Jacques Stephen Alexis, l’âme du bel amour humain!

La journée du bel amour humain! C’est ainsi que l’on baptise ce 22 avril 2022 qui marque le centenaire de la naissance du grand Jacques Stephen Alexis. Connu en Haïti et dans plusieurs autres pays pour sa plume dorée, Jacques Stephen Alexis est cette douce encre qui prêche le bel amour humain. Cette année, diverses activités sont organisées pour commémorer le centenaire de la naissance de cette grande figure de la littérature haïtienne!

Né aux Gonaïves, le 22 avril 1922, Jacques Stephen Alexis est le fils du célèbre diplomate et homme de lettres Stephen Alexis, journaliste et romancier, auteur de Nègre Masqué (1933). Jacques Stephen Alexis n’a pas attendu de grandir pour se faire une place dans le monde des lettres. Élevé dans une atmosphère où la littérature et la politique avait une place prépondérante, il a commencé à écrire à l’aurore de son adolescence et  publié dès ses 18 ans un essai au sujet du fabuleux poète haïtien Hamilton Garoute.

Homme intelligent et très soucieux du bien-être de son entourage, Jacques Stephen Alexis obtient en 1945 son doctorat en médecine à la Faculté de Médecine de Port-au-Prince et devient neurologue quelques années plus tard, à Paris. Il exerce à Paris et épouse François Montes en 1949. De cette union naîtra Florence. De retour sur sa terre natale, il épouse en secondes noces Andrée Roumer, nièce du grand poète Emile Roumer, avec laquelle il eut son fils Jean-Jacques.

À côté de ses activités de médecin, l’auteur de « La belle amour humaine » (1957) était également journaliste engagé, opposé au régime. Sa carrière journalistique fut même la principale cause de son départ prématuré. Il écrit dans les colonnes de Cahiers d’Haïti, Le Caducée et La Ruche, le plus populaire journal d’opposition de l’époque. Dans les pages de La Ruche, Jacques Stephen Alexis signe ses articles sous le patronyme de Jacques la Colère. Et il fut l’une des premières voix à porter la révolution de 1946. Aujourd’hui encore, certains de ses articles sont très lus et très appréciés.

Jacques Stephen Alexis a été avant toutes choses un grand humaniste. Il prônait à travers ses œuvres le respect de la valeur humaine dans sa plus grande dimension. Il n’était pas du genre à ménager ses mots et faisait preuve de résistance dès que cela était nécessaire. Il était contre l’injustice, l’inégalité et l’oppression. Il exprimait haut et fort ses pensées et sa résistance. Jacques Stephen Alexis était engagé dans les luttes sociales et politiques, aux côtés de René Depestre, Gérald Bloncourt et d’autres. Toujours avec sa plume qu’il prenait le soin de ne jamais égarer, il continuait de lutter pour ce qu’il croyait juste et connaîtra plusieurs fois l’exil.

Les œuvres de Jacques Stephen Alexis restent parmi les plus grands classiques de la littérature haïtienne. Traduites en plus de vingt langues et étudiées dans plusieurs universités étrangères, elles sont saluées par la critique partout dans le monde. Son premier roman, “Compère Général Soleil”, publié en 1955  faillit obtenir le prix  Goncourt et figure parmi les plus grands romans de la littérature caribéenne. En dehors de ce chef-d’œuvre, il y a eu “Les Arbres musiciens” paru en 1957, “L’espace d’un cillement” en 1959 et le “Manifeste de la Seconde Indépendance” la même année et en 1960, parut “Romancero aux étoiles”. À travers ses œuvres, Jacques Stephen Alexis transcrit le réel d’une manière particulière.

Il développe au nom des artistes et intellectuels haïtiens le réalisme merveilleux. Dans une entrevue accordée au journal Le Quotidien News, le professeur Jean Claude Chérubin a fait savoir que le réalisme merveilleux c’est la rencontre fructueuse de l’esthétique communiste avec la vision du monde animiste de l’Haïtien. « En ce sens, j’y vois un approfondissement de l’indigénisme par l’apport d’un marxisme non dogmatique, dépouillé de sa gangue positiviste », ajoute-t-il. « On peut voir la solidarité de l’œuvre littéraire d’Alexis avec son travail de théoricien et de militant politique. Le souci de produire une pensée haïtienne ouverte sur l’universel traverse à mon avis toute son œuvre. De Compère Général Soleil, en passant par Les arbres musiciens, jusqu’au Manifeste du PEP il y a une continuité de perspective. Entre l’œuvre romanesque et la praxis politique d’Alexis se dessine la voie de la seconde indépendance”, conclut le professeur Chérubin.

Les textes de Jacques Stephen Alexis, un grand de la littérature, sont des textes qu’il faut absolument lire,  en particulier ce texte qui apporte un flot d’amour à l’humanité, « La belle amour humaine», publié en 1957. Jacques Stephen Alexis a été assassiné en avril 1961. Si des  années après sa mort, son nom résonne aussi fort c’est parce que, durant ses 39 années  d’existence, il a fait un nœud indestructible dans le fil de la vie, comme l’a si bien dit Jacques Roumain, mais aussi parce qu’aujourd’hui encore le monde a besoin de cette belle amour humaine qu’il prônait. Alors, terminons avec un extrait de cette œuvre:

“Heureuse année à mon ami l’Homme !

Heureuse année aussi à ceux qui se cherchent et ne se trouvent pas encore.

Heureuse année aussi à ceux qui ont trébuché dans le chemin difficile.

Heureuse année quand même à ceux qui ne croient à rien, même pas a eux-mêmes.

Heureuse année, bien sûr, à tous ceux qui souffrent, luttent, espèrent et croient toujours.

Heureuse année à tous mes frères, mes amis, à tous mes compagnons du spirituel qui combattent pour trouver la joie, la paix du cœur, et le sentiment du devoir accompli”.

Leyla Bath-Schéba Pierre Louis

Pleyla78@gmail.com