sam. Sep 7th, 2024

Le Quotidien News

L'actualité en continue

Le reportage en direct des opérations policières contre les gangs armés, un véritable danger pour les journalistes et les forces de l’ordre

3 min read

Plusieurs structures œuvrant dans le journalisme numérique, dont le Collectif des Médias en Ligne (CMEL), l’Association Haïtienne des Médias en Ligne (AHML), se sont dites consternées par le récent incident qui s’est produit le 17 juillet 2024, lors d’un déploiement dans les rues de Port-au-Prince des agents de la Police Nationale d’Haïti (PNH) et des policiers kényans. Un journaliste a été blessé par une bombe lacrymogène alors qu’il couvrait l’événement. Ainsi, ces structures appellent aux journalistes de cesser de suivre de près les forces de l’ordre et d’arrêter les directs lors des déploiements.

Suite à l’incident du 17 juillet dernier, le Premier ministre Garry Conille, dans une adresse à la nation, appelle aux journalistes de cesser de signaler les positions et les stratégies des policiers ainsi que l’évolution des opérations policières contre les gangs armés. En effet, cette mauvaise pratique peut avoir des conséquences directes sur la réussite des opérations. C’est pourquoi, plusieurs associations des médias en ligne ont tenu à tirer la sonnette d’alarme pour demander aux journalistes de faire preuve de responsabilité, lors de ces opérations.

Cet incident a montré combien le métier de journalisme est difficile et risqué en temps de crise sécuritaire. Les journalistes sont exposés à des scènes extrêmement dangereuses dans l’exercice de leur métier. Tenant compte des articles 28 et 28-1 de la Constitution haïtienne du 29 mars 1987 amendée, qui reconnaissent la liberté de la presse et l’exercice du journaliste, le CMEL a lancé un appel aux journalistes, particulièrement ceux des médias en ligne, à faire preuve de prudence et de professionnalisme.

Le CMEL  a estimé que les journalistes qui réalisent des reportages en direct lors des opérations de police peuvent involontairement aider les bandits à localiser les forces de l’ordre, mettant en péril non seulement les opérations de sécurité, mais aussi la sécurité des journalistes eux-mêmes. « La priorité doit toujours être la sécurité de tous les citoyens, y compris celle des agents de sécurité et des professionnels de médias », a conseillé le CMEL.

Godson Lubrun, Président de l’AHML, croit qu’il est opportun de mettre au premier plan la problématique des médias en ligne. La situation sécuritaire se détériore et l’État se trouve dans l’urgente nécessité de rétablir l’ordre public. L’État, dans un cadre bien prévu, dans les normes, peut restreindre certaines des libertés publiques, dont celles des journalistes à couvrir librement des événements publics.  « Pour faire face aux défis actuels, il est essentiel de remettre les pendules à l’heure, c’est-à-dire, réguler une fois pour toute la question des médias en ligne. Cette régulation doit se faire par la définition d’un cadre légal, l’identification et l’enregistrement des nouveaux médias en ligne, en particulier ».

M. Lubrun encourage les journalistes à se protéger eux-mêmes avant de partir en reportage dans les zones dangereuses. « Les professionnels de l’information doivent savoir bien qu’ils sont des observateurs privilégiés des faits et non des acteurs.  C’est pourquoi, il est crucial de ne pas risquer leur vie dans la collecte des informations sur le terrain pour ne devenir eux-mêmes la nouvelle à donner ».

Par ailleurs, à travers un communiqué, la Mairie de Port-au-Prince a aussi souligné plusieurs consignes devant pallier le problème de sécurité des professionnels de l’information. « Il est strictement interdit de suivre les véhicules blindés ou autres équipements militaires en mouvement, car cela pourrait mettre en danger la vie des journalistes. Il est recommandé de recueillir des informations en amont des opérations et de se limiter à une distance sécuritaire sans interférer avec les activités en cours », a-t-elle précisé.

Elle conseille aux journalistes de concentrer leurs efforts de reportage après les événements, moment jugé le plus sûr et approprié pour collecter des témoignages et des informations détaillées.

Marie-Alla Clerville

Laisser un commentaire