est trop vague; le Premier ministre, il plane au-dessus de la mêlée. L’opposition, qui avait diabolisé le p’tit gars du Trou-du-Nord, en jurant de le gifler en pleine rue, cette opposition qui rêvait du « p’tit transit », selon feu Jovenel, on ne l’entend plus, on ne la voit plus depuis l’assassinat crapuleux de la cible rouge. Les gangs de la rue, ils sont trop forts et trop bien équipés. Comme des zombis, le peuple ne vit plus, il survit, prie et espère!

Ainsi, il suit son instinct et évolue au rythme des esclandres. À Milot, dans le Nord, l’hôpital a été attaqué après qu’un citoyen blessé, réfugié dans la place, eût été achevé par des hommes en armes. Dans la panique, tout le personnel a pris la fuite, suivi des malades à qui il restait encore un peu de force. Une partie de l’institution a été incendiée.

À Jacmel, l’hôpital Saint-Michel fut saccagé après le décès d’un patient dont la famille a crié à la négligence. Le personnel médical a pris la poudre d’escampette. Dans le « sauve-ta-poule » ou dans la cohue, une autre dame, en attente de soins aigus, après avoir accouché d’un enfant mort-né, décéda à son tour. Ses parents et alliés, ont appliqué la même méthode à ce qui restait de cette institution à la suite d’une crise de rage et de vengeance collective.

Dans certaines églises, les pasteurs, pour ne pas perdre la dîme, invitent les fidèles inquiets à se présenter, armés de machettes, parce que, disent-ils, la Bible n’a pas de balle. En cette période survoltée, les pasteurs gourmands se sont vus dans l’obligation de dire les vraies affaires : La Bible c’est du papier. Elle n’est pas un bouclier pour un kalachnikov. Elle ne protège d’aucune façon, contrairement à ce qu’ils avaient toujours enseigné à leurs ouailles aux fins de les endormir.

Cette Bible, dénommée «la Biblaye ou la Négraille », selon certaines critiques qui prétendent qu’elle a été retouchée spécialement pour les négros après l’indépendance d’Haïti, pour calmer les ardeurs des esclaves des colonies environnantes, avec l’ajout de certains chapitres ciblés, a toujours été un instrument de manipulation écrit sur mesure, tels qu’en font foi les passages suivants :

Mathieu 5:44 — « Mais moi je vous dis : Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent. Faîtes du bien à ceux qui vous haïssent et priez pour ceux qui vous maltraitent et vous persécutent… »

Éphésiens 6:5-9 – « 5Esclaves, Obéissez à vos maîtres terrestres avec crainte et profond respect, avec sincérité de cœur comme à Christ… 7Servez-les avec bonne volonté, comme si vous serviez le Seigneur et non des hommes… 8sachant que chacun, esclave ou homme libre, recevra du Seigneur le bien qu’il aura lui-même fait… ».

1 Pierre 2:18 — « Les esclaves et leurs maîtres : 18Serviteurs, soumettez-vous à votre maître avec toute la crainte qui lui est due, non seulement s’il est bon et bienveillant, mais aussi s’il est dur. 19 En effet, c’est un privilège que de supporter des souffrances imméritées, par motif de conscience envers Dieu… ».

Galates 6:6 – « 6Que celui à qui on enseigne la parole fasse part de tous ses biens à celui qui l’enseigne ».

Après la lecture de ces versets, vous devinez l’engouement, le plaisir de certains étrangers à faire fortune et bombance chez nous sans crainte d’être lynchés, vous connaissez la raison de cette pauvreté endémique et pourquoi l’injustice règne dans l’absolu.

C’est un peuple de moutons, mené par des « bergers subventionnés » qui assurent la sainte paix. C’est un groupe qui implore son dieu, matin, midi et soir, du lundi au dimanche, en rêvant du pain béni. Il se trouve aujourd’hui devant la criante réalité en découvrant que la Bible n’était jamais un protecteur, un bouclier contre les 400 Marozo ou Lanmô 100 jou, BBQ et compagnie. Ce n’était simplement qu’un leurre pour berner les idiots et les empêcher de se révolter.

L’urgence a écarquillé bien des yeux. Le peuple vit la rage au cœur et se perd sans boussole dans l’identification de ses ennemis. Il les voit partout aux alentours. À ses yeux ne pétille que le reflet des pilleurs professionnels, surtout les politiciens, les nantis, les prédateurs, les privilégiés dont les appétits croissent avec arrogance. C’est maintenant qu’il vient de découvrir qu’il a trop prié depuis plus de 200 ans pour tous ceux qui lui avaient fait du tort. (voir Mathieu 5:44) ci-dessus.

Le défoulement collectif devient un choix de vie, un besoin de vengeance, en substituant l’intuition et l’émotion au processus analytique. Il veut tout détruire; les stations d’essence sautent, des hôpitaux sont incendiés; l’embrasement se généralise. Cela apaise certains détraqués et enrage les victimes et le gros de la population : un asile de fous !

En somnambules, sans aucun état d’âme, ces laissés pour compte se cherchent un éventuel ennemi, un coupable à flamber. N’importe quoi peut arriver. Le pays est à la dérive. L’International est fatigué et s’enferme dans un silence coupable, dénotant son incompétence en matière d’assistance à pays en danger, tout en se disant, comme certains le pensent en théorisant sur Haïti : « Il n’y a rien à faire pour cette nation, sinon la laisser fondre comme neige au soleil ».

Max Dorismond

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