L’assassinat du Président Jovenel Moïse inquiète beaucoup de citoyens
4 min readLa nouvelle de l’assassinat du Président Jovenel Moïse, survenu le 7 juillet 2021, a provoqué la stupéfaction de beaucoup de citoyens. Entre réactions sur les réseaux sociaux et témoignages livrés au journal, l’étonnement et les inquiétudes de la population sont palpables.
Il y a bien longtemps que l’histoire de cette nation n’avait enregistré un tel fait et avec une telle violence. En effet, le juge de paix qui s’est rendu sur les lieux du crime aurait dénombré 12 projectiles dans le corps de la victime. Sachant que le dernier Président assassiné dans l’histoire d’Haïti serait Vilbrun Guillaume Sam en 1915. Aujourd’hui, la mort du Président tué dans sa résidence privée a surpris la nouvelle génération qui, pour la première fois, voit mourir un Président. Aussi, les avis sur le sujet ne manquent pas.
Une autre vague d’insécurité ?
Jonas, qui est journaliste, affirme avoir reçu un choc en recevant la nouvelle de la part d’une cousine qui l’a réveillé pour la lui annoncer. « Il est vrai que le pays a connu au moins 4 assassinats de Chefs d’État, je n’aurais jamais pu penser qu’un tel événement se reproduirait », affirme-t-il. Pour lui, une telle nouvelle devrait ébranler tout le monde, peu importe le parti auquel il on appartient. « Si un Président qui possède des gardes pour assurer sa protection peut être assassiné chez lui, qu’en est-il de nous qui sommes de simples citoyens ? », questionne-t-il, inquiet. Le journaliste estime qu’il n’est pas le seul à être préoccupé par la question.
En effet, la mort du Président est survenue pendant une période fragile déjà marquée par l’insécurité. Le massacre de dizaines de gens à Martissant et à Bas-Delmas inquiétait déjà beaucoup de citoyens qui voyaient leur police nationale démunie face aux gangs armés. Les organismes des droits humains déploraient et dénonçaient cette situation qui est à l’origine de la dispersion de milliers de réfugiés dans le pays. Aussi, beaucoup estiment que l’évènement n’a rien de rassurant. « C’est le pays où tout est possible, j’ai parfois l’impression que le ciel nous tombe sur la tête. Concevoir que le premier citoyen d’un pays puisse mourir ainsi et ajouter les autres événements, cela fait beaucoup », déclare une jeune étudiante, l’air dépassée.
Tourisme
Certains, comme Nick, étudiant à l’Université Quisqueya, pensent que ceci est la preuve que l’insécurité a atteint l’un des plus hauts niveaux qu’on puisse atteindre. Nick pense que c’est une menace pour l’économie du pays, mais il s’inquiète surtout du fait que le pays ne puisse plus compter sur les fonds que lui garantissaient le tourisme et la diaspora. « Déjà qu’avec les massacres qui se multipliaient, les étrangers craignaient pour leur sécurité dans le pays. S’ils entendent maintenant que le Président a été assassiné chez lui, ils auront l’impression de se faire tuer dès qu’ils mettront les pieds à l’aéroport », déclare-t-il le plus sérieusement du monde.
Noëlle, une jeune Haïtienne vivant aux États-Unis, confirme la crainte de Nick. « Je n’ai pas peur en ce moment, seulement parce que je ne suis plus dans le pays. J’imagine la tension qui pourrait régner à Port-au-Prince en ce moment », confesse-t-elle. Noëlle continue pour avouer qu’elle se sent désespérée et qu’elle peine à continuer d’imaginer un avenir meilleur pour le pays. « Pour moi, c’est le dernier degré d’insécurité que le pays pourrait atteindre si l’on ajoute les massacres », affirme-t-elle.
Dans l’attente de plus de clarté
Plusieurs citoyens espèrent pouvoir bientôt avoir des réponses aux questions qui les tiraillent. C’est le cas d’Audyl qui est éducateur de formation et professeur de leadership : « Les premières questions que je me suis posées en tant que citoyen sont de savoir pourquoi cela s’est produit, quel est le mobile et quelles sont les conséquences possibles ».
Jonas espère, malgré tout, un dénouement heureux bien qu’il avoue que c’est quelque chose de difficile. « J’espère que les erreurs commises dans le passé puissent être réparées suite à une prise de conscience collective », déclare-t-il.
Ketsia Sara DESPEIGNES