Ariel Henry : « Une transition ne peut pas déboucher sur une autre transition »
4 min readAprès plus de deux ans et demi à la tête d’un Gouvernement de transition, le Premier Ministre Ariel Henry ne parvient toujours pas à faire démarrer la machine. Le dialogue, la condition sine qua non selon lui pour lancer un processus électoral reste aujourd’hui encore utopique, mais l’homme fort de l’administration publique haïtienne entend garder le pouvoir jusqu’à l’organisation d’élections.
« Le travail principal d’un Gouvernement de transition est de créer les conditions d’organisation des élections afin de redonner au peuple haïtien sa souveraineté, son droit de choisir les femmes et les hommes qui devront diriger le pays », a déclaré le Dr Ariel Henry dans son discours du 7 février 2024, alors que des voix continuent à s’élever pour exiger le départ d’un Gouvernement qui, selon elles, est en échec.
Pour le chef du Gouvernement, la transition doit nécessairement se terminer par l’élection d’un nouveau personnel à la gestion de l’État. « Dès mon premier jour comme Premier Ministre, j’ai commencé à parler à tout le monde. Que ce soit les partis politiques, le secteur privé, le secteur syndical, la société civile, les organisations populaires… Je l’ai toujours voulu, et je continuerai à chercher à rassembler tous les Haïtiens qui sont pour l’avancement de ce pays », a-t-il déclaré.
Cependant, les différentes tentatives peinent à aboutir aux résultats escomptés. Le 1er novembre 2023, dans un entretien, la Présidente du Haut Conseil de Transition, Mirlande H. Manigat avait parlé de « l’impasse politique » qui empêche le Gouvernement d’appliquer l’Accord du 21 décembre. Parallèlement, les différentes tentatives de la communauté internationale ont également échoué à créer un consensus entre les différents protagonistes.
L’insécurité persiste
Que ce soit dans l’organisation des élections ou dans la garantie d’un climat de sécurité, les résultats peinent à venir… Pour ce mois de janvier 2024, le nombre des victimes de la criminalité dans le pays a atteint de nouvelles proportions selon le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme à Genève ce vendredi. Ce ne sont pas moins de 806 personnes qui ont été tuées, blessées ou kidnappées en ce premier mois de 2024, ainsi que 300 présumés membres de gangs armés, ce qui porte le total à 1 108 personnes, parmi elles des policiers.
Ces informations n’échappent pas au Premier Ministre Ariel Henry qui, dans ses allocutions du 7 février dernier, a tenu à exprimer ses « sympathies à toutes les personnes victimes de violences ces derniers jours ». Selon lui, la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité approuvée par le Conseil de Sécurité devrait contribuer à l’atteinte de résultats crédibles.
« Le Gouvernement avait demandé aux pays amis d’Haïti un coup de main pour nos forces de sécurité afin de combattre les gangs et endiguer l’insécurité. Le Kenya avait accepté la mission. Je veux rassurer tout le monde que le Gouvernement fait tout son possible pour que cette mission arrive rapidement. Mais en attendant, nous faisons beaucoup d’efforts pour renforcer la capacité d’intervention de toutes nos forces de sécurité légales », a-t-il déclaré avant d’affirmer que « nous aurons à constater les résultats ».
Mais entretemps, la situation ne cesse de détériorer. Le rapport du Secrétaire Général de l’ONU au Conseil de Sécurité pour le compte du BINUH le 15 janvier dernier a fait état d’une Police Nationale largement dépassée. « Les effectifs de la police ont continué de diminuer à un rythme alarmant. En 2023, 1 663 agents de la police, dont 152 femmes, ont quitté l’institution. Au cours de la même période, 48 agents ont été tués et 75 blessés », peut-on lire dans ce rapport.
Malgré les efforts déployés par les agents de la PNH sur le terrain, « la capacité de l’institution de lancer des opérations de lutte contre les bandes reste limitée ». « Seuls 21 des 47 véhicules blindés étaient opérationnels au 15 novembre et 19 ont été gravement endommagés au cours d’opérations de lutte contre les bandits ou sont tombés en panne et nécessitent des réparations majeures. Les sept autres ne sont pas réparables », a indiqué le BINUH. De son côté, l’unité temporaire antigangs « manque encore largement de ressources et de personnel et se heurte à des lacunes concrètes en matière de planification opérationnelle et de gestion des ressources disponibles », toujours selon ce rapport.
Alors que le Gouvernement peine à progresser, l’opposition continue de se renforcer avec cette nouvelle alliance entre l’ancien chef rebelle et putschiste anti-Aristide et l’ex-sénateur Moïse Jean-Charles, dessinant un schéma des plus inquiétants pour le Premier Ministre Ariel Henry toujours en quête de son « dialogue ».
Clovesky André-Gérald Pierre