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Le régime des sanctions adoptées par le Canada et les États-Unis et leur éventuel impact sur la classe politique haïtienne

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Les sanctions adoptées par les États-Unis et le Canada à l’encontre de certaines personnalités politiques et économiques du pays commencent à susciter de la grogne au sein de la classe politique. L’initiative des sanctions prises par le Canada et les États-Unis dans le cadre de l’application de la Résolution 5623 du Conseil de Sécurité des Nations Unies s’inscrit dans un rapport de domination et d’une volonté d’affaiblissement de la classe politique haïtienne, a fait savoir Jean Chenet Ulysse, coordonnateur national du Mouvement Point Final.

Éradiquer l’insécurité qui constitue l’un des problèmes majeurs auquel fait face le pays est une nécessité. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement d’Ariel Henry a sollicité l’aide de la communauté internationale en vue de soutenir la Police Nationale d’Haïti (PNH) dans la lutte contre les gangs armés. Le Canada et les États-Unis ont décidé de procéder différemment en adoptant de préférence des régimes de sanctions à l’encontre de certains hommes politiques et représentants du monde économique.

« Le Canada joue un rôle de premier plan en sanctionnant des membres de l’élite afin de les empêcher de soutenir les gangs qui commettent des actes de violence contre le peuple », écrivait Mélanie Joly, Ministre des Affaires étrangères du Gouvernement canadien lors de la publication d’un communiqué le 5 décembre 2022.

Ces sanctions adoptées contre les élites politiques et économiques du pays provoquent déjà des mécontentements. Et par conséquent, des questions s’imposent sur leur utilité à proprement parler. En se référant aux propos de Jean Chenet Ulysse, coordonnateur national du Mouvement Point Final, l’initiative des sanctions prises par le Canada et les États-Unis dans le cadre de l’application de la Résolution 5623 du Conseil de sécurité des Nations Unies s’inscrit dans un rapport de domination et dans une volonté d’affaiblissement de la classe politique haïtienne. « S’ils voulaient faire vraiment une chose sérieuse, ils auraient dû utiliser la justice haïtienne dans cette affaire », a-t-il fait savoir lors d’un entretien accordé au journal Le Quotidien News le 23 février 2023.

À en croire M. Ulysse, ces sanctions sont limitées d’un point de vue diplomatique, politique et juridique. Sur le plan diplomatique, il ne revient pas aux pays étrangers d’agir unilatéralement sur les dossiers politiques et de gouvernance d’un pays souverain. Juridiquement, il n’y a pas des dossiers constitués  permettant à la justice haïtienne de faire le suivi. Il ne peut pas y avoir de sanctions sans les recours judiciaires. On doit impliquer la justice haïtienne dans cette affaire », a-t-il expliqué en soulignant toutefois qu’il ne peut pas ignorer les relations entre les acteurs politiques et économiques haïtiens avec les gangs armés dans le pays.

Les sanctions canadiennes et américaines paraissent très tendancieuses, selon celui qui est l’expert en Coopération humanitaire. Il pose deux conditions pour que les sanctions adoptées par le Canada et les États-Unis contre des membres  de l’élite politique et économique haïtienne soient utiles au pays. « Les sanctions peuvent être utiles à la société haïtienne si, et seulement si, il y a un peu de transparence dans la prise des sanctions et si la justice haïtienne est impliquée dans cette affaire ».

Élections

L’un des objectifs du Gouvernement d’Ariel Henry, c’est de réaliser des élections dans le pays. Selon les propos du coordonnateur national, pour avoir des élections dans le pays, on doit rétablir avant tout un climat de sécurité. « Le pays est totalement gangstérisé. Comment pourra-t-on mener des campagnes électorales dans les zones de non droit », se questionne-t-il.

Même en dépit de la signature du l’Accord du 21 décembre 2022 entre le Premier Ministre Ariel Henry et d’autres secteurs du pays, Jean Chenet Ulysse estime qu’il doit exister un consensus politique inclusif et très large avant de parler des élections dans le pays.

Par ailleurs, M. Ulysse précise que la réalisation des élections n’est pas la solution idéale à la crise haïtienne. Au contraire, dit-il, sans un consensus politique, les élections pourraient aggraver la situation en Haïti, comme c’est souvent le cas.

Les propos d’Ariel Henry sur les sanctions

Suite à sa participation à la 44e réunion des Chefs d’État et de Gouvernement de la Caricom, le Premier Ministre Ariel Henry a été interrogé par le service créole de la Voix de l’Amérique. Eu égard aux sanctions imposées par le Canada et les États-Unis contre certains membres de l’élite politique et économique haïtienne, le neurochirurgien a indiqué que celles-ci aident le pays et que son Gouvernement n’a fourni aucune liste. « Les sanctions nous aident. Elles ont bien entendu changé la situation un peu sur le terrain. Le Gouvernement haïtien n’a rien à voir avec les sanctions. Nous n’avons pas fourni de listes. On ne nous a pas communiqué tous les dossiers concernant ceux qui sont sanctionnés…Mais globalement, si les sanctions peuvent nous aider à obtenir un meilleur climat pour la sécurité et le dialogue, c’est une bonne chose », dit-il.

Par ailleurs, les cas d’enlèvement et les fusillades  ne cessent d’augmenter ces derniers temps dans le pays. Le secteur médical en particulier est l’un des secteurs ciblés par les bandes armées. Ils sont nombreux les médecins qui ont été enlevés ces derniers jours. Le Dr Louis Gérald Gilles faisait partie de cette liste.

Parallèlement,  il importe de signaler, que le département de l’Artibonite est devenu l’un des foyers particulièrement actifs des bandes armées. Ces dernières pillent et contrôlent presque tout dans le département. Des communes comme Liancourt et l’Estère sont livrées aux mains des bandes armées. Le constat est que la population, particulièrement les gens vivant dans le département de l’Artibonite, attendent avec impatience le vent impétueux annonçant l’arrivée de « Tornade 1 » de Frantz Elbé.

Notons que, la cellule d’observation de la criminalité (COC) du Centre d’analyse et de recherches en droits de l’Homme (CARDH) avait souligné dans son rapport du dernier trimestre 2022 que les régimes des sanctions adoptées par la communauté internationale avaient contribué à la diminution des cas d’enlèvement en Haïti. Ce constat est-il toujours le même jusqu’à aujourd’hui ?

Jackson Junior RINVIL

rjacksonjunior@yahoo.fr

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