Pluie de réactions après l’attaque armée perpétrée contre le juge Jean Wilner Morin
3 min readLa criminalité ne prend pas de pause en Haïti. Alors que certaines des rares instances encore fonctionnelles tentent de faire fonctionner l’État haïtien, leurs agents ne cessent de tomber sous les balles assassines. Ce 17 mai 2023, des bandits armés ont tenté d’assassiner le juge Jean Wilner Morin en route pour son travail. Depuis lors, des messages ne cessent de pleuvoir afin de prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des magistrats et des acteurs judiciaires…
Plus rien ne semble retenir les criminels. Également, personne n’est épargné. Simples citoyens en route pour leurs occupations, voyageurs, commerçants, ouvriers, avocats, grands commis de l’État, étrangers, l’insécurité frappe tout le monde, et les autorités n’arrivent toujours pas à trouver la bonne formule pour contrer ce fléau. Le 17 mai 2023, une nouvelle a envahi l’espace public haïtien, le juge d’instruction Jean Wilner Morin a failli tomber sous les balles des bandits sur la route de Frères.
Le juge Morin était en route pour auditionner l’agent exécutif intérimaire de Pétion-Ville Kesner Normil, indexé dans un dossier de corruption par l’Unité de Lutte Contre la corruption (ULCC), accusé de « passation illégale de marché public » et « prise illégale d’intérêt ». M. Morin a également la charge d’instruire plusieurs dossiers importants de corruption, dont ceux de l’ex-Directeur Général du Bureau de Monétisation des Programmes d’Aide au Développement (BMPAD) Patrick Noramé, de Romel Bell, ex-Directeur Général de l’Administration Générale des Douanes (AGD), et de la directrice de la Caisse d’Assistance Sociale (CAS), Edwine Tonton, arrêtée le 25 avril dernier suite à une audition du juge en question.
Cette tentative d’assassinat a soulevé un émoi chez plus d’un. Une Note du Réseau National des Magistrats Haïtiens (RENAMAH) portant la signature de son Président Me Loubens Élysée a condamné l’attaque contre le Magistrat. Le RENAMAH en a profité pour demander aux autorités policières et à celles du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) de « garantir la sécurité des juges », sinon « la justice aura du mal à bien fonctionner et l’impunité ne fera que gagner du terrain », a fait savoir le Président du RENAMAH.
De son côté, l’Office de Protection du Citoyen, à travers une Note, dit voir en cette scène une action « digne d’un film de gangster des années 80 ou d’attentat meurtrier terroriste de l’ère moderne » produite « à Port-au-Prince en plein jour, en pleine rue, en toute quiétude, au su et au vu de tous ». Le juge n’a pas perdu la vie simplement grâce au blindage de son véhicule.
« On ne pouvait pas s’attendre à autre chose après l’assassinat crapuleux d’un chef d’État survenu le 7 juillet 2021 en sa résidence privée. La porte de la criminalité, de la barbarie est restée grande ouverte pour laisser passer tous les criminels et hors la loi dans l’espace sociétal », a ajouté l’OPC dans cette Note.
Dans un Tweet, le Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) a exprimé également sa « profonde inquiétude face aux menaces, intimidations et actes de violence contre les policiers, les juges chargés des dossiers sensibles et les acteurs judiciaires ». « Nous encourageons les autorités nationales à prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des magistrats et des acteurs judiciaires qui travaillent dans des conditions difficiles », a indiqué le BINUH le 19 mai sur Twitter.
Sans donner la garantie de sécurité aux acteurs judiciaires, le Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) dit condamner « cet acte odieux et criminel qui ne saurait en rien interrompre l’instruction des divers dossiers que le Magistrat Morin est en train de traiter ». Le MJSP a profité « pour présenter ses sympathies au Juge Jean Wilner Morin et à tous les Magistrats de la République, tant assis que debout, et les encourage à continuer à œuvrer pour le triomphe de la Justice ». Est-ce qu’une Note de condamnation, sans aucune action concrète, sera suffisante pour assurer la sécurité des magistrats ou de tout simple citoyen ?
Clovesky André-Gérald PIERRE