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Haïti : détention carcérale au mépris des droits humains

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Si l’insécurité alimentaire touche près de la moitié de la population haïtienne, elle n’épargne aucunement la population carcérale. Entre la détention préventive prolongée et les mauvaises conditions matérielles, la détention carcérale s’érige en enfer dans le pays.

Ce lundi 21 juin 2022, le Commissaire du Gouvernement près du Tribunal des Cayes a, lors d’une conférence de presse, annoncé que neuf prisonniers sont décédés à cause de l’augmentation de la température dans les cellules, et du manque de soins. Pour cette prison civile des Cayes qui accueille 900 prisonniers, les cellules atteignent jusqu’à 80 détenus. Me Ronald Richemond, Commissaire du Gouvernement, a rappelé que la prison est en manque d’eau et de nourriture, et appelle à l’aide.

De plus, les détenus ne semblent plus avoir le droit de quitter leurs cellules, pour des raisons de sécurité. « Lors du séisme du 14 août, deux cellules ont été frappées et le grand mur de la prison a été détruit. En vue d’éviter une éventuelle évasion, les responsables de ce centre carcéral sont obligés de garder les détenus dans leur cellule », a expliqué Me Ronald Richemond.

Le BINUH et son rapport au Secrétaire Général de l’ONU

Dans son rapport daté du 13 juin 2022, le Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti a exprimé ses préoccupations et a fait ses constats en ce qui a trait aux conditions carcérales du pays. « Les prisons haïtiennes restent surpeuplées, insalubres et mal entretenues. Le manque de nourriture, d’eau, d’installations sanitaires, de médicaments essentiels et de matériel médical adéquat a des répercussions négatives sur la santé physique et mentale des personnes détenues. Les pénuries alimentaires sont particulièrement préoccupantes, car la plupart des décès dans les prisons sont liés à la malnutrition ; 54 cas de ce type ont été signalés rien qu’entre janvier et avril », lisait-on dans ce rapport.

« La situation a continué de se détériorer dans les prisons haïtiennes, les autorités ayant du mal à fournir deux repas par jour aux prisonniers, faute de financement adéquat. Au 1er juin, le taux d’occupation global des prisons haïtiennes était de 287,77 %. Les prisons comptaient au total 11 531 détenus, dont 405 femmes, 247 garçons et 19 filles, dont 9 549 (82,81 %) étant en attente de jugement », avait fait savoir ce rapport.

L’annonce de l’ouverture prochaine d’une nouvelle prison à Petit-Goâve qui devrait accueillir 400 détenus pourrait faire baisser légèrement la surpopulation carcérale dans le pays, toujours selon le rapport. Pour la représentante du Secrétaire Général de l’ONU et cheffe du BINUH Helen R. Meagher La Lime, le Gouvernement doit réagir. « En outre, j’exhorte le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour trouver une solution plus durable aux problèmes d’accès à la nourriture, à l’eau et aux médicaments dans les prisons », a-t-elle recommandé dans ce rapport.

Toutefois, il faut rappeler que le BINUH n’est pas à son premier rapport sur les conditions pénitentiaires en Haïti. En effet, en juin 2021, dans un article  intitulé « Haïti : des conditions de détention inhumaines exigent une action urgente, selon Michelle Bachelet », l’Organisation des Nations Unies avait publié des éléments d’un rapport du Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti et du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme sur les conditions de détention qui sont inhumaines.

« Le rapport explique comment, dans certains cas, jusqu’à 60 personnes sont entassées dans des espaces d’à peine 20 mètres carrés, sans pouvoir s’allonger sur le sol pour dormir. Certaines cellules sont dépourvues de fenêtres, laissant les détenus dans l’obscurité pendant des heures ; et l’absence de latrines obligent les prisonniers à faire leurs besoins dans des seaux. En outre, les détenus sont souvent maintenus dans leurs cellules pendant près de 24 heures, soit par manque de cour d’exercice, soit par mesure de sécurité », lit-on dans cet article.

« Selon le rapport, des traitements cruels, inhumains et dégradants sont couramment utilisés comme mesures disciplinaires dans toutes les prisons visitées, y compris les enfants. Parmi les détenus interrogés, 27,9% ont déclaré avoir été maltraités par des agents pénitentiaires ou par des détenus avec acquiescement des gardiens, et 44,5% ont dit avoir été témoins de mauvais traitements », poursuit-il. Les rapports pleuvent, les données sont là, mais l’action se fait encore    désirer.

Par ailleurs, faut-il le signaler, entre le mercredi 22 et le jeudi 23 juin 2022, deux (2) détenus sont passés de vie à trépas à la Prison Civile de Jacmel dans le département du Sud-Est.

Clovesky André-Gérald PIERRE

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