Intervenant sur les ondes de Sans-souci FM à l’émission « Causerie Matinale, l’économiste et politologue, Joseph Harold Pierre a fait le diagnostic de la conjoncture Haïtienne. Lors de son intervention, il a souligné le rapport étroit entre la croissance économique négative d’Haïti et l’aggravation sécuritaire. Il a précisé par ailleurs que tout est corollaire de la gestion politique du pays mettant au pilori les élites nationales, particulièrement les politiques qui ne manifestent aucune volonté pour corriger la situation.
L’économiste Joseph Harold Pierre n’a pas mâché ses mots. Cela fait six ans depuis que la croissance économique du pays est négative, a-t-il expliqué. C’est dû non seulement à la pérennisation de l’insécurité sur le territoire national, mais aussi à d’autres facteurs, dont l’absence de concurrence dans le pays, le manque de volonté de l’État de procéder à des réformes importantes, l’institutionnalisation de la corruption, le refus Haïtien d’intégrer une économie de marché, etc. Selon Joseph Harold Pierre, il est quasi impossible que le pays se développe sans l’investissement étranger car, dit-il, le secteur privé Haïtien n’a pas les moyens financiers suffisants pour soutenir ce poids. Pour lui, c’est dommage que la diplomatie Haïtienne qui devait entreprendre cette démarche ne connaît même pas sa mission.
D’après l’économiste, le PIB Haïtien estimé à 14 milliard de dollars représente approximativement la recette fiscale de la République voisine. Toutefois, M. Pierre n’a pas classé dans le tiroir de l’impossible une relance économique. Pour ce faire, il recommande, l’amélioration de la condition sécuritaire d’Haïti au moins à 50%. Autre condition sinequanon, selon Joseph Harold Pierre est l’émergence à la tête du pays d’une autre classe politique constituée de personnalités crédibles, patriotes et compétentes. Pour lui, tout n’est pas fini. Il y a encore de l’espoir mais cela prendra du temps.
Budget de guerre pour le rétablissement de la sécurité : un trompe œil
L’économiste Joseph Harold Pierre ne se fait pas d’illusion. Il dit croire dire comme fer que la relance économique doit nécessairement passer par le rétablissement de la sécurité. Sur ce point, il a dressé un tableau sombre montrant le manque de volonté des hommes au pouvoir qui le cessent de berner la population. Annonçant un budget de guerre pour faire face à l’insécurité, le politologue montre la mauvaise foi des dirigeants qui, selon lui, peinent à envoyer le premier signal. « La première chose que l’État aurait dû faire, ce sera de montrer une minimum de volonté, ne serait-ce qu’en montrant une revalorisation du budget des forces de l’ordre (la Police Nationale d’Haïti et les Forces Armées d’Haïti) et en envoyant des signaux fort en commençant par traquer les bras financiers des gangs.
Dommage, regrette M. Joseph Harold Pierre que le budget rectificatif annoncé comme un budget de guerre, l’argent allouer à la PNH n’a pas été revu à la hausse. « Pour l’année fiscale en exercice, le budget de la PNH était de 30 millions de Gourdes. Dans le budget rectifié, il sera de 28 millions de Gourdes. De surcroît la composition du budget n’a pas changé », déplore-t-il soulignant qu’en terme d’investissement, le budget des Forces Armées d’Haïti (FAD’H) est de zéro gourdes depuis 2019.
Le gangstérisme en Haïti: l’État Haïtien entre complicité et incapacité
S’agissant de l’insécurité, le politologue craint le pire. Pour lui, elle n’atteint pas encore son paroxysme. Elle peut s’aggraver, déplore-t-il. Ce qui pourrait arriver devrait être plus grave, ajoute-il soulignant que l’État est le principal responsable de cette situation. M. Harold très sceptique quant à la volonté des dirigeants, dit croire que, par rapport aux équipement que détiennent les gangs et la manière dont ils progressent, ils font preuve de plus de capacité à sécuriser la nation arguant que l’État Haïtien, à son avis, n’existe pas.
» L’État Haïtien est le propriétaire des gangs. Il est le principal responsable des gangs. Ils étaient des armes précieuses utilisées par l’État. Il n’y a jamais eu de volonté de combattre les terroristes et, la PNH est aujourd’hui dépassée « , a-t-il affirmé ajoutant que ce fléau est aussi une incidence de l’inégalité criante qui sévit dans la société, de la misère et de la vulnérabilité populaire. Sans utiliser la langue de bois, le politologue a fustigé le CPT qui, selon lui est impliqué jusqu’au cou dans la corruption.
« le secteur privé des affaires n’est pas moins innocente que le secteur politique. Néanmoins, tout ce qui intéresse les acteurs politiques, c’est le vol car, le plus grand vertu de ces derniers en Haïti est la corruption », a-t-il conclu.