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Fermeture des frontières haïtiano-dominicaines : Quels sont les enjeux économiques pour Haïti ?

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Les frontières haïtiano-dominicaines sont fermées. Les liens commerciaux entre les deux pays partageant l’île sont suspendus. L’opinion publique estime qu’Haïti devrait profiter de cette situation pour relancer sa production agricole. À cet égard, les économistes Etzer Emile et Kesner Pharel proposent des éléments de réponse sur lesquels les autorités de l’État doivent mettre l’accent pour faire de ce « conflit » une opportunité pour Haïti.

À en croire l’économiste Kesner Pharel,  c’est une illusion de prétendre qu’une prise d’eau va irriguer nos terres d’une part et permettre d’autre part, l’augmentation de notre production nationale et,  penser à partir de ce moment, que les Haïtiens n’auront plus besoin de se rendre en République Dominicaine. En conséquence, cela aura un impact sur la quantité des produits importés dans la partie l’Est de l’île. « Ce n’est pas de cette manière qu’on procède », affirme-t-il en guise de réponse à l’ancien Ministre des Travaux Publics, Transports et Communication ( MTPTC)  Joacéus Nader qui faisait une réflexion similaire au micro de la presse.

« Pour relancer la production agricole d’un pays, il faut mettre en place une politique agricole soutenue par une politique d’infrastructures », déclare l’économiste Pharel. « Il faut une combinaison entre l’eau, la capitale physique et des équipements mécaniques. Nous devons faire de l’agriculture de manière moderne et investir dansle capital humain en termes de formation », estime le Président et le Directeur Général du Group croissance S.A.

En ce qui concerne le capital physique, il a fait savoir qu’il est considéré comme l’un « des facteurs de production, c’est-à-dire un des moyens de production avec le travail, les matières premières, les terres […] qui permettent de produire ». M. Pharel ajoute qu’il diffère de ce qu’on appelle le « facteur capital technique qui, lui, regroupe les biens ou services qui peuvent être utilisés lors de plusieurs cycles de production car ils ne sont pas détruits au cours d’un de ces cycles. Il s’agit des machines, des outils, des matériels de transport ».

Pour le professeur Etzer Emile, la relance de la production agricole est beaucoup plus complexe. « C’est un combat que nous devons prendre au sérieux. Et cela va exiger de nous de mettre de l’ordre dans les douanes, de repenser le budget et rétablir un climat sécuritaire à travers le pays », dit le professeur d’université lors de son émission « Éducation Économique»  en précisant que la relance de la production agricole ne se résume pas uniquement à la production des bananes ou des pommes de terre. « Nous devons également produire des produits agro-industriels. Car ils sont en majeure partie des produits que nous consommons en Haïti, comme par exemple : spaghetti, hot-dog », précise-t-il.

À en croire le natif de Cavaillon, il faut des industries pour pouvoir produire les produits agro-industriels. Et nous avons ces industries, ainsi que les ressources humaines nécessaires en Haïti, dit-il. « À côté de tout cela, il nous faut un environnement approprié », poursuit-il tout en précisant que c’est de cette façon qu’on peut donner une réponse à la République Dominicaine.

Les produits importés par Haïti chaque année s’élèvent à 1.5 milliards de dollars. Et un tiers de ces produits arrivent en provenance de la République Dominicaine, mais aussi des États-Unis, informe le professeur Emile. Selon lui,  nous devons diversifier nos partenaires commerciaux afin de réduire la dépendance avec la République Dominicaine et les États-Unis.

Les défis de l’agriculture en Haïti

L’un des défis auxquels fait face l’agriculture en Haïti se résume dans le fait que la majorité des terres de production de nourriture n’a pas un système régulier d’irrigation, explique l’économiste. « La réussite de la récolte des agriculteurs dépend en grande partie de la saison pluvieuse.  S’il y a de la pluie régulièrement cela peut provoquer l’inondation. Cependant, s’il y en n’a pas, c’est la sécheresse », indique-t-il, en pointant du doigt l’État haïtien qui n’arrive pas à irriguer suffisamment de terres pour aider les agriculteurs dans la relance de la production agricole.

Luis Abinader : une réponse disproportionnée

Il y a de l’excès dans les réponses de Luis Abinader par rapport à la construction du canal sur la rivière Massacre, estime-t-on. À cela, il y a deux explications. « Luis Abinader arrive en deuxième position dans un sondage récent sur les élections à venir en République Dominicaine. En conséquence, il est en difficulté dans son pays. De plus, il y a une augmentation du prix des produits de première nécessité », analyse le professeur  Emile.

Selon lui, Luis Abinader utilise la question de la construction du canal sur la rivière Massacre pour détourner l’attention des Dominicains sur les vrais problèmes de la République Dominicaine. « Puisque les élections sont prévues dans les 8 mois à venir, Luis Abinader essaye de tout faire pour que les Dominicains puissent avoir une bonne perception de lui. Ce faisant, il décide de fermer les frontières haïtiano-dominicaines », déclare l’économiste Emile en soulignant par ailleurs que la fermeture des frontières haïtiano-dominicaines fera beaucoup de mal à la République Dominicaine qu’à Haïti.

Jackson Junior RINVIL

rjacksonjunior@yahoo.fr

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