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Population et Santé Publique en Haïti : un mariage non consommé

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Politique publique et contrôle de la population sont inséparables puisqu’on ne pourrait pas bien penser pour une population dont on ne connaît pas les caractéristiques. Cette nécessité de liaison entre les deux termes précités donne, depuis la consolidation de l’État moderne,  une place de choix à la démographie dans les décisions étatiques. Qu’en est-il de la disponibilité des données démographiques en Haïti ? Étant donné que le dernier recensement remontait à 2003, et l’Institut Haïtien de Statistiques et de l’Information (IHSI) ne procède que par projection ces derniers jours, la réponse est simple : le pays n’est pas bien équipé en matière d’information sur la population. Cette défaillance pourrait limiter bon nombre d’initiatives pouvant conduire à une intervention efficace pour la protection  de la population, surtout les groupes vulnérables. 

En ce qui concerne plus strictement le Covid-19, considérant le fait que les experts en médecine, après moules observations et analyses,  s’accordent pour confirmer que le virus frappe plus durement les personnes âgées et celles souffrant déjà des maladies considérées comme dangereuses, une connaissance de la population est nécessaire pour les aider.  Sur la base de ce constat, et avec des données statistiques fiables, le ministère de la santé publique pourrait, comme le font certains pays, faire une projection sur le pourcentage de la population qui est susceptible d’être tué. Un tel travail pourrait non seulement aider les décideurs dans les mesures visant à contrer la propagation du virus mais aussi mettre plus de vigilance sur la catégorie jugée plus fragile. 

Malheureusement, les chiffres font défaut. Ce qui constitue un obstacle incontournable dans toute éventuelle planification en matière de protection de catégorie sociale ciblée. 

«Les statistiques disent qu’Haïti est un pays de jeunes », soutient Jean Rénol Élie dans la note introductive des cahiers du Centre en Population et Développement ( CEPODE) janvier 2015, no.5 /Faculté des Sciences Humaines (FASCH). Cela peut réjouir un peu en se rappelant que le  covid-19 est moins efficace sur les jeunes. Mais c’est insuffisant en ce qui concerne une politique d’intervention en matière de santé publique si toutefois l’État veut s’engager à prévenir la contamination des cibles fragiles au lieu de se contenter uniquement de dépister des cas suspects. 

Honteusement, le dernier recensement remonte à 2003. Et comme on l’a déjà souligné, depuis lors, l’IHSI ne fait que procéder par projection. Sans vouloir discréditer les mérites des projections, il est important de préciser qu’elles s’agissent des techniques compensatoires. Et dans un contexte où les mouvements de population sont très rapides, on ne peut que constater une défaillance. À preuve, selon le recensement de 2003,  »(…)pour une population de totale de 7 929 408, les moins de 18 ans étaient au nombre de 3 677 357, soit environ 50% du total » (idem). Tandis que, selon les projections de l’HISI, en 2015, on a  »(…) une population totale de 

10 432 111 habitants dont 20,9 % de jeunes entre 15 et 24 ans » (idem). Une augmentation d’à peu près de 6 000 000 de têtes en 12 ans. De nos jours, avec la crise administrative qui affecte l’HISI, les données  sont autant indisponibles que douteuses. Ce qui rend impossible toute tentative d’avoir un pourcentage plus ou moins fiable de la somme des personnes âgées et celles souffrant d’une maladie favorable à la performance du coronavirus. 

Dans cette situation, l’État haïtien n’a pas la chance de surprendre le covid-19  par le biais d’une politique d’intervention efficace en matière de santé publique dans le pays. C’est la dure tribulation d’un ministère qui n’arrive pas, au moment utile,  à faire le lien entre les deux composantes de son existence : santé publique et population. Car les rares données déroutantes du MSPP et celles des ONG qui paraissent un peu  plus systématiques ne peuvent que mousser l’inquiétude  de ceux qui attendent de l’État une intervention digne de son  nom. 

Michelin ETIENNE

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