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La violence envers les femmes,  l’une des formes les plus répandues de violation des droits humains

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La campagne des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre (VBG) est un événement annuel international qui se déroule le 25 novembre lors de la journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et qui prend fin le 10 décembre à l’occasion de la journée des droits de l’Homme. « C’est en effet une opportunité pour briser le silence et œuvrer ensemble dans un monde où chaque femme vit sans crainte », révèle à Le Quotidien News, Yvenie Chouloute, économiste et Présidente de l’organisation FIEF.

Lancée en 1991 par des activistes, cette initiative est l’occasion de sensibiliser aux conséquences sanitaires et sociales de la violence à l’encontre des femmes.Le thème retenu cette année par les Nations Unies est : « Investir pour prévenir la violence à l’égard des femmes ». En Haïti, pour marquer ces journées, plusieurs organisations actives dans la défense des droits des femmes en profitent pour renouveler leur engagement.

Cette campagne vise à mettre l’accent sur l’importance d’investir dans différentes stratégies de prévention afin d’éradiquer la violence sexiste. En effet, elle se clôture à la journée des droits de l’Homme, pour souligner l’importance fondamentale des droits humains dans la lutte contre la violence. « En reliant ces deux campagnes, on met en avant l’idée que la VBG est une violation des droits humains. La journée des droits de l’Homme offre une occasion de rappeler que chaque individu, indépendamment de son genre, a droit à la dignité, à la sécurité et à l’égalité, renforçant ainsi l’engagement envers la protection des droits humains dans le contexte de la lutte contre la violence envers les femmes », soutient la féministe Yvenie

« Cette campagne rappelle aux femmes victimes qu’elles ne sont pas seules. Même en l’absence de cadre juridique solide contre la violence en Haïti, elles peuvent porter plainte et parler pour se libérer. Bien que les changements ne se produisent pas de manière systématique, aujourd’hui les femmes s’affirment davantage, avec certaines organisations ou associations créant des espaces sûrs pour accompagner psychologiquement les femmes victimes de violence », poursuit-elle.

Les femmes et les filles font face au quotidien à différentes formes de violences ; violence sexuelle, physique, conjugale, économique, féminicide, entre autres.  Selon ONU Femmes, dans le monde, une femme sur trois subit des violences sexuelles ou physiques au moins une fois dans sa vie. En Haïti,  la recrudescence de l’activité des gangs est l’un des phénomènes contribuant à l’augmentation des cas de violences sexuelles et de viols collectifs. D’après un rapport de l’Office for the Coordination of humanitarian Affairs (OCHA), publié en novembre 2022, au moins 30% des femmes haïtiennes âgées de 15 à 30 ans ont été victimes d’abus ou de violences sexuelles.

Séquelles dévastatrices de la violence sexuelle chez les victimes

La violence sexuelle a un impact profond sur la santé mentale des victimes. Elle peut entraîner des troubles tels que le stress post-traumatique, la dépression, le suicide, l’anxiété, et d’autres problèmes de santé mentale. « Les survivantes peuvent éprouver des difficultés à établir des relations saines et à retrouver un sentiment de sécurité, nécessitant souvent un soutien professionnel et des services spécialisés pour surmonter ces séquelles », souligne la Présidente de FIEF.

Les femmes sont victimes d’inégalités au sein de la sphère publique

Selon les données de l’Office de Management et des Ressource Humaines (OMRH), en 2018, seulement 28,6% des agents de la fonction publique en Haïti sont des femmes contre 71,4% d’hommes. « Il faut savoir que nous vivons dans un pays où la problématique du genre est particulièrement évidente, avec un nombre peu élevé de femmes occupant des postes de responsabilité. Les femmes sont minoritaires en termes d’emploi et ont peu de pouvoir économique, tandis que le système judiciaire est défaillant, voire inexistant », soutient la PDG de FIEF, rappelant que ces journées visent à changer les comportements, à ne pas fermer les yeux, à faire pression sur les autorités pour obtenir un système de justice répondant aux violences, à réclamer nos droits, et à prendre nos responsabilités pour devenir des acteurs du changement.

Le féminicide : un crime de propriété

Le féminicide est le meurtre de femmes en raison de leur genre. C’est en effet un problème mondial qui alourdit la violence à l’égard des femmes. Selon ONU Femmes, en 2021, environ 45 000 femmes et filles dans le monde ont été tuées par leurs partenaires intimes ou d’autres membres de leurs familles. Cela signifie que plus de cinq femmes ou filles sont tuées chaque heure par leurs proches. Ce phénomène est souvent causé par des facteurs complexes et interconnectés. « Ces facteurs peuvent inclure des inégalités de genre profondément enracinées, la violence domestique, la discrimination, le sexisme systémique, et des normes culturelles qui perpétuent la domination masculine. Les conflits familiaux, les relations abusives, et l’impunité face à de tels actes contribuent également à cette tragédie », indique Me Chouloute, soulignant que l’éducation, la sensibilisation, l’amélioration des lois et des systèmes judiciaires, ainsi que le changement culturel sont essentiels pour lutter contre le féminicide.

Sans la mise en œuvre de changements concrets, la violence à l’égard du genre reste omniprésente

Cette campagne peut contribuer significativement à la sensibilisation et à la mobilisation contre la VBG. En mettant en lumière les problèmes liés à l’inégalité de genre, à la violence domestique et à d’autres formes de violence contre les femmes, la campagne encourage la conversation publique et la prise de conscience.

Cependant, selon l’activiste Yvenie, l’impact réel dépend de divers facteurs, notamment de la mise en œuvre de changements concrets dans les politiques, les lois et les attitudes sociales. Les actions qui suivent la sensibilisation, telles que l’amélioration des systèmes judiciaires, le renforcement des droits des femmes et la promotion de l’égalité des sexes, sont cruciales pour créer un changement durable et réduire efficacement la violence basée sur le genre.

« En Haïti, l’accès aux programmes d’accompagnement et de soutien pour les femmes et les filles victimes de violences peut être limité en raison de divers défis, tels que des ressources financières restreintes, des infrastructures fragiles et des facteurs culturels. Ces programmes peuvent ne pas atteindre toutes les victimes de manière équitable. Il est essentiel de travailler vers une expansion de ces services pour garantir qu’ils soient accessibles à toutes les femmes et filles affectées par la violence sexuelle, physique et d’autres formes d’abus. L’inclusion de perspectives culturelles et la sensibilité aux besoins spécifiques de divers groupes de femmes sont également cruciales pour une intervention efficace », a-t-elle estimé.

Toutefois, à côté des campagnes de sensibilisation, les organisations féministes peuvent mettre en place diverses perspectives pour remédier à la vulnérabilité accrue des femmes et des filles lors de crises successives. Cela peut inclure le renforcement des réseaux de soutien communautaire, la création de refuges sûrs, l’accès à des services de santé mentale, le plaidoyer pour des politiques de protection sociale renforcées, et l’autonomisation économique des femmes. En encourageant l’éducation et en luttant contre les inégalités de genre, ces actions contribuent à créer des environnements plus résilients et protecteurs pour les femmes et les filles. Cette initiative est l’occasion pour tous de se rappeler l’importance de respecter au quotidien les droits de chacun.

FIEF est une organisation s’impliquant entièrement dans la protection des femmes et des filles contre la violence et tous les autres abus pouvant entraver leur émancipation. Sa mission est de promouvoir le développement, l’émancipation, l’épanouissement et l’autonomisation de la femme haïtienne, à la fois sur le plan social, économique et environnemental. Elle le fait en organisant des ateliers et des séances de formation gratuits pour les jeunes filles et les femmes, renforçant ainsi leurs capacités pour qu’elles puissent atteindre leur plein potentiel en tant que femmes épanouies, socialement engagées et responsables.

Que fait l’organisation FIEF comme actions pendant les 16 jours d’activisme ?

FIEF, avec seulement douze mois d’existence, participe pour la première fois cette année à la campagne des 16 jours de sensibilisation pour lutter contre la violence basée sur le genre. Pour marquer cette occasion, une journée portes ouvertes a été organisée le 26 novembre à la Bibliothèque Michèle Tardieu.

En début de journée, une exposition de photos a été présentée, mettant en lumière des femmes victimes de violences, assassinées, violées, mais aussi des survivantes. Ensuite, une conférence-débat a eu lieu, suivie de la projection d’un documentaire. Un atelier de formation en autodéfense a été proposé. Pour conclure, une séance de photos a été organisée.

Marie-Alla CLERVILLE

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