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« N ap Kontinye fe konbit », déclare Louino Robillard, le promoteur du Konbit en Haïti

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« …Nous n’avons pas le droit d’abandonner, car nous sommes une nouvelle génération qui a une responsabilité », martèle  Louino Robillard, leader communautaire, qui a grandi à Cité soleil, vaste bidonville gangrené par les gangs. Robi, ainsi surnommé par ses intimes, croit que le changement est encore possible en Haïti. Mais cela doit se faire par le Konbit, le vivre-ensemble. Découvrons dans ce chapitre de « Moun ou dwe Konnen », Louino Robillard.

Leader honorable et vertueux ayant le sens du sacrifice, Louino Robillard est un fils du grand Nord, qu’on reconnaît par son sens du patriotisme. Il a vu le jour en avril 1986 dans la section communale de Bouraya, à Saint Raphaël. Toutefois, c’est dans la cité réputée pour son climat de terreur, Cité Soleil, qu’il a grandi. Car son père, François Robillard, a été contraint d’abandonner sa ville natale pour se rendre à la capitale, en vue d’une meilleure vie, après le décès de sa mère, Roseline Phanord Robillard.

Après avoir bouclé ses études classiques au Lycée national de Cité Soleil, Louino a étudié la Gestion municipale, grâce à un programme visant à former des cadres pour les mairies. Suite à ce programme de formation, il a passé six mois comme cadre du Ministère de l’intérieur, à la section fiscale de la mairie de Cité Soleil. Après le séisme du 12 janvier 2010, Louino a jugé nécessaire de faire des études en Gestion humanitaire. Il a donc appris la cartographie Open source et Open StreetMap. Des études, qui se sont avérées de grande utilité, suite auxquelles il a intégré l’Organisation Internationale de la Migration (OIM) pour une durée de seize mois.

Ayant grandi à Cité Soleil, vaste bidonville gangrené par les gangs, Louino a toujours été conscient de l’urgence du changement dans cette commune. Pour mieux aborder cette quête, il a démissionné de l’OIM pour aller faire une maîtrise en « Applied  community change and peace building a Future generation University », située à West Virginia aux États-Unis, en 2012. Il a articulé son travail de recherche sur le Konbit, une forme d’organisation traditionnelle basée sur l’entraide et le vivre-ensemble.

Louino Robillard, promoteur du Konbit

« Je crois que le Konbit est le contrat social haïtien, déclare le disciple d’Odette Roy Fombrun, théoricienne du Konbitisme, décédée le 23 décembre 2022 à l’âge de 105 ans. C’est la seule pratique ou philosophie en Haïti qui valorise l’unité, la force commune pour construire, planter et récolter ensemble », poursuit le leader de Konbit Solèy Leve. Selon lui, si les Haïtiens s’inspirent à nouveau du Konbit avec tous ses principes et valeurs (participation, collaboration, transparence, équité, réciprocité, durabilité…), Haïti deviendra un pays où tout le monde aura droit de vivre dans le bien-être.

En 2011, de concert avec quelques jeunes professionnels de Cité Soleil, Louino Robillard a lancé Konbit Solèy Leve, un mouvement qui prône la paix, oriente vers un nouveau leadership, et sensibilise sur l’importance du Konbit. « Ce mouvement nous a permis de découvrir de nombreux leaders sociaux dans la commune, et a également contribué à faire régner un climat de paix dans la commune durant de nombreuses années », indique le leader, patriote.

C’est aussi ce mouvement qui est à l’origine de l’un des plus grands projets communautaires du pays durant ces dernières décennies, visant à mobiliser environ 10.000 personnes en vue de construire une bibliothèque dans la commune de Cité Soleil. Une construction qui devrait coûter 50.000.000 de gourdes. « Ce projet inspirait de l’espoir aux habitants de Cité Soleil, et à Haïti toute entière », déclare Louino Robillard, ambassadeur de Konbit Bibliyotek Site Solèy (KBSS).

Lancé en 2017, le projet KBSS est encore d’actualité, même si, pour l’instant en raison de la guerre des gangs qui asphyxie la commune, les travaux de construction sont interrompus. Dans l’intervalle de deux ans, plus de 60% de la construction ont été réalisés, à en croire les propos de M. Robillard. Si l’on croit les chiffres, 6 868 donataires, 26 393 869,66 gourdes, 27 689 livres, ont été mobilisés dans le cadre de ce projet à partir duquel d’autres initiatives à travers tout le pays ont vu le jour.

« Quasiment tous les grands rêves de cet immense bâtiment ont été réalisés. Malheureusement en 2020, la guerre a éclaté. Les politiciens et les gangs ont replongé la cité dans la violence. Jusqu’à présent, environ 36 mois plus tard, les chantiers sont toujours à l’arrêt », regrette amèrement Louino Robillard, affligé par ce qui se passe dans cette commune qui l’a vu grandir. Il ne cache pas son amertume. Pour lui, la faute incombe au mauvais leadership des plus hautes instances du pays qui instrumentalisent les vies humaines, en absorbant l’énergie des jeunes, notamment des plus vulnérables qui, aujourd’hui, se mettent à tuer les membres de la population civile. « Il faut mieux encadrer les jeunes. Il nous faut des gens compétents et conscients à la tête de l’Etat », réclame Louino Robillard, père de famille.

Malgré ce vent de malheur qui souffle sur Haïti, Louino Robillard croit que le changement est encore possible en  Haïti. « Nous n’avons pas le droit d’abandonner », martèle-t-il. «Nous sommes une nouvelle génération qui a une responsabilité…S’engager dans le développement de sa communauté ou de ce pays, n’est pas un choix mais une responsabilité », continue l’entrepreneur social, invitant les Haïtiens à faire du Konbit le pilier de leur engagement.

 « Si tu décides de rester en Haïti, malgré la situation, utilise ton temps à bon escient, continue d’apprendre chaque jour quand tu as l’opportunité de le faire, participe à autant d’initiatives positives que tu peux. Fe tan w vo yon bagay », conseille-t-il à la jeunesse.

Statler LUCZAMA

Luczstadler96@gmail.com

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