Élections en Haïti : la classe politique haïtienne réagit aux menaces de Washington
4 min readIngérence, atteinte à la souveraineté, violation du traité de Vienne, divers termes sont employés par des personnages influents du milieu politique haïtien pour qualifier la mise en garde des Etats-Unis à ceux qui auraient l’intention de s’opposer à la tenue des élections. En effet, à travers des tweets, des déclarations dans la presse ou des notes acheminées aux médias, des leaders politiques et petro challengers ont réagi pour condamner l’intervention de l’Ambassade Américaine.
Le leader du Parti Pitit Desalin, Moise Jean Charles dit condamner cette ingérence des Etats-Unis dans les affaires nationales. « Les interventions américaines dans les affaires d’Haïti nous amènent tout droit vers l’abime », a souligné l’ex-sénateur du Nord, indiquant que depuis des lustres, le pays de Donald Trump oriente la vie politique et économique d’Haïti. Plus loin, Moise Jean Charles indique que les haïtiens, évoluant sur le territoire national ou dans la diaspora, ont finalement décidé de prendre leur destin en main.
« Nous aussi, nous dénonçons ces types d’ingérence », a réagi Clarens Renois de l’Union Nationale pour l’Intégrité et la Réconciliation (UNIR) tout en reconnaissant que les haïtiens ont ouvert la voie à ces interventions étrangères. « En tant que démocrate, nous savons pertinent qu’il nous faut organiser des élections, mais elles doivent avoir lieu dans de bonnes conditions », a-t-il indiqué. Clarens Renois invite les responsables à agir autrement dans la recherche de solutions aux maux d’Haïti. « Nous lançons un appel aux autorités en place qui doivent développer cette capacité à nous mettre ensemble afin de résoudre nos propres problèmes au lieu de recevoir des ordres d’une autre puissance.
L’ancien député de Marigot, Deus Deronneth lui, va plus loin dans ses commentaires. À part l’ingérence, il décèle la haine et le racisme « À travers ce message du département d’État, nous pouvons voir la haine des Américains contre le peuple Haïtien. Dans la dernière position de l’ambassade américaine: leur raciste prend le dessus au-delà de leurs frontières », a écrit l’ex-parlementaire hier, sur son compte twitter. Il s’agit d’une attaque contre la démocratie haïtienne, la souveraineté du pays, estime Deus Deronneth qui parle d’appui des autorités américaines à la corruption et aux crimes.
Pour sa Part, le groupe « Nou Pap Dòmi », à travers une note publiée, le vendredi 18 septembre 2020, se dit choqué par la mise en garde lancée par les américains. « Comment des élections libres, honnêtes et démocratiques peuvent-elles se tenir avec un pouvoir qui est illégitime, décrié, corrompu qui viole la loi, crée l’insécurité, et s’attaque aux institutions ? », s’interrogent les petro challengers. Ces derniers dénoncent le support du gouvernement américain à ce régime anti-démocratique aux pratiques arbitraires et opaques. Ils invitent donc le Département d’Etat à respecter le traité de Vienne et à reconnaitre les effets de son influence sur ledit régime. Nou Pap Dòmi appelle aussi le peuple haïtien à rester ferme sur sa position et à ne pas se laisser intimider.
De son côté, le porte-parole du Secteur Démocratique et Populaire (SDP) Me André Michel, minimise les menaces brandies par l’Amérique. « S’ils veulent infliger des sanctions, qu’ils le fassent, nous n’irons pas aux élections avec Jovenel Moise, ce qui est important c’est la transition », a-t-il soutenu. L’opposant farouche à l’équipe en place dit vouloir continuer sa lutte pour la délivrance du peuple haïtien, soutenant qu’aucun ambassadeur étranger ne peut s’immiscer dans la vie politique des pays occidentaux notamment celle des Etats-Unis. « Il est temps que la communauté internationale et l’Ambassade Américaine comprennent qu’elles doivent aider, à leur niveau, à réussir une véritable transition » insiste l’homme de loi en décrivant la sombre la situation d’Haïti.
Dans la soirée du mercredi 16 septembre, l’Ambassade Américaine avait rendu public, via twitter, un message du Département d’Etat : « Une démocratie q fonctionne bien exige q toutes les branches du gouv., y compris le parlement, d jouer leurs rôles. Ns encourageons les parties prenantes d’#Haïti à accomplir leur travail & à former un @cep_haiti comme prévu dans sa constitution ». Ils ont ajouté, ce qui suit, dans un second tweet : « Haïti doit faire son travail et former un nouveau @cep_haiti avec des membres ayant une réputation d’intégrité, d’honnêteté et de compétence pour organiser un processus électoral libre et juste. Il y a des conséquences pour ceux qui y font obstacle ».
Ce message du Département d’Etat a été publié quelques heures après l’annonce faite par Joseph Jouthe sur la constitution du Conseil Electoral Provisoire, à l’espace « Invité du jour » de Radio Vision 2000. « L’arrêté nommant les 9 membres du Conseil Electoral Provisoire sera publié incessamment », a annoncé le premier ministre Jouthe. Si l’on en croit les propos du président du Conseil Supérieur de la Police Nationale (CSPN) ,les élections peuvent se tenir dans n’importe quel contexte. Ce sont les compétiteurs qui réalisent les élections et non le gouvernement, a confié Joseph Jouthe, lors de cette entrevue réalisée avec le Journaliste Valery Numa.
Marc Andris Saint-Louis