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Haïti : Le système bancaire fait face à une pénurie de cash en dollars, confirme l’APB

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Les maux qui rongent le peuple haïtien se présentent souvent sous différentes formes. L’Association Professionnelle des Banques (APB), suite à une Note de presse parue le 26 avril 2023, a avisé la clientèle des banques commerciales et le public en général que le système bancaire connaît une rareté importante du numéraire en dollars américains.

Alors que le problème relatif à la pénurie de carburant dans les stations-essence persiste dans le pays, et qu’à cela s’ajoute une crise alimentaire, l’Association Professionnelle des Banques (APB), elle, confirme un autre problème qui complique déjà la vie de certains membres de la population. Il s’agit de la pénurie du dollar sur le marché local. « Pour faire face à cette pénurie de cash en dollars, les banques se trouvent obligées de mettre des limites aux tirages effectués par les déposants », confirme l’APB dans cette Note de presse. « Ces dispositions causant des frustrations compréhensibles de la clientèle sont malheureusement la source de fâcheux et déplorables incidents », reconnaît l’APB.

Toutefois, celle-ci précise que les banques commerciales ne connaissent pas de problème de liquidité de dollars. « Les dépôts en dollars des clients leur sont disponibles et peuvent être mobilisés à n’importe quel moment sur demande de ceux-ci », informe l’Association Professionnelle des Banques soulignant par ailleurs que les transactions impliquant des sorties de cash seront plafonnées dans l’attente d’une solution durable à cette rareté conjoncturelle de numéraire.

Pour pallier ce problème, l’APB « invite les déposants en dollars à utiliser d’autres moyens de paiement qui sont à leur disposition. Parmi lesquelles les chèques de direction et les chèques sur l’étranger, les virements d’un compte bancaire à un autre, les virements SPIH d’une banque à une autre, les transferts sur l’étranger, pour les titulaires de comptes courants, les chèques tirés sur leur compte ».

En l’absence d’espèces  suffisantes, dit l’APB, des moyens de paiement électronique existent et peuvent aussi être considérés par la clientèle.

L’économiste Enomy Germain fait le point sur la pénurie de dollars

Intervenant dans la presse au sujet de la rareté de dollars américains sur le marché national, l’économiste Enomy Germain précise, d’entrée de jeu, que c’est le numéraire qui n’est pas disponible. « Si quelqu’un en Haïti veut transférer une somme d’argent à l’étranger, il peut le faire. Car c’est la forme imprimée du dollar qui n’est pas disponible », explique le professeur d’université.

M. Germain a mis l’emphase sur six « éléments fondamentaux » en vue d’expliquer le problème de numéraire. « Le premier élément est d’ordre structurel. Haïti n’est pas arrivée à mobiliser suffisamment de devises pouvant l’aider à satisfaire ses besoins en devises », déclare-t-il en soulignant que les transferts privés sans contrepartie représentent la plus grande source de devises  du pays. « Ils sont évalués autour de 3 milliards de dollars américains », indique-t-il.

Cependant, le taux des transferts durant ces dernières années a chuté considérablement, alors que le pays a besoin d’environ 5 milliards de dollars chaque année pour pouvoir  fonctionner normalement, affirme l’économiste Enomy Germain.

Mis à part ce problème de transfert évoqué, l’économiste a également mis l’accent sur un problème « à moyen terme » ayant rapport avec  le programme « Humanitarian Parole » du Président américain Joe Biden. « Le fait que le programme mis en place par Joe Biden ressemble à un regroupement familial, les gens qui avaient l’habitude d’envoyer de l’argent pour leurs proches vont cesser de le faire puisque ces derniers ne seront plus en Haïti. Et cela va contribuer à une baisse de liquidité du dollar dans l’économie », explique-t-il en mentionnant aussi les investissements directs étrangers qui sont à la baisse et le secteur du tourisme qui n’existe presque plus depuis 2018.

Le deuxième facteur mis en relief  par le professeur Germain est ce qu’il appelle « le coefficient de réserve obligatoire ». « À chaque fois qu’une personne fait un dépôt de 100 dollars  us sur un compte bancaire, la Banque de la République d’Haïti a un pourcentage de 53% sur cet argent. Dit autrement, la banque qui a reçu le dépôt du client ne gère pas d’un point de vue théorique la somme déposée », détaille l’économiste.

En conséquence, souligne-t-il, si un client dépose $ 100 us sur un compte bancaire et par la suite elle est revenue pour récupérer son argent, elle ne va pas le trouver car la Banque en question a déjà remis 53% de cette somme d’argent à la BRH.

Le troisième élément est «la désintermédiation du formel à l’informel », ajoute l’économiste. « Le peu de dollars restant dans les banques ont été vendus sur le marché informel qui, lui, a un taux plus élevé que celui du marché formel », explique-t-il en soulignant que c’est l’une des causes de la rareté du dollar américain sur le marché local. « Le quatrième élément est la thésaurisation. C’est-à-dire que les gens préfèrent garder chez eux leur argent au lieu de le déposer dans les banques. Et cela est un problème pour le système économique », estime le professeur Germain.

Le cinquième élément, quant à lui, concerne la restriction qu’il y a eu en matière d’importation de dollars américains. « À cause de cette restriction, ils ne sont pas en grande quantité les dollars qui sont entrés en Haïti », affirme M. Germain en mentionnant que le dernier élément est lié à l’immigration. « Chaque Haïtien qui laisse le pays pour se rendre aux États-Unis part en moyenne avec environ 5000 dollars américains », indique-t-il.

Jackson Junior RINVIL

rjacksonjunior@yahoo.fr

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