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18 mai : qu’en est-il de l’avis des citoyens aujourd’hui ?

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Journée souvent consacrée à des parades et célébrations centrées autour du Drapeau et de l’Université, le 18 mai de cette année a été l’occasion d’opinions différentes chez les jeunes. En effet, beaucoup ne se gênent pas  pour clamer que cela ne vaut plus la peine de célébrer le drapeau vu le contexte actuel du pays, d’autres, au contraire, ont un avis bien différent.

Célébrations en grande pompe, couleurs, chaleur. C’est ainsi que pourrait être décrite la journée traditionnelle du Drapeau et de l’Université. Des colloques sont parfois organisés par des gens  qui marquent ce jour de leur empreinte. Si ces célébrations, aux dires  de la génération d’avant, n’arrivent pas à la cheville de celles d’antan, elles restent néanmoins fascinantes et attachées à l’histoire du peuple haïtien. Pourtant, le 18 mai de cette année  a été accueilli avec une certaine froideur surtout par les jeunes du pays. Pour beaucoup d’entre eux, cela ne vaut plus la peine de fêter le drapeau.

« Ce serait une hypocrisie si je fêtais le drapeau puisque de toutes façons les moyens nous manquent », déclare Marc, un peu agacé. Beaucoup de jeunes partagent l’avis de Marc et même les publications sur le drapeau sur les réseaux sociaux se font rares. « Il ne reste rien de la fierté, alors je ne vois pas l’intérêt », en déclare un autre. Il y a même eu une publication dans le même sens sur un compte Facebook disant : « Mon drapeau, peau, peau ! Mais quel drapeau ? Est-ce celui que les politiciens ont transformé en serpillière ? Le bicolore que la gloire et la fierté ont renié […] ».

Ces avis témoignent d’un certains découragement chez nos jeunes. En effet, le contexte actuel créé chez eux un certain détachement par rapport à tout ce qui évoque le pays et sa fierté. Pire que cela serait le dégout du pays, ressenti par certains de ces jeunes indignés et frustrés du contexte social, politique et économique. Aussi, à leurs yeux, ces symboles glorieux appartiennent au passé, au temps de l’Haïti glorieuse.

Toutefois, tout le monde n’est pas de cet avis. John pense que ce n’est, certes, pas le moment de faire des parades et de rester accroché à un passé dont il ne reste presque plus  de fierté, mais il croit que le drapeau, en tant que symbole de la nation, mérite d’être honoré quotidiennement. « C’est à nous de redorer l’image du drapeau, Attendre chaque 18 mai alors que nos actions quotidiennes disent autre chose, c’est n’importe quoi », lâche-t-il. Pour lui, aimer le drapeau, c’est travailler pour l’avenir afin de ne pas se bloquer dans le passé. Quant à Cawens, il est plus catégorique : « Le 18 mai, c’est le jour du drapeau, il doit être célébré même si le pays est en cendres ».

Juste-Cœur BEAUBRUN, jeune entrepreneur et étudiant en Sciences économiques, est d’avis que le discours selon lequel il n’y aurait plus de fierté à célébrer le drapeau est erroné. « Cette fierté dont nous parlons n’a jamais été ce que nous sommes aujourd’hui, mais plutôt ce que nous avons fait  au cours de l’histoire », affirme-t-il. Selon lui, peu importe la situation présente, ce que nous avons fait dans le passé reste indélébile. Il parle toutefois de la nécessité de redonner un contenu actuel à cette fierté : « Nous devons aussi avoir les moyens de nous référer au présent ».

« La fête du drapeau dans un tel contexte devrait nous aider à être conscients de ce pour quoi beaucoup de gens sont morts, beaucoup ont lutté », continue Beaubrun. Aussi, il est d’avis que pour saluer leur mémoire, nous devrions accorder de la valeur à cet héritage qu’ils nous ont légué en en faisant un bon usage et en veillant à ce qu’il y ait une bonne gestion du pays.

Qu’en est-il de l’Université ?

L’université est aussi célébrée le 18 mai comme étant la gardienne du drapeau. Pourtant, plusieurs ont tendance à l’oublier dans leur célébration. C’est ce que soulève Jonas LAURINCE, journaliste et professeur à l’Université Notre Dame d’Haïti : « Les Haïtiens ont souvent tendance à ne parler que du Drapeau et à oublier l’Université et les étudiants, alors qu’ils devraient être inclus. Qui va garder le drapeau pour demain ? C’est nous ». Il déplore le fait que peu de valeur  soit accordée à l’instruction et aux études supérieures. « Il y a aussi cette fuite des cerveaux parce que les gens remarquent que personne ne s’intéresse à eux, alors ils partent pour faire des boulots qui ne sont parfois pas dignes de leur formation» continue-t-il. Pour lui, le fait de continuer à célébrer le drapeau est porteur d’espoir : « Voir tous ces enfants sortant de leurs écoles en brandissant fièrement leur bicolore est une preuve d’espoir mais c’est aux responsables de ce pays de donner plus de valeur à ce drapeau et aux universitaires ».

Pourtant, d’autres ne voient pas l’Université du même œil. « L’Université gardienne du drapeau ? Sincèrement je ne vois pas en quoi puisque depuis mon entrée à l’Université, on ne m’a jamais parlé du drapeau », se moque une étudiante en riant doucement. Elle déclare qu’elle entend parler du drapeau seulement chaque 18 mai.

Beaubrun est du même avis : « Je pense que l’Université ne joue pas ce rôle. D’ailleurs, nos Universités ont un grand problème de leadership parce qu’elles ne prennent pas de position, pas de responsabilité ». Il souligne aussi que ce secteur a trois fonctions : former et transformer, faire de la recherche et servir la communauté. Aussi, pour lui, l’Université, si elle jouait son rôle de gardienne du drapeau, aurait engendré des citoyens attachés à leur drapeau et lui accordant une grande valeur.Ketsia Sara Despeignes

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