Le calme après la tempête dans les relations haïtiano-dominicaines
3 min readLa tempête semble s’apaiser entre les dirigeants haïtiens et ceux de la République Dominicaine, suite à l’annonce cette semaine de la suspension du processus d’émission de visas en faveur des étudiants haïtiens et les réponses pour le moins musclées du Ministre des affaires étrangères, Claude Joseph.
Le Président dominicain Louis Abinader qui en a fait l’annonce cette semaine, n’a pas cessé d’exprimer ses préoccupations par rapport à l’insécurité qui prévaut en Haïti, déplorant aussi l’inaction de la communauté internationale dans cette crise. Dans la foulée, le Premier Ministre Ariel Henry et le Chef de l’État dominicain se sont entretenus le 3 novembre par téléphone autour des échanges un peu tendus entre le Président dominicain et le Chancelier haïtien sur Twitter. « L’incident diplomatique est clos. Le Gouvernement enverra un émissaire en République Dominicaine », a fait savoir le Premier Ministre Ariel Henry.
Les étudiants haïtiens en République Dominicaine peuvent pousser un ouf de soulagement. Ils ne sont pas visés par les restrictions sur les visas annoncées par les Autorités. Le vice-ministre aux affaires consulaires a expliqué ce mercredi 3 novembre 2021 que la suspension concernait les nouvelles demandes d’inscription.
Des spécialistes estiment à 70 000 le nombre de ressortissants haïtiens dans les universités dominicaines. Outre la suspension des visas pour les étudiants haïtiens, d’autres mesures touchant les migrants haïtiens avaient été annoncées en septembre dernier. Les Autorités avaient fait état de l’application stricte des mesures sur l’immigration et exigeaient le respect du quota de 80% d’employés nationaux dans les secteurs de la construction civile et de l’agriculture.
Or, plusieurs dizaines de milliers d’Haïtiens travaillent dans ces deux secteurs. Dans le même temps, Abinader a également annoncé que les femmes enceintes de plus de six mois seraient interdites d’entrée dans le pays, pour éviter les frais de prise en charge des femmes haïtiennes dans les hôpitaux publics. Il a déploré l’inaction de la communauté internationale dans la crise sécuritaire en Haïti.
Plusieurs analystes ont réagi sur cet incident, du jamais vu dans l’histoire des deux pays. « Haïti peut toujours exprimer ses mécontentements envers la République Dominicaine, considérant les déclarations inopportunes du Président dominicain. Mais cet affrontement ne va pas nous aider », a expliqué Daly Valet.
« Il y a une mauvaise lecture de la situation de la part des dirigeants des deux pays où les réalités économiques et sociales ne sont pas les mêmes », a avancé le spécialiste en relations internationales, avant d’ajouter que les déclarations du Président dominicain sont dues au fait que son pays est en position de force par rapport à Haïti qui devient de plus en plus instable.
Selon Camille Chalmers, c’est une question stratégique qui doit être traitée soigneusement et de manière responsable. « La réaction du Chancelier haïtien est teinté de faux nationalisme », estime le professeur, rappelant que le régime PHTK durant cette dernière décennie n’a jamais travaillé au profit des intérêts des Haïtiens évoluant en République Dominicaine.
Mario Sylvain