mar. Avr 23rd, 2024

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Jeu dangereux!

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La crise s’accentue en Haïti. À présent, ce sont les agents de la Police Nationale d’Haïti (PNH) qui ébranlent les fondements de la société. Qui répètent les actions qu’ils ont toujours réprimées. C’est terrible et le pays risque gros.

En fait, cette situation arrive dans un contexte où la PNH fait profil bas face aux actions des bandits. Dans un contexte où le quota des policiers est de 1.2 pour mille habitants. À un moment où beaucoup de sous-commissariats sont abandonnés et contrôlés par les gangs armés. Dans un contexte où les gangs ont fait des policiers leurs cibles de prédilection. Dans une période où l’effectif policier est réduit considérablement soit par des défections, des sanctions, des agents assassinés, entre autres. À un carrefour où incapable de contrecarrer les bandits, l’Exécutif fait appel à une intervention militaire étrangère.

On peut toujours dénoncer la politisation de l’institution policière. Les liaisons de certains agents avec les groupes terroristes. Néanmoins, la Police reste et demeure encore une institution qui inspire une certaine crainte aux groupes armés. Malgré leurs faibles moyens et le manque de volonté de certains cadres de cette institution, les policiers font de leur mieux pour remplir leur mission.

C’est un secret de polichinelle que toutes les conditions étaient réunies pour que les policiers se rebellent. Hormis les problèmes logistiques et administratifs, le sentiment d’être systématiquement envoyés à la boucherie est une source de démotivation importante. Le laxisme du Haut commandement de la PNH et du Conseil Supérieur de la Police Nationale (CSPN) affaiblit davantage ce corps armé détenteur du pouvoir coercitif légal. Le massacre du 12 mars 2021 avait constitué un mauvais précédent. Le mouvement des « fantom 509 » également. S’ensuivent tous les massacres écœurants dont sont victimes les policiers dans l’exercice de leurs fonctions.

Depuis le 26 janvier 2023, les nerfs sont à fleur de peau. Les policiers ont exploité l’assassinat de sept des leurs pour déclencher ce mouvement. Ils ont attaqué l’aéroport Toussaint Louverture. Ils ont fait irruption dans la résidence du Premier Ministre. Certains ont déserté leurs commissariats. Ils ont investi la Direction Générale de la Police nationale. Plus de dix prisonniers ont été tués aux Gonaïves en essayant de s’échapper de leurs cellules. D’autres se sont pour l’heure évaporés dans la nature. Armes à la main, les policiers courent les rues, terrorisant la population.  À Léogâne, on compte des morts civils.

Tout cela est dû à une sorte de rupture de confiance. Une rupture de confiance que les autorités ont entretenues sans se rendre compte de l’ampleur des dégâts que cela pourrait engendrer. On est, dommage, à une phase où l’institution est au bord de l’implosion. Où les policiers, auxiliaires de la justice, protecteurs des vies et des biens,  sont en train de violer tous les interdits et se comportent comme de simples citoyens. C’est la totale anarchie. On avait eu assez de temps pour anticiper cette situation. Maintenant que la plaie est infectée, quel est le sort de la population en proie à toutes sortes de difficultés et de misères ? Qui limitera les gangs disséminés partout ? Quel regard auront les dirigeants sur les policiers membres des gangs qui pourraient infiltrer ce mouvement ? Qu’est-ce qui peut arriver quand on sait qu’il y a des risques lorsque les policiers s’affrontent ? Quelle garantie a une autorité établie qu’elle ne sera pas surprise par des agents qui sont en désaccord avec elle ? Nous sommes en train de jouer à un jeu très dangereux. C’est peut-être la partie du jeu la plus dangereuse que nous n’avons jamais expérimentée.

Daniel SÉVÈRE

Danielsevere1984@gmail.com

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