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Haïti s’achemine-t-elle vers une banalisation de la pénurie des produits pétroliers ?

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Contacté par le journal Le Quotidien News, le syndicaliste Jacques Anderson Desroches a fait savoir que cette crise récurrente de carburant est due à une désarticulation du marché pétrolier contrôlé par le secteur privé des affaires, phénomène qui s’ajoute à l’impuissance de l’État central. Pour sa part, le président de l’Association Nationale des Distributeurs de Produits Pétroliers (ANADIPP), David Turnier, affirme que cela s’explique, entre autres, par le fait que les compagnies pétrolières font face à un problème de livraison.

Aucune mesure ferme n’est prise par les autorités étatiques pour résoudre de manière définitive la pénurie de carburant à travers tout le pays.  Les stations à essence, pour la plupart, une fois de plus, gardent leurs portes fermées. Et parallèlement, le carburant se vend sur les trottoirs dans des récipients. Dans une telle situation, il n’y a pas de prix fixe pour s’en procurer. Le prix varie d’un quartier à un autre, d’une commune à une autre et d’un département à un autre.

Cela a un impact considérable sur les frais de transport, qui sont souvent multipliés par deux,  ainsi que sur la cherté de la vie. Cette pénurie au niveau national s’explique par le fait qu’il y a « une désarticulation » sur le marché pétrolier où deux approches doivent être considérées, selon le syndicaliste Jacques Anderson Desroches. « Par ce déséquilibre constaté sur le marché pétrolier haïtien,  l’État se trouve dans l’incapacité de prendre des mesures pour résoudre le problème du carburant. Et quand il hausse le ton, cela est  insignifiant.  Par conséquent, le secteur privé des affaires monopolise totalement le marché pétrolier », a-t-il indiqué en précisant que « le marché noir » pratiqué avec le carburant résulte d’une complicité bien organisée pour « décapitaliser » les gens les plus pauvres.

Cependant, pour David Turnier, président de l’Association Nationale des Distributeurs de Produits Pétroliers (ANADIPP), la pénurie de carburant persiste parce que les compagnies pétrolières font face à un problème de livraison. « Les stations essence font des commandes auprès des compagnies pétrolières. Ces dernières, quant à elles, se trouvent dans l’incapacité de faire la livraison soit parce qu’elles ne peuvent pas ou ne veulent pas», explique-t-il. « Ils sont nombreux les propriétaires de station à essence qui refusent de vendre le carburant dans cette situation de crise et par conséquent ils ne font aucune commande », a-t-il poursuivi, ajoutant par ailleurs qu’à proximité des stations essence, sur les trottoirs, la vente du carburant est souvent pratiquée.

Ce qu’il faut faire pour résoudre la pénurie des produits pétroliers dans le pays

Il faut sanctionner les gens qui vendent le carburant dans des récipients sur les trottoirs, pense plus d’un. Pour M. Desroches, ces gens ne sont que des intermédiaires qui favorisent le marché noir. Toutefois, il reconnaît que la loi haïtienne punit sévèrement la vente illicite de produits pétroliers. « Dans le contexte difficile où se trouve le pays, cela est un crime. Le prix officiel du carburant est de 250 gourdes, alors que sur les trottoirs il se vend à 1250, 1500 gourdes. Il s’agit d’un crime organisé par des gens influents au sein du secteur privé des affaires et de l’État», affirme-t-il pointant du doigt la lâcheté de Jacques Lafontant, Commissaire de gouvernement de Port-au-Prince,  décidant de procéder à l’arrestation de ceux qui vendent du carburant sur les trottoirs, alors qu’en réalité ils ne sont que des facilitateurs.

Pour M. Turnier, la politique n’a pas sa place dans les dossiers relatifs aux produits pétroliers. « Haïti ne produit pas de carburant. C’est le prix du marché qui doit être appliqué. C’est la loi du mars 1995 qui régit l’importation des produits pétroliers dans le pays. On doit respecter la loi. Si on est en désaccord par rapport à ce qui est écrit dans cette loi, on peut la changer », dit-il.

Le président de l’ANADIPP se questionne sur ceux qui vendent le carburant dans des récipients sur les trottoirs. «  D’où ils les trouvent ? Si l’État sait pertinemment où ils les trouvent pourquoi il n’y a jamais eu de sanction», se questionne-t-il précisant que l’État doit viser plus haut dans ses sanctions.

Le marché des produits pétroliers est un marché très juteux, d’après Jacques Anderson Desroches. « C’est l’un des secteurs les plus rentables dans le pays. Résoudre la crise du carburant totalement aura un effet en faveur de la population et donc en défaveur des bourreaux. Le camp des bourreaux se constitue du secteur privé des affaires et de l’État haïtien», explique le syndicaliste.

La pénurie des produits pétroliers peut être résolue. Et pour cela, l’État doit reprendre le contrôle du marché pétrolier, faire le contrôle à priori du secteur pétrolier et  des distributions rationnelles des produits, déclare Jacques Anderson Desroches soulignant que dans les jours à venir il y aura des mouvements de protestation et de grève afin de renverser cette situation chaotique à laquelle fait face le pays.

Le prix du carburant dans certains quartiers et ville de province

En effet, dans la commune de Carrefour particulièrement à Diquini un gallon carburant se vend entre 1250 et 1500  gourdes. C’est  également le cas dans certains quartiers dans la Commune de Gréssier. À Jérémie et dans plusieurs autres villes de province, on peut vendre le gallon  jusqu’à 2000 gourdes.  

Le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) dit vouloir agir contre la spéculation illicite des produits pétroliers

Le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire à travers le secrétaire technique dudit conseil rappelle fermement, dans une circulaire rendue publique le 31 août 2022, aux juges titulaires des tribunaux de paix de la République, ainsi que leurs suppléants juges d’agir promptement dans leurs attributions d’Officiers de Police judiciaire et de prendre toutes les dispositions légales en vue de freiner la spéculation illicite des produits pétroliers conformément à la loi du 20 décembre 1946 relative en la matière.

« Selon l’art 1 de la loi du 20 décembre 1946 sur le marché noir ou la spéculation des produits illicites, est considéré comme spéculation illicite tout fait d’acquisition, de vente, cession, échange de marchandises au-dessus du prix fixé par les instances concernées ainsi que tout stockage clandestin ou refus de vente en dehors des formes prescrites par les dispositions légales », lit-on dans cette circulaire.

Jackson Junior RINVIL

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