Le canal sur la rivière Massacre sera évalué par une mission de l’OEA
4 min readLa construction du canal d’irrigation sur la rivière Massacre, financée par l’action citoyenne, fait l’objet d’une situation de crise entre Haïti et la République Dominicaine. Après qu’Haïti ait décidé de garder ses frontières fermées après la réouverture du marché frontalier côté dominicain le 18 septembre dernier, l’OEA constate la crise ouverte, et propose ses bons services.
Après les vagues successives de déportations massives qui se poursuivent encore aujourd’hui, c’est à présent la construction d’un canal en territoire haïtien qui insupporte le Président dominicain Luis Abinader. Pour la République Dominicaine qui a décidé de fermer ses frontières avec la République d’Haïti « le temps qu’il faudra pour que cette action provocatrice cesse », ce projet est réalisé en violation du Traité de 1929 signé sur l’entente, l’amitié et l’arbitrage, ainsi que le protocole de révision frontalière de 1936. La République d’Haïti, au contraire, estime être dans ses droits, en invoquant le même Traité.
« Le Gouvernement de la République d’Haïti croit qu’un dénouement ne sera considéré comme convenable que s’il permet le partage équitable des ressources hydriques, la normalisation des relations entre les deux pays et de revenir à la circulation des personnes et des biens des deux côtés, comme c’était le cas entre les deux Républiques avant la fermeture unilatérale du 15 septembre », a déclaré le Gouvernement haïtien dans une Note du 9 octobre.
Dans un communiqué du 26 septembre dernier, le Secrétaire Général de l’Organisation des Etats Américains (OEA) a annoncé une mission technique d’évaluation sur le Canal à Ouanaminthe. À travers ce communiqué, l’OEA estime qu’il est indispensable de « résoudre cette controverse sur la base du principe de bon voisinage et de l’amitié qui unit les deux pays et leurs dirigeants ». Pour Luis Almagro, Secrétaire Général de l’Organisation régionale, « il est largement reconnu qu’Haïti et la République Dominicaine détiennent les mêmes droits d’utilisation sur cette rivière. Les ressources hydriques de la rivière sont essentielles pour les deux pays, vu les besoins de leurs habitants, particulièrement dans le contexte de sécheresse actuelle. L’utilisation de ces ressources doit se faire conformément au droit international et aux Traités en vigueur entre les deux nations ».
Haïti réaffirme ses droits à L’OEA
Le 12 octobre, cette mission « technique » a été confirmée par l’OEA alors que le Conseil Permanent de l’organisation avait reçu en séance extraordinaire le Ministre des Affaires Etrangères dominicain Roberto Alvarez autour de la question du Canal, en présence de l’Ambassadeur haïtien auprès de l’Organisation, l’ex-directeur de la Police Nationale d’Haïti, Léon Charles. Lors de cette réunion, l’ambassadeur haïtien en a profité pour rappeler la position du Gouvernement haïtien qui est d’affirmer le droit souverain de la République d’Haïti de disposer comme elle l’entend de ses ressources.
Léon Charles a rappelé aussi que les Dominicains ont déjà installé plus d’une dizaine de prises sur cette même rivière du Massacre, appelé « Rio Dajabón » en terre voisine, alors que c’est la première du côté haïtien. « Les travaux de ces ouvrages ont été réalisés de manière unilatérale. Ces infrastructures hydriques en fonction sur le territoire dominicain exploitent plus de 70% des ressources en eau de la rivière Massacre à des fins agricoles et industrielles », a rappelé M. Charles en parlant des canaux d’irrigation dominicains.
En attendant, la République Dominicaine ne délivre plus de visas d’entrée aux Haïtiens qui, eux, ont fermé leurs barrières frontalières. La veille de la décision du Gouvernement Dominicain de rouvrir le marché binational à Dajabón le 11 octobre, un violent incendie s’est déclaré du côté dominicain, jugée suspect par les deux côtés.
L’ADIH invite le pays à travailler pour l’autosuffisance alimentaire
La crise frontalière, selon l’Association des Industries d’Haïti (ADIH), est une occasion à saisir, surtout avec la prise de conscience par la population, pour « reprendre notre plein potentiel d’autosuffisance ». Ainsi, l’ADIH, dans une Note du 13 octobre, a exhorté le gouvernement haïtien à garder fermées les frontières avec la République Dominicaine. « Les cris de cœur déterminés de nos compatriotes, réclamant cette décision, sont entendus et appréciés », écrit l’ADIH qui affirme que « de concert avec d’autres associations patronales du pays, un plan d’action est déjà en préparation avec les instances gouvernementales concernées en réponse à la fermeture unilatérale des frontières ».
Clovesky André-Gérald PIERRE