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Réduction drastique des cas d’enlèvement: L’effet du réveil des citoyens

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Le lancement du mouvement « Bwa Kale », en date du 24 avril 2023, donnant lieu à un binôme police-population, a conduit depuis un mois à une réduction drastique des enlèvements et d’autres manifestations de la violence des gangs, a fait remarquer le Centre d’Analyse et de Recherches en Droits de l’Homme (CARDH) dans un rapport indiquant qu’il y a eu 43 assassinats contre 146 pour le mois d’avril et 86 pour le mois de mars, soit une baisse respective de 70.55% et de 50.55%.

Les cas d’enlèvements diminuent considérablement. À en croire le Centre d’Analyse et de Recherches en Droits de l’Homme, c’est le mouvement dénommé « Bwa kale » donnant lieu à un binôme police-population  déclenché le 24 avril 2023 qui est à la base de la diminution importante des cas de kidnapping dans le pays. « Ce réveil citoyen a conduit à une réduction drastique des enlèvements du 24 avril au 24 mai 2023», précise le CARDH  soulignant qu’il n’y a eu presque aucun d’enlèvement signalé durant cette période.

De plus, l’organisation constate une baisse du nombre « des autres manifestations de  violence des gangs » comme les tueries et les vols. « 43 assassinats contre 146 pour le mois d’avril (du 1er au 23) et 86 pour le mois de mars, baisse de 70.55% et de 50.55% », écrit le CARDH dans ce rapport datant du 26 mai en soulignant que, depuis le lancement de ce mouvement, au moins 160 présumés bandits ont été pourchassés, lynchés et brûlés vifs. « 134 dans le département de l’Ouest, 83.75 % ; cinq (5) dans le département du Centre, 3.12 % ; neuf (9) dans l’Artibonite, 5.62 % ; un (1) dans le Sud, 0.62% ; un (1) dans le Sud Est, 0.62% ; neuf (9) dans la Grand’Anse, 5.62 ; un (1) dans le Nord, 0.62 », indique-t-il.

Comment le CARDH comprend-t-il le mouvement « Bwa kale »?

Selon le CARDH, le mouvement « Bwa kale» est « une réaction populaire (droit naturel et conventionnel à la légitime défense) face à la cruauté extrême des gangs, parce que les forces de l’ordre sont impuissantes et que l’État  est   incapable d’user de son monopole de (la) violence légitime. « La communauté internationale tourne en rond et s’enlise dans la rhétorique des promesses. » De plus, il affirme que ce mouvement doit être encadré pour une sécurité durable, sinon, les répliques des gangs seront pires que les atrocités précédant le « Bwa Kale ».

« Le massacre orchestré par le gang 5 secondes à Sources-Matelas le 19 avril 2023, avec une quarantaine d’assassinats et de disparus, a été une revanche contre la brigade citoyenne mise en place à la suite de l’attaque du 29 novembre 2022 (au moins 12 assassinats) », a rappelé le CARDH qui demande toutefois de limiter les éventuelles dérives qui auront rapport avec le mouvement « Bwa kale ».

Des signes avant-coureurs : certaines villes avaient donné le ton

« Du 24 avril 2023 au 24 mai 2023, au moins 150 présumés bandits ont été exécutés par la population. La police en a stoppé au moins 17. Cependant, des quartiers et des communes avaient déjà donné le ton : Miragoâne au moins 13 ; Sources-Matelas au moins 14 ; Moulin Sable au moins 3 ; Delmas et Solino au moins 21 ; Roseaux au moins 5; Kokoye (entre Ganthier et Thomazeau) au moins 30 », indique rapport qui qualifie ces événements de « signes avant-coureurs » faisant état d’au moins 78 présumés bandits et proches exécutés.

Que dit la loi haïtienne sur la légitime défense ?

Les gangs armés règnent en seigneurs des lieux. D’après le CARDH, ils contrôlent  en moyenne 60% de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. « Leur cruauté peut être mesurée à l’aune des kidnappings, des tueries et des viols dont la population est l’objet au quotidien », explique-t-il. Cependant, pour faire face à l’offensive des bandes armées, la population civile a déclenché le mouvement « Bwa kale ». Pour certains, celui-ci est une sorte de « légitime défense ». Que dit la loi haïtienne à cet effet ?

La légitime défense, dit l’organisation, est un droit naturel consacré par tous les pays. Le CARDH en ce sens précise qu’elle permet de « se défendre », de « se protéger ». Les moyens utilisés dans cette circonstance sont interdits dans une autre situation […] », explique-t-on en soulignant par ailleurs que parmi les conditions essentielles pour justifier la légitime défense on peut mentionner : i) une défense nécessaire à sa protection, c’est-à-dire que la riposte est la seule solution ; ii) la proportionnalité des moyens utilisés.

D’après le CARDH, le droit haïtien garantit le droit à la légitime défense. « Ainsi, l’article 273 du code pénal stipule que : « Il n’y a ni crime, ni délit, lorsque l’homicide, les blessures et les coups sont commandés par la nécessité actuelle de la légitime défense de soi-même ou d’autrui ».

Que faut-il faire pour résoudre durablement le phénomène de l’insécurité ?

À en croire le CARDH, il faut renforcer les forces de l’ordre et encadrer le mouvement « bwa kale » pour pouvoir résoudre durablement le phénomène de l’insécurité. « Le mouvement « Bwa Kale » a créé, authentiquement et sans intermédiaires, le binôme police-population tant souhaité et pour lequel des dépenses ont été faites à travers la police communautaire ou d’autres structures et des efforts ont été consentis. Il faut rapidement prendre les dispositions pour que ce rapprochement soit durable. La sécurité dépend largement d’une « complicité » entre la police et la population », recommande-t-il.

Dans cette perspective, le CARDH affirme qu’il «faut prendre des mesures institutionnelles pour s’attaquer aux « maîtres » de la criminalité. Les vrais maîtres de la criminalité ne sont pas les présumés chefs de gangs qui sèment la terreur à travers la région métropolitaine de Port-au-Prince, selon l’organisation de défense des droits humains. «Des procès exemplaires doivent être réalisés pour donner le ton (coopération judiciaire). Des prisons modernes doivent être construites, la police doit être épurée et renforcée (équipements, formations, effectifs…), la vie politique haïtienne doit être moralisée », estime le CARDH.

Mouvement « Bwa kale »: Me Darbenzky Michealange GILBERT en parle

Le mouvement « Bwa kale » est un symbole de justice populaire face à un gouvernement illégitime et irresponsable, déclare pour sa part,  le Directeur Exécutif de l’Ordre des Défenseurs des Droits Humains (ORDEDH) lors d’une interview accordée au journal Le Quotidien News. « Ils ont l’autorité mais ils n’ont pas les compétences […].L’autorité sans la compétence est aussi impuissante que la compétence sans l’autorité », poursuit l’homme de loi. « À cause de tous ces problèmes où les gens ne croient pas en leurs dirigeants, ils se contentent de rendre justice par eux-mêmes », ajoute-t-il.

À bien comprendre Me Gilbert, le mouvement « Bwa kale » est une forme de revendication populaire qui vise également à sensibiliser les citoyens pour dire qu’ils ne sont pas d’accord avec le phénomène des bandes armées.

Jackson Junior RINVIL

rjacksonjunior@yahoo.fr

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