Lutte contre la violence faite aux femmes en Haïti: il y a encore du chemin à parcourir
5 min readLe lundi 8 mars 2021 a marqué la cinquantième commémoration de la journée internationale des droits de la femme. Quoiqu’elles en parlent chaque jour, les femmes évoluant au sein du journal Le Quotidien News en ont profité pour émettre leur point de vue sur la problématique des droits de la femme en Haïti.
« Aujourd’hui, une femme qui se fait violenter par un homme, peut hausser la voix pour dire non à la violence, à la maltraitance, et elle sait qu’elle peut le traduire en justice pour le contraindre à respecter ses droits », a énoncé la directrice ajointe du journal Le Quotidien News Louvemise Sénatus, soutenant qu’en vertu de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, les femmes peuvent se prononcer sur leur condition dans la société. Gestionnaire de formation, Mme Sénatus a bouclé son cursus en Gestion financière à l’Université Quisqueya en 2019.
Louvemise Sénatus n’a pas sa langue dans sa poche sur la problématique des droits de la femme en Haïti, elle pointe le problème fondamental en soulevant la question du salaire équitable. « Je ne comprends pas pourquoi une femme perçoit un salaire nettement inférieur par rapport à son collègue masculin qui fait le même travail et qui a les mêmes compétences », s’interroge Louve. « Elles sont parfois plus compétentes, n’empêchent qu’elles sont discriminées à cause de leur sexe », poursuit-elle.
« Parce qu’on est femme on veut nous faire croire qu’on est libre de s’habiller comme on veut, or, les hommes ne cessent de nous lancer quotidiennement des commentaires sexistes et agaçants », s’indigne-t-elle. Le pire, c’est que la société s’entête à innocenter les harceleurs pour incriminer les femmes. « Quand ils portent un pantalon moulant au point qu’on s’interroge sur comment ils ont fait pour l’enfiler, on ne se jette pas sur eux pour autant avec des remarques sexistes quitte à les violer », a tancé la directrice ajointe du journal.
Par conséquent, la lutte doit continuer en Haïti comme ailleurs pour combattre le sexisme. Toutefois, elle admet que la journée du 8 mars symbolise une victoire pour la gente féminine partout à travers le monde.
Sara Ketsia Despeignes, quant à elle, dénonce le harcèlement sexuel, un comportement agressif qui gangrène la société. « J’ai été étonnée d’apprendre que même le terme « harcèlement sexuel » n’est pas mentionné dans la législation haïtienne », a fait savoir l’étudiante en troisième année en Communication sociale à l’Université Notre Dame d’Haïti, Ketsia Despeignes, qui a eu à produire un article sur ce sujet, indiquant que les femmes en sont victimes chaque jour. En ce sens, une réforme légale est nécessairement primordiale pour le respect intégral des droits de la femme.
La rédactrice a également signalé l’hyper sexualisation du corps de la femme qui, selon elle, constitue un problème récurrent bien que les femmes du mannequinat soient consentantes et en fassent un emploi. « Comment peut-on utiliser le corps dénudé d’une femme comme appât pour vendre des produits qui n’ont pas nécessairement un caractère sexuel, comme une boisson gazeuse ? », a questionné la rédactrice qui pense que le respect des droits de la femme est trop important pour débattre de la question en une journée. « Ce doit être l’affaire de tous les jours », a-t-elle soutenu.
Elle a ensuite abordé le sexisme qui caractérise certaines musiques diffusées dans les médias, qui intensifient la culture du viol. « Parfois on réagit inconsciemment en fonction de ce qu’on regarde, de ce qu’on entend. On ne peut donc espérer le changement alors que notre inconscient emmagasine ce qui n’est pas pour le changement », a regretté Ketsia Despeignes qui croit qu’il est enfin temps que les médias cessent de diffuser ces tracks sexistes.
La plus jeune rédactrice du journal et cheffe de la rubrique de Vendr’art, Leyla Bath-Schéba Pierre Louis, âgée de dix-huit ans, constate qu’on a encore du chemin à faire en Haïti en ce qui concerne les droits de la femme. « La société refuse toujours d’accepter que les femmes ont totalement les mêmes droits que les hommes, qu’elles ont leur place dans tout ce qui a lieu dans leur communauté », a tristement remarqué la plume du chronique « Un voyage vers l’extraordinaire ». Pour elle, il est par conséquent nécessaire que les femmes s’imposent davantage dans leur communauté. « Elles doivent s’intégrer et s’imposer dans la société en prouvant leur valeur combien importante pour le développement. Parallèlement, les hommes doivent cesser de s’obstiner à leur barrer la route, mais doivent leur prêter main forte pour l’équilibre social », a-t-elle proposé.
Les jeunes dames de la rédaction du journal sont toutes conscientes que le secteur médiatique a un rôle prépondérant à jouer dans le respect des droits de la femme en Haïti. En effet, Ketsia Despeignes croit que les médias doivent en premier lieu mieux analyser les contenus musicaux à caractère sexiste pour contrer la culture du viol. Elle avance en outre que les espaces médiatiques peuvent s’engager dans la sensibilisation de la société sur la thématique des droits de la femme. « Les médias peuvent également promouvoir la femme en Haïti à travers des rubriques qui mettent en valeur les réalisations féminines », a-t-elle suggéré. L’artiste d’Encre sous plume qui est en terminale au Collège Méthodiste de Frères, Leyla Pierre Louis, abonde dans le même sens. La consœur Louvemise Sénatus, PDG de Hype n’trend (une agence de shipping et de shopping en ligne), pense en conclusion que les médias doivent dénoncer les dérives, les violences faites aux femmes quelle que soit leur nature.
Statler LUCZAMA
Luczstadler96@gmail.com