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Témoignage d’Alain Sauval, Directeur de la communication de l’Université Quisqueya à l’égard Jhony Spenser François, Co-PDG du journal

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Je remercie les organisateurs du concours de me donner la possibilité de dire quelques mots de mon ami Jhony Spenser François. C’est le Co-PDG du Journal. Lui et son ami d’enfance, Cluford Dubois, forment un tandem extraordinaire, comme il en existe rarement. Le Journal est leur bébé. Toutes les semaines, chaque jour, chaque heure, ils en prennent soin, vérifient qu’il se développe bien, élabore le menu hebdomadaire, veillent à la livraison des articles, prennent les contacts nécessaires pour aller de l’avant et élargir la famille intellectuelle qui se constitue progressivement autour d’eux. Le berceau devient trop petit.

Leur souhait le plus ardent est de faire en sorte que cette famille prenne les dimensions d’une large communauté de lectrices et de lecteurs-citoyens partageant les mêmes idéaux. Pour ce faire, ils se dépensent sans compter. Ils se complètent admirablement. La rigueur, la discipline, le sens du sacrifice, l’amour du travail bien fait constituent leurs qualités parmi tant d’autres. Je peux le dire, parce que je les côtoie et que je les vois travailler depuis deux ans.

Si je vous livre mon témoignage aujourd’hui, en ce jour qui sort de l’ordinaire, c’est parce que j’ai découvert Jhony, sur le plan humain, à la fin de l’année dernière, lorsque nous avons été ensemble victimes d’un kidnapping qui a duré longtemps, du 25 novembre au 9 décembre.

Durant toute la durée de notre séquestration, dans un espace de 12 mètres carrés, occupé par sept autres compagnons d’infortune, ne recevant que 2 petits sachets d’eau par jour, une portion de riz pour nous nourrir, et un gallon rempli d’eau de pluie pour nous laver, Jhony s’est conduit de manière admirable. Il faisait chaque matin le ménage avec un soin méticuleux, nettoyant la latrine comme il pouvait, entretenant un contact poli avec notre jeune gardien armé, sollicitant un deuxième seau d’eau, quand le premier était insuffisant. Il me disait : « Je ne peux pas rester inactif, il faut que je bouge ». Il mettait toute son énergie à servir, à parler avec les autres, se lançant dans des échanges qui pouvaient durer des heures. Il y avait un petit meuble bas dans la pièce. Souvent, Jhony sautait dessus et, assis, tel un oiseau perché sur sa branche, s’adressait aux uns et aux autres de manière souriante et toujours bienveillante. Il était très apprécié de tous, y compris du jeune gardien qu’il appelait « Nèg pa ».

La nuit, parfois la peur au ventre, nous parlions lui et moi de notre histoire personnelle, de nos rêves, du Journal. Il me disait tout bas que son souhait serait de bénéficier d’une formation de reporter photographe, une passion.

Jhony est un parfait connaisseur de la scène culturelle et artistique de Port-au-Prince. Il arpente la ville à pied, va au Centre d’Art, à l’Institut français, et dans tous les lieux culturels possibles. Il connaît chaque rue, passe des heures à marcher pour se rendre d’un endroit à l’autre, pour venir à l’Université, y compris le dimanche. C’est un arpenteur de tous les espaces possibles de vie où souffle l’esprit, dans cette ville dévastée par la terreur des criminels de tous genres.

De retour à la vie dite « normale », il s’est voué corps et âme à la préparation du concours. Cela a été pour lui comme une thérapie pour évacuer la souffrance et le stress du kidnapping. Comme d’habitude, il s’est mis au service des autres.

Avec Jhony, j’ai fait l’expérience de la fraternité dans le malheur.

J’ai beaucoup d’affection pour lui et pour Cluford Dubois. Au cours de ma vie, j’ai rencontré dans des milieux professionnels très diversifiés des milliers de jeunes, dans plusieurs pays, comme la France, l’Allemagne, la Suisse, la Tunisie, le Rwanda. C’est en Haïti que j’ai découvert des jeunes comme eux, modestes, courageux, exemplaires à tous points de vue.

Je vous remercie de votre attention et vous demande d’applaudir longuement Jhony et Cluford.

Alain Sauval

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