La communauté internationale sème la confusion : Jovenel Moïse et l’opposition en quête d’un meilleur positionnement
4 min readLes récentes prises de position de la communauté internationale notamment celle du gouvernement américain prêtent à équivoque. Plus d’un prédit un virage dans un contexte où l’opposition essaie d’améliorer son rapport avec l’extérieur. En attendant, le chef de l’État, Jovenel Moïse, envoie le signal d’un conquérant dans son propre pays.
En l’espace de deux semaines, le gouvernement américain a pris des positions qui laissent croire à un virage en douceur. De défenseur orthodoxe du régime qu’il représentait, il fait dorénavant cap sur la protection des droits humains et le respect des principes démocratiques en Haïti. Et, c’est dans cette veine qu’il a préalablement annoncé un examen exhaustif de la décision du président haïtien concernant les juges avant de se positionner clairement. Une semaine après, le gouvernement américain informe qu’il ne se taira pas quand la société civile et les institutions démocratiques sont attaquées.
Après avoir tenu un discours en faveur de l’organisation des élections, les USA semblent finalement ouvrir les yeux et voir plus claire. En guise de « nous encourageons la tenue des élections dès que cela soit techniquement possible », on passe à une position plus musclée. « Les USA ne resteront pas de glace quand les institutions démocratiques et la société civile sont attaquées. Nous condamnons toutes les tentatives pour affaiblir la démocratie par la violence, la suppression de la liberté civique ou via des intimidations », écrit l’ambassade le 17 février 2021.
« Je suis préoccupée par les actions autoritaires et non démocratiques, des nominations et retraits unilatéraux des juges de la Cour suprême, aux attaques contre des journalistes. Le respect pour les normes démocratiques est vital et non négociable », précise l’ambassadrice américaine accréditée à Port-au-Prince dont le nom a été gravé sur les diverses pancartes des manifestants le 14 février dernier. Durant ces manifestations, les protestataires étaient excessivement remontés contre la diplomate américaine qui, selon eux, est de mèche avec le président décrié. Les slogans des manifestants étaient très hostiles à l’ambassadrice américaine en Haïti.
Jovenel Moïse toujours confiant malgré tout
Le chef de l’État ne s’inquiète guère. Il essaie de profiter davantage des jours qui lui restent au pouvoir pour continuer de promettre l’électricité 24/24, mettre en garde l’opposition et planifier le terrain à la tenue du référendum et, un peu plus tard, aux élections générales.
Les actes de violences se multiplient un peu partout dont à Port-au-Prince. On reproche au gouvernement actuel nombre de choses qui ne cadrent pas avec la liberté d’expression, pourtant le discours reste inchangé comme si tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Le président de la République d’Haïti joue le tout pour le tout en invitant l’opposition à un dialogue dont il fixe d’avance les modalités.
Le chef de la diplomatie haïtienne tient un discours de conquérant ces derniers moments. Il axe principalement ses prises de parole sur la corruption laissant, toutefois, dégringoler le kidnapping et l’insécurité dans le pays. Des proches de son régime, recherchés par la police, sont arrêtés et libérés sur le champ, alors que de paisibles citoyens sont livrés aux forces de l’ordre et ne sont plus libres de leurs mouvements. Il est indifférent aux abus de pouvoir que lui reproche l’opposition.
Les opposants au pouvoir essaient la carte étrangère
Ceux qui appellent au départ de Jovenel Moïse crient dans le désert depuis tantôt quatre ans. La communauté internationale qu’ils accusent sans cesse ferme les yeux sur leurs revendications. Malgré l’indifférence de ces acteurs importants (ceux qui maintiennent au pouvoir M. Moïse, selon l’opposition), les anti-PHTK croient encore qu’ils peuvent changer de cap. Et, c’est à cette fin que les protestataires ont accusé, ces derniers moments, une présence plus importante sur la scène internationale. L’opposition a écrit au Secrétaire général de l’ONU pour faire valoir ce qui se passe dans le pays. Elle aspire, dans les jours qui viennent, à présenter un rapport exhaustif de la situation à plusieurs organismes de la communauté internationale, en même temps qu’elle maintient la mobilisation sur le terrain.
Rappelons que le 17 février dernier à la suite d’une visite du chef de l’État aux Gonaïves, Youri Latortue a dénoncé une manœuvre qui aurait pu provoquer un bain de sang. Selon lui, le chef de l’État, qui a réalisé cette parade militaire, avait l’intention de paniquer la population. Dans cette même veine, l’ex-sénateur de l’Artibonite a attiré l’attention de la population sur un véhicule suspect qui surveille son bureau qui joue également le rôle de siège provisoire de la direction politique de l’opposition (DIRPOD).
Daniel Sévère
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