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Se révolter n’est pas criminel

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En 2019, j’ai été contraint de laisser avec effet immédiat la cité des mortels. Sans hésitation, sans contrainte spirituelle, mais cette fois-ci sécuritaire, cette région de la cité du premier des Noirs allait mettre en péril les relations sociales. Ce n’était pas une grande première dans la vie sociale et politique de cette cité la plus peuplée parmi les grandes villes d’Haïti. Cette situation s’apparente donc doublement à l’envie d’un peuple exploité périodiquement de vivre une vie paisible, en pouvant satisfaire ses besoins les plus basiques. Dans une première approche, elle trouve son fondement dans la vie politique même du peuple haïtien en raison d’une lutte ancrée dès 1804 pour la préservation d’une liberté imposée et apposée comme un défi inéluctable. Ainsi, elle n’est dans une deuxième approche irréversible que si les Haïtiens en tant que peuple reconnaissent leur devoir de revendiquer leurs droits.

À chaque situation difficile, pour préserver ma petite histoire initiale, ce recoin de l’autre partie d’une République agonisante, méconnue du grand public international, devient le bunker temporaire d’un jeune qui devrait être apte à participer au développement politique de son pays. Cette responsabilité conférée par non seulement l’envie d’apporter une nouvelle forme de gouvernance à la Dessalinienne, mais aussi par un cursus universitaire adapté à la réalité, ne peut de toute évidence s’exercer que par une multiplication de forces profondes de la nature, qu’elles soient divines ou physiques. De plus, l’on ne peut s’accrocher à d’autres formes de possibilité.

Le peuple, jadis, a toujours été le fervent défenseur, légitime de la vie sociale et politique. D’ailleurs, la force, ainsi que les armes ont toujours été un calcul à temps plein pour négocier ce droit légitime et légal que détient ce dernier. Ainsi, en tant qu’héritier légitime de son propre territoire, il se voit dans l’obligation de veiller au respect de la vie humaine avant que d’autres considérations ne l’exigent, de prohiber les formes de violence allant à l’encontre du respect d’autrui, donc de veiller à la question de l’autre. Autrement dit, nul individu ne sera en mesure de contester, ni par la social-démocratie, ni par le communisme-socialisme, la puissance du peuple haïtien. Ainsi que l’article 51 de la Charte des Nations Unies le prédit pour un État, et je paraphrase, « la légitime défense est un droit sacré dans le cas où un membre est l’objet d’une agression armée […] ».

Traduire en langue de bois cette nécessité d’extérioriser un point de vue académique sur un problème structurel et organisationnel revient aussi à de grandes possibilités de consentir au consensus accordé par d’autres observateurs sur des hypothèses fondées exclusivement dans la logique de démocratie indirecte. Ainsi, assistons-nous de plus en plus à une forme de manipulation procédurale, biaisée par les représentants, puis négociée par une minorité.

L’objectif n’est pas d’exposer l’impossible dans l’improbable, mais de s’interroger préalablement sur l’intérêt d’une toute nouvelle forme de démocratie participative en Haïti, imposée depuis 1994. Néanmoins, sans discours d’ordre préférentiel, celle-ci constitue à la base (depuis 1986) le pendant même d’une légitimité populaire sur la vie sociale et politique en terre Dessalinienne.

La liberté individuelle n’est individuelle que si la question de l’autre fait l’objet d’une limite incontestée de cette liberté. Autrement dit, l’équation n’est possible que si les dispositions universelles, reprises par Maslow, sont et resteront unanimes. Dans cet ordre d’idées, il est important de (ré) affirmer la toute puissance du peuple qui, en dernier recours, détient en toute légitimité le monopole de la domination (pour citer Weber), lorsque les lois sont incapables de veiller à la conservation de l’individu, voire même d’une collectivité. Cette puissance, pour reprendre Weber, a toute chance de faire triompher la volonté individuelle ou collective.

La notion de Peuple porte en ce sens à équivoque et interroge sur le caractère plénipotentiaire de ce dernier, s’agissant dès lors d’un rapport de forces infra étatique, divisant premièrement la personne civile, mettant ensuite par voie de conséquence en péril la population civile. Néanmoins, il convient d’accorder sans ambiguïté une importance soutenue à la toute puissance et légitimité d’une majorité, lorsque celle-ci fait face à une opposition importante d’une minorité sauvage, envoûtée par l’envie démesurée d’augmenter ses revenus.

La révolte comme preuve de l’existence du Droit

Le Droit favorise une sorte de coexistence des individus en société. « Nul ne peut en ce sens ignorer la loi ». Mais, « c’est par la revendication d’un droit qu’une révolte s’affirme et se différencie d’autres formes de violence » pour citer Jacques Rancière dans son article publié par le MONDE DE L’ÉDUCATION en 1984. La révolte est en ce sens une réaction à une situation donnée qui, en retour, impose la nécessité de vivre avec dignité, décence, respect, et sécurité. De cet ordre d’idées, tout en s’opposant à la Loi, celle-ci traduit l’existence d’un enjeu supérieur aux prescriptions juridiques, fondamental, celui du droit à la vie, du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, des droits de l’Homme.

Ainsi, à chaque sentiment d’outrepasser son droit, l’humain est naturellement en quête de réaffirmation de puissance et de pouvoir d’autodétermination, surtout lorsqu’elle émane de la grande majorité.

Il est unanimement reconnu que l’emploi de la force comme moyen de règlement des différends est théoriquement prohibé par les grandes sociétés démocratiques. Cependant, je m’interroge sur ce principe eu égard la situation actuelle d’Haïti pour essayer de réfuter une telle démonstration et présenter cette dichotomie existentielle entre la nécessité de prohiber l’emploi de la force comme moyen de règlement des différends, et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes lorsque ceux-ci se le voient dérober par une minorité insignifiante.

Cet aspect de la vie politique en Haïti fait de ces principes relevant du droit naturel, un exercice fondamental à l’existence humaine, le bouc émissaire de la révolution haïtienne toujours en construction depuis 1802.

Ainsi, questionner le caractère révolutionnaire d’un Haïtien toujours en quête de liberté, c’est se projeter jusqu’à l’extrémité de la réalité transcendante du dernier discours de Toussaint Louverture : « En me renversant, on n’a abattu à Saint-Domingue que le tronc de l’arbre de la Liberté des Noirs, il repoussera par les racines parce qu’elles sont profondes et nombreuses ».

Prolétaires d’Haïti, unissons-nous. Faisons retentir, comme un coup de tonnerre, notre ultime mission planétaire. Laquelle est de continuer à promouvoir le respect de l’humain, le droit à la vie, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, sans manipulation extérieure ni forcée.

Dimitry Jean-Baptiste

Mémorant en Sciences Politiques et Relations internationales à l’Université Quisqueya

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