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L’UNESCO s’exprime en créole

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Lors d’une rencontre fructueuse tenue le 29 janvier 2021 avec la haute hiérarchie de l’UNESCO, Madame Dominique Dupuy, Ambassadeur, Déléguée permanente d’Haïti auprès de l’Unesco, a sollicité que le créole, autant que lefrançais, soit utilisé comme langue de travail au Bureau de l’UNESCO à Port-au-Prince. Ce, en vue du respect des droits linguistiques de la population haïtienne. Elle a également demandé que l’UNESCO s’engage à contribuer davantage à une meilleure visibilité du créole, l’une des deux langues officielles de la République d’Haïti. Déjà, depuis 1erfévrier 2021, les internautes peuvent constater que,notamment sur les réseaux sociaux,l’UNESCO en Haïti s’exprime aussi en créole.

La représentante d’Haïti a exprimé, pendant cette rencontre, le souhait que les communications et les publications de l’Organisationdans le pays soient désormais réalisées aussi en créoleafin d’assurer un meilleur accèsà la population haïtienne. Autrement dit, elle a soulevé des préoccupations très importantes : l’usage du créole aux conférences et activités tenues dans le pays, la mise en œuvre d’un mécanisme d’interprétation simultanée lors des séances, latraduction des principaux ouvrages de travail.L’UNESCO a pris note de ces points et s’est engagée à mobiliser les ressources requises à partir du mois de février 2021. « Je salue l’UNESCO qui, fidèle à son mandat de préserver la diversité des expressions culturelles, a entendu notre requête pour une meilleure inclusion linguistique en Haïti, en soutenant l’usage du créole. Le plaidoyer pour notre langue maternelle est l’un des piliers de ma mission », a déclaré Dominique Dupuy, tout en précisant que la Délégation permanente d’Haïti auprès de l’UNESCO montre l’exemple en faisant usage des deux langues tant au niveau de ses communications internes qu’externes.

Le créole joue un rôle clé en Haïti. Il facilite la cohésion sociale, renforce le sentiment d’appartenance à la culture nationale et assure l’interconnexion entre la population et le pays. « On se réjouit bien évidemment de l’inclusiongraduelle de la langue créole au Bureau de l’UNESCO à Port-au-Prince.Si une première étape sera la traduction des outils de communication en créole, mais il n’en demeure pas moins qu’un plan d’extension de l’usage de la langue créole devra aussi être élaboré et exécuté au sein de l’UNESCO avec une version créole du portail Internet du Bureau de l’Organisation en Haïti. La langue créole est cruciale en tant qu’outil de communication et de mise en valeur des traditions des peuples créolophones anciennement colonisés, notamment les haïtiens », a fait savoir Monsieur RicarsonDorcé, ethnologue et spécialiste en patrimoine culturel immatériel.

La langue et la culture créoles doivent être valorisées au niveau institutionnel, dans tous les organismes internationaux dont Haïti est membre. L’UNESCO pourrait donner le ton, ce qui s’inscrit, d’ailleurs, dans sa mission. En effet, depuis l’an 2000, chaque 21 février, est célébrée la Journée internationale de la langue maternelle à travers laquelle l’UNESCO mène des activités de plaidoyer, de sensibilisation, de promotion de la diversité linguistique et culturelle. Selon l’UNESCO, le développement local durable passe par l’accès aux informations et connaissances dans la langue maternelle des citoyens, sans négliger les autres langues. Notre créole maternel participe à la mise en circulation de notre histoire, de notre mémoire, de nos savoir-faire traditionnels. Elle remplit une fonction fondamentale dans l’instauration d’une dynamique participative de transformation sociale.

Le Bureau de l’UNESCO à Port-au-Prince gagnerait à renforcer son engagement aux côtés de l’Académie du Créole Haïtien (AKA) en vue de la valorisation de la langue et la culture créoles qui sont essentielles pour le développement local durable en Haïti. Sur sa page Facebook, le linguiste haïtien internationalement reconnu et professeur au Massachussets Institute of Technology (MIT), Michel FrédéricDegrafflaisse comprendre que « la valorisation de la langue créole peut faire tomber les barrières linguistiques qui reproduisent les inégalités sociales en Haïti. Seule la langue créole peut servir de moteur à la création, au partage des connaissances et du pouvoir pour tous les citoyens du pays ». Pour Kesler Bien-Aimé, professeur à l’Université d’État d’Haïti et spécialiste du secteur culturel à la Commission nationale haïtienne de coopération avec l’UNESCO, ce serait une bonne nouvelle que le Bureau de l’UNESCO à Port-au-Prince s’associe à la valorisation institutionnelle de la langue créole. « C’est un acte responsable par rapport à notre pays et notre communauté. C’est d’abord se conformer à la constitution de 1987 selon laquelle les deux langues, le créole et le français, doivent prendre chacune leur pleine place, mais c’est aussi naturel que l’UNESCO le fasse, puisque c’est en ligne droite avec sa mission et ses valeurs », a-t-ilsouligné.

À noter que le Bureau de l’UNESCO à Port-au-Prince a pour rôle de contribuer à la concrétisation du mandat de l’Organisation en Haïti, par le biais d’accompagnement dans différents champs: éducation, droits de l’Homme, sciences, sauvegarde du patrimoine culturel, communication et information. Haïti compte parmi les tout premiers pays à avoir rejoint l’UNESCOen 1946.

Fritz Laventure

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