À l’aube du 7 février 2021, le destin du pays demeure de plus en plus incertain
4 min readÀ moins d’un mois du 7 février 2021, l’opposition politique peine à communiquer son alternative post Jovenel Moïse. Le leadership collectif tant vulgarisé n’est toujours pas un acquis trois ans après. Du côté du pouvoir, l’exécutif planifie le reste de l’année sans tenir compte de l’article 134.2 de la Constitution haïtienne.
On est le lundi 11 janvier 2021. Un an jour pour jour depuis que le chef de l’État avait, à travers un tweet, constaté la fin de la cinquantième législature et le renvoi automatique de deux tiers du Sénat. Ce qui s’avérait normal vu la logique du décret électoral de 2015. Un an après, l’opposition politique lance le compte à rebours, en référence à l’article 134-2, pour voir Jovenel Moïse faire ses valises le 7 février 2021 et laisser le champ libre aux opposants pour instaurer la transition.
En effet, la direction politique de l’opposition attachée à l’idée d’un gouvernement de passation, à travers une note rendue publique, a fait le rappel de la velléité dictatoriale du chef de la nation. Évoquant les articles 239 et 234-2 du décret électoral et de la Constitution prétextés par le locataire du palais national pour rendre caduc le pouvoir législatif, la DIRPOD rappelle à Jovenel Moïse qu’il ne pourra pas s’opposer à la rentrée politique comme il a entravé la rentrée parlementaire en 2020. Pour montrer qu’elle ne bronche pas sur son objectif, la DIRPOD soutient que le chantier actuellement est la mobilisation intensive et l’instauration de la transition de rupture.
Les signataires ont signalé point par point les dérives du chef de l’État et les retombées de la mesure qu’il a prise. L’ex-sénateur de l’Ouest, Antonio Chéramy, qui se félicite de la démarche de l’opposition, croit que logiquement il n’y a pas chemin clandestin possible: un an après la fin du mandat de quatre ans des députés élus sous le même décret électoral que le président et, dans le même processus, le chef de l’État n’a d’autre choix que faire ses mallettes sinon, il ne sera plus capable d’intimer d’ordre à quiconque au delà du 7 février prochain.
Cap vers une dictature
Pour l’opposition, le débat est clos. Et c’est de bonne guerre si l’on s’en tient à la logique des opposants. Au delà du 7 février, on entrera dans ce que les rêveurs (dixit Jovenel Moïse) appellent un prolongement de mandat. Et là, le pays sera intégré à fond dans l’inconstitutionnalité. Les rues seront en ébullition et la vie sera banalisée moyennant que l’exécutif inconstitutionnel n’ ait décidé de bafouer le droit des gens. Un référendum sera imposé au pays, une élection aussi, ce qui envenimera la crise politique qui sent déjà mauvais. Le pouvoir très décrié (référence: la logique de l’opposition au regard de l’article 134-2) va devoir jouer sur le fil pour éviter le pire.
L’opposition ne rassure pas
À travers les réseaux sociaux, les proches de l’opposition appellent au « dechoukay », le 7 février 2021. Les chefs de file de cette structure qualifient, peut-être par mégarde, de diversion les manœuvres du chef de l’État, à travers le CEP. Pourtant, pour la première fois de son mandat, le chef de l’État parait rassuré. Il fonce tout droit vers les élections et le changement de Constitution, tandis que les opposants continuent de faire semblant qu’ils ont le contrôle de la situation.
Le danger est réel. Avec un prolongement de mandat, le pays risque gros. Avec une transition, la nation risque autant, si l’on tient compte de la fébrilité dont fait montre ce bloc politique depuis plus de trois ans. Incapable de faire boule de neige et de concentrer son énergie à bousculer comme un seul homme le chef de l’État, l’opposition en difficulté de construire une alternative laisse entrevoir une transition qui s’annonce aussi précaire que le prolongement de mandat.
L’entente inclusive, le cauchemar de tous
Vu la conjoncture et les dangers imminents, une seule porte paraît plus favorable à la nation. Celle d’un dialogue inclusif avec toutes les forces vives de la nation mais, malheureusement, bien qu’on soit au bord du précipice, les adversaires maintiennent la politique de la corde raide. L’opposition peine à s’unifier et de plus, elle ne veut pas entendre parler de dialogue incluant Jovenel Moïse. Ce dernier qui se voit même après le 7 février 2021 comme le président démocratique, constitutionnel et légitime, ne montre aucune volonté de revoir sa position. Le passage en force est sa seule priorité.
Daniel Sévère