Covid-19 : autoriser le secteur privé à importer les vaccins rendra le contrôle beaucoup plus difficile, selon Pierre Hugues Saint-Jean
3 min readL’Association des Pharmaciens Haïtiens (APH) conteste la décision du ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP) d’autoriser le secteur privé à importer les vaccins contre la Covid-19. Dans une interview accordée au journal Le Quotidien News le président de l’association, Pierre Hugues Saint-Jean, qualifie cette décision d’irresponsable et de dangereuse.
Dans une note datant du 27 juin 2021, l’APH dénonce cette décision prise par l’administration en place. Selon l’association, s’il est vrai que la population doit se faire vacciner pour se protéger de cette deuxième vague de la pandémie qui s’avère assez dangereuse, cette vaccination ne doit pas non plus être confiée au secteur privé parce que cela pourrait être dangereux. En effet, si les vaccins peuvent protéger contre des maladies infectieuses, le contrôle et la distribution ne sauraient être livrés au hasard.
Parmi les risques auxquels cette possibilité accordée pourrait exposer la population, il y a celui de la contrefaçon. Selon Pierre Hugues Saint-Jean, il n’est pas toujours évident de détecter les faux vaccins et les faux médicaments. Par contre, il est possible de réduire les risques en contrôlant les papiers, le certificat d’analyse du produit et le certificat d’autorisation de fonctionnement du laboratoire. Toutefois, le président de l’APH estime que ces contrôles sont préliminaires et il serait mieux d’avoir le produit afin d’effectuer un contrôle physique et chimique, ce qui est difficile dans le cas d’Haïti parce que le pays ne dispose pas de tels laboratoires.
Selon l’Association de Pharmaciens Haïtiens, l’Organisation internationale de la police criminelle (INTERPOL) a annoncé avoir saisi des milliers de vaccins anti-Covid-19 contrefaits. Cette situation aurait poussé le directeur général de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) à encourager les gens à ne pas utiliser des vaccins anti-Covid-19 en dehors des programmes de vaccination par l’État.
L’inquiétude de l’APH réside dans le fait que les circuits de distribution de produits pharmaceutiques ne sont pas contrôlés par l’État et que cela expose le pays à un risque élevé d’introduction de faux vaccins sur le territoire national. « Si la distribution est laissée au secteur privé, ce seront eux qui décideront où ils iront se procurer ce vaccin dans de multiple sources d’approvisionnement. Le contrôle sera alors plus difficile », déclare Pierre Hugues Saint-Jean.
L’association estime que cette décision pourrait rendre inéquitable l’accès aux vaccins à la population. En effet, la vaccination devrait concerner toute la population haïtienne, peu importe la catégorie à laquelle un citoyen appartient. Toutefois, l’APH estime que toute la population n’aura pas les moyens de s’en procurer via le secteur privé puisque le coût des vaccins en question sera exorbitant.
Aussi, pour le président de l’association, cette décision n’a aucune pertinence et est anormale. Il estime aussi qu’elle est irresponsable puisque les enjeux et les risques qu’elle contient sont trop élevés et sont défavorables à la population. « Le MSPP doit prendre ses responsabilités et s’assurer que des vaccins de qualité soient disponible pour tous, de façon équitable », déclare-t-il. Il ne reste plus qu’à voir si le ministère restera sur sa décision ou s’il décidera de la revoir.
Ketsia Sara DESPEIGNES