Le Quotidien News

L'actualité en continue

Haïti et la communauté internationale, entre aide et ingérence 

L’intervention de la communauté internationale en Haïti est perçue par certains comme une assistance nécessaire au pays en difficulté, par d’autres, comme une ingérence qui met en péril la souveraineté d’Haïti. Outre les questions d’ingérence, de mauvaise gestion, l’aide a-t-elle toujours été adaptée aux défis en question ?

Haïti, dit-on, le pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental, a toujours fait face à des défis énormes : pauvreté extrême, instabilité politique, catastrophes naturelles récurrentes, institutions bancales. Ces conditions poussaient souvent la communauté internationale à intervenir sous forme d’assistanat. En effet, peu importe qu’il soit, aide humanitaire, assistance au développement ou appui aux programmes de reconstruction post-catastrophes, ces derniers n’ont pas toujours permis à Haïti de surmonter ses crises récurrentes et d’améliorer du coup la qualité de vie de sa population. C’est le cas du professeur et diplomate brésilien Ricardo Seitenfus qui abordait cette question dans son livre intitulé « L’échec de l’aide internationale à Haïti. Dilemmes et égarements » édité par l’Université d’Etat d’Haïti (UEH) en 2015.

Avec la situation sécuritaire qui ne cesse d’empirer, cette question d’aide internationale a refait surface à côté de la mauvaise gestion faite certaines fois par les autorités gouvernementales en place.  Pour Belto Belot, 30 ans, professeur d’économie en Haïti : «Les interventions ont souvent été mal coordonnées, avec une absence de stratégies claires à long terme. La dépendance croissante vis-à-vis de l’aide extérieure a également créé une situation où les politiques internes d’Haïti sont parfois dictées par les intérêts de la communauté internationale, plutôt que par les besoins réels de la population. Les critiques de cette aide pointent le fait qu’elle ne prend pas toujours en compte les spécificités culturelles et les propriétés locales ».

« Par exemple, les programmes de développement imposés par les donateurs peuvent ne pas correspondre aux besoins ou aux aspirations du peuple haïtien et peuvent engendrer une dépendance plutôt qu’une autonomie durable. De plus, certains projets ont été perçus comme une forme de contrôle déguisé sous couvert d’aide. « Ainsi, la relation entre Haïti et la communauté internationale oscille entre soutien légitime et ingérence », explique le professeur.

« Pour que l’aide internationale soit véritablement bénéfique, dit le professeur,  elle doit s’accompagner d’une approche respectueuse de la souveraineté d’Haïti, en privilégiant des partenariats transparents, basés sur les besoins réels de la population. Il est crucial que les acteurs internationaux soutiennent Haïti dans ses efforts pour bâtir des institutions sociales et promouvoir le développement durable, tout en laissant la place à la gouvernance locale pour décider de son avenir. En somme, l’aide internationale ne doit pas être une forme de domination et d’ingérence, mais un véritable levier pour accompagner Haïti dans son processus de reconstruction et de développement, tout en préservant la dignité et la souveraineté du peuple haïtien ».

Contrairement aux idées  de M. Belot, Lunie, 27 ans, infirmière licenciée, pense que l’aide internationale est d’une grande utilité. La présence surtout des forces multinationales la rassurent, vu la dégradation de la situation sécuritaire actuelle.

Faut-il souligner qu’Haïti a manqué au moins deux grandes opportunités de poser les bases du développement durable. Le premier avec l’aide reçue après le tremblement de terre du 12 janvier 2010. Plusieurs personnes estiment que cette aide a été détournée. Le deuxième, c’est avec les fonds du programme du gouvernement vénézuélien, plus connu en Haïti sous le nom de « Petro Caribe ». Des rapports de la Cour  Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSC /CA) ont fait état d’un vaste scandale de dilapidation du fonds (soit plus de 2 milliards de dollars). Aujourd’hui encore, les dilapidateurs sont probablement dans la nature et il n’y a toujours pas de procès. La capitale haïtienne se retrouve sous la coupe réglée des bandits armés. Des politiciens et des hommes d’affaires ont même été pointés du doigt comme des figures ayant joué un rôle dans cette situation insoutenable.

Louis Gardily Marvyne

About The Author

Laisser un commentaire