Haïti : un « lock » causé par la violence des gangs armés
3 min readAucune mesure productive n’a été, jusqu’à présent, prise contre l’insécurité. Aussi, la crise affecte de plus en plus de catégories, de plus en plus de secteurs, et paralyse le fonctionnement normal du pays.
Les cas d’enlèvement continuent de se multiplier, les démonstrations de force des gangs armés ne cessent pas de stupéfier, la population haïtienne vivant quotidiennement dans la peur. L’insécurité continue son périple au sein de la société haïtienne mettant de plus en plus à nu l’impuissance des institutions qui, telle la Police Nationale d’Haïti (PNH), sont chargées d’assurer la protection des citoyens haïtiens qui se découvrent livrés à eux-mêmes.
Après la bouleversante nouvelle des circonstances de la mort du Professeur Patrice Derenoncourt, survenue au cours du week-end dernier, ce sont des affrontements entre gangs armés qui font des victimes dans les environs de Carrefour-Feuilles. En effet, Eva, résidant à Fort-Mercredi, témoigne : « Ce sont les bruits de balles qui bercent nos journées depuis deux jours. Les écoles, qui avaient commencé à fonctionner ont dû renvoyer les élèves ». Selon elle, plusieurs personnes sont maintenues prisonnières chez elles par la situation. « Elles ne peuvent même pas sortir s’acheter à manger ou à boire », déplore-t-elle.
Malgré cette situation, Eva est bien obligée de se mettre en situation pour apprendre puisque l’institution qu’elle fréquente n’a pas chômé. Elle rédige les devoirs, prépare ses examens malgré le climat hostile et défavorable à l’apprentissage. Seulement, tout le monde n’a pas, comme cette jeune fille, les ressources intérieures nécessaires pour apprendre dans les circonstances actuelles. C’est ainsi que Belo se déclare fatigué. « Parfois je ne sais même plus si je suis à l’université tant je sens que je lâche tout », affirme-t-il tristement.
Pour lui, c’est impossible d’apprendre en craignant pour sa vie à chaque fois qu’il faut aller en cours, lorsqu’il faut trembler pour ses proches et lorsque les mauvaises nouvelles envahissent les médias. Belo affirme que les cours prennent parfois des airs de corvée puisqu’il a l’impression de s’exposer dans la rue et de courir le risque de se faire enlever à chaque fois qu’il sort de chez lui.
Sur plusieurs fronts…
Si, après la levée de la grève, l’ANADIPP annonçait que les camions- citernes avaient commencé à livrer dans les stations, cela semblait être une aubaine pour les gangs armés. En effet, bien que le Gouvernement ait promis d’assurer la sécurité pour les transporteurs, pas moins d’une dizaine de camions-citernes ont été détournés et environ cinq chauffeurs ont été kidnappés entre le 1er et le 3 novembre 2021. Une situation qui fait craindre une prolongation de la crise de carburant qui cause déjà assez de soucis et qui a déjà menacé assez de vies.
Toutefois, la protection de la vie ne semble pas être une priorité sur le territoire haïtien ces derniers jours puisque même les institutions qui devraient sauver des vies sont directement touchées par l’insécurité et ses conséquences. L’hôpital Sacré-Cœur de Milot n’a pas été épargné. Lors d’un affrontement entre les gangs rivaux qui sévissent dans la région, une partie de l’hôpital a été incendiée. Un véritable chaos dans lequel le pays devra bien sortir un jour, au nom des droits fondamentaux de ses citoyens.
Ketsia Sara Despeignes