C’est la dégénérescence totale suite à l’installation du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) à la tête du pays. Tous les indicateurs économiques sont au rouge. Les bandits armés continuent de s’ériger en maîtres des lieux dans plusieurs quartiers de Port-au-Prince et de l’Artibonite. Dans moins de trois mois, le mandat du CPT arrive à son terme et certains acteurs politiques plaident déjà pour une nouvelle transition.
Alors que le pays approche de l’échéance du 7 février 2026, de nombreuses voix issues de la société civile et de la classe politique réclament le départ du CPT. En revanche, certains acteurs de la vie nationale s’inquiètent de la période post-CPT, craignant qu’Haïti ne connaisse le même sort sociopolitique et économique avec un éventuel successeur de ce conseil en place.
Pour Ulysse Jean Chenet, coordonnateur du Mouvement Point Final, se réunir autour d’une table de concertation afin de discuter de l’avenir du pays serait la meilleure solution. En l’absence d’un tel dialogue entre les acteurs politiques et les élites nationales, Haïti risque de sombrer dans le chaos, prévient-il lors d’une interview accordée à Le Quotidien News le 6 novembre 2025.
Au départ, M. Chenet pense qu’« on ne pourra pas organiser d’élections dans le pays sans d’abord résoudre la crise sécuritaire, d’une part à cause des gangs armés qui contrôlent deux tiers des circonscriptions électorales, et d’autre part, sans un véritable accord politique ».
En ce qui concerne la succession du CPT, plusieurs stratégies se dessineraient déjà, selon M. Chenet. « L’Occident cherche à maintenir son hégémonie sur Haïti en installant un nouveau dirigeant favorable aux Blancs, ou du moins, en conservant un membre du CPT, voire le Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé au pouvoir », explique-t-il.
« Il y a les gangs armés regroupés au sein du groupe Viv Ansanm et de leurs alliés, qui veulent s’emparer du pouvoir par tous les moyens, y compris par un coup d’État », a-t-il fait savoir, en ajoutant par ailleurs qu’« il y a des éléments de la classe politique haïtienne, d’orientation plus nationaliste, qui proposent une alternative viable et louable pour résoudre la crise avant le 7 février 2026 : recourir à la Cour de cassation pour désigner un juge parmi ceux régulièrement nommés ».
L’échec du CPT symbolise-t-il l’échec de la classe politique haïtienne ?
À cette question, Ulysse Jean Chenet apporte une réponse nuancée, en deux volets. Selon lui, on peut effectivement parler d’un échec de la classe politique dans la mesure où « les élites politiques du pays ont contribué à la mise en place du CPT ». Cependant, il nuance son propos en affirmant que « les partis politiques représentés au sein du CPT avaient déjà échoué dans la vie politique haïtienne ». À l’en croire, ces partis ont contribué à plonger le pays dans la situation chaotique dans laquelle il se trouve.
« Qu’il s’agisse des partis aux racines macoutiques issus de la dictature des Duvalier, de ceux de la mouvance lavalassienne ou encore des acteurs du mouvement GNBiste, tous ont simplement cherché à profiter de la transition post-assassinat du président Jovenel Moïse pour se refaire une santé économique. Ils n’ont jamais eu la volonté de résoudre la crise haïtienne, mais seulement de s’enrichir. Le grand perdant dans tout cela, c’est le peuple haïtien, qui vient de perdre cinq années de plus après l’assassinat du président Moïse, soit dix années de gabegie politique », a-t-il martelé.
Aussi, faut-il préciser que c’est le même son de cloche du côté de Stevenson Telfort (alias A.T.R.O.S.), mémorant en sciences politiques qui participait à l’émission «45 Minit Pou Yon Envite» du journal Le Quotidien News présentée par Cluford Dubois (Le Grand Dubois). M. Telfort a déclaré que la classe politique haïtienne actuelle a échoué. Le pire, selon lui, c’est qu’elle refuse de reconnaître cela.
« Les partis et organisations politiques à l’origine du CPT doivent admettre qu’ils ont échoué. Ils n’ont jamais priorisé les intérêts du pays, mais ceux de leurs clans », M. Telfort le 4 novembre 2025. Face à cette situation, l’homme qui a aussi un chapeau d’artiste appelle la jeunesse à prendre ses responsabilités, estimant que « les dirigeants du pays ont gâché l’avenir de nombreux jeunes Haïtiens ». « La jeunesse est la première victime de la mesquinerie de nos dirigeants », a-t-il affirmé.
Échéance du 7 février 2026
Selon M. Telfort, « au lendemain du 7 février 2026, le pays doit avoir un président et un premier ministre », propose-t-il en tant que citoyen engagé. Il estime que la personne la plus apte à succéder aux conseillers présidents serait le magistrat Jean Wilner Morin, qu’il décrit comme un homme « honnête ».
Par ailleurs, M. Telfort tient à dénoncer le CPT qui, selon lui, « n’a respecté aucun point de l’accord du 3 avril 2024». Il estime en ce sens que si le Conseil Présidentiel de Transition n’est pas en mesure de respecter cet accord, cela laisse présager qu’il ne respectera pas non plus l’échéance du 7 février 2026. « Ce CPT fera tout pour rester au pouvoir au-delà du 7 février 2026 », prévient-il, avant d’en appeler une nouvelle fois à la jeunesse haïtienne pour qu’elle prenne ses responsabilités.
Jackson Junior RINVIL
